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L'accord trouvé sur le Centre interfédéral pour l'égalité des chances

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 133 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 27/07/2012
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à DEMOTTE Rudy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    Un accord de coopération est intervenu entre l'Etat fédéral et les entités fédérées pour que le CECLR soit transformé et devienne le Centre interfédéral pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme et les discriminations. Ce Centre devrait être opérationnel le 30 juin prochain. Quelles sont les modalités de l'accord intervenu ? Comment se répartiront les compétences de chacune des entités dans la nouvelle structure et quel sera son mode de fonctionnement ? Où le siège sera-t-il installé ? Quel est le partage intervenu quant aux modalités budgétaires et à la participation financière de chacune des entités ? Quel sera le rôle linguistique du personnel et la clé de répartition utilisée pour celui-ci ? Des transferts de personnel sont-ils prévus ? Lesquels ?

    Le nouveau Centre sera dépourvu des questions relatives à l'analyse des flux migratoires, à la protection des droits fondamentaux et à la lutte contre la traite des êtres humains. Un nouveau Centre fédéral sera créé à cet effet. N'est-il pas étonnant que ces matières soient traitées par un Centre fédéral et non interfédéral alors que les questions migratoires touchent directement les compétences des Régions et des Communautés comme l'a prouvé le récent débat sur la politique d'intégration ! Quel est le point de vue de Monsieur le Ministre-Président ? Estime-t-il devoir revenir sur l'accord négocié ? Les entités fédérées vont-elles devoir céder des compétences au Fédéral ? Lesquelles ?
  • Réponse du 17/08/2012
    • de DEMOTTE Rudy

    En réponse à la question écrite de l’honorable Membre, il est porté à sa connaissance les éléments suivants, fournis en qualité de Ministre-Président chargé des relations intra-belges.

    Pour le surplus, l’honorable membre pourra interroger les ministres wallonne et communautaire chargées de l’égalité des chances, qui ont participé ensemble aux négociations ayant permis d’aboutir à un accord qui renforcera la lutte contre toutes les formes de discrimination, dans le respect des compétences de chaque entité.

    Pour rappel, le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme a été créé par la loi du 15 février 1993. Il exerce, depuis lors, ses missions en toute indépendance en vue de promouvoir l'égalité des chances et de combattre toute forme de distinction, d'exclusion, de restriction ou de préférence fondée sur les critères figurant dans les lois anti-discrimination et antiracisme du 10 mai 2007.

    De son côté, la Wallonie s’est dotée d’un haut niveau de protection contre les discriminations, par l’adoption du décret du 6 novembre 2008, modifié par le décret du 12 janvier 2012 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination.

    Ce texte transposait une série de directives européennes portant sur l’égalité de traitement et l’interdiction des discriminations fondées sur :
    1° la nationalité, une prétendue race, la couleur de peau, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique ;
    2° l'âge, l'orientation sexuelle, la conviction religieuse ou philosophique, un handicap ;
    3° l'état civil, la naissance, la fortune, la conviction politique, la langue, l'état de santé actuel ou futur, une caractéristique physique ou génétique ou l'origine sociale ;
    4° le sexe et les critères apparentés que sont la grossesse, l’accouchement et la maternité ou encore le transsexualisme ou le changement de sexe.

    L’efficacité de la lutte contre les discriminations a conduit le législateur européen à demander aux Etats de créer, de reconnaître ou de désigner un ou plusieurs organes indépendants chargés de promouvoir l’égalité de traitement.

    Du côté wallon comme du côté de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le Centre pour l’égalité des chances a également été désigné comme service de conciliation via la signature d’un protocole de collaboration.

    Ce mouvement s’est accompagné d’un effort de décentralisation offrant des guichets de proximité aptes à apporter une information ou recevoir des plaintes. Les douze Centres d’information et d’accueil et Espaces de Wallonie (Arlon, Bruxelles, Charleroi, Eupen, La Louvière, Liège, Mons, Namur, Nivelles, Tournai, Verviers) sont ainsi compétents pour entendre et traiter les plaintes pour discrimination, en apportant directement une information. Au total 47 agents travaillent pour ces Centres et Espaces.

    Afin de garantir plus de sécurité juridique et de répondre au prescrit de la Directive européenne 2000/43/CE demandant aux Etats membres de mettre en place des organes indépendants chargés de promouvoir l’égalité de traitement dans les matières visées par cette Directive, un accord de coopération était souhaitable pour que cette institution fédérale soit désignée par les entités fédérées comme organe de promotion de l’égalité au sens des directives européennes et puisse exercer pleinement ses missions dans leurs compétences, notamment pour agir en justice.

    Par ailleurs, l’article 30 du décret wallon relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination précise que le gouvernement conclut un accord de coopération avec l’Etat fédéral habilitant le Centre et l’Institut à ester en justice dans les litiges auxquels l’application du décret donnerait lieu.

    La Déclaration de politique régionale et la Déclaration de politique communautaire évoquent la volonté des gouvernements de développer un accord de coopération en vue d’« interfédéraliser » le Centre pour l’égalité des chances et, ainsi, consolider les outils de lutte contre les discriminations.

    C’est sur cette base que se sont déroulées les négociations sur la note de principe et l’accord de coopération visant à l’interfédéralisation du Centre pour l’égalité des chances.

    Un groupe de travail interfédéral a élaboré une note de principe déterminant le périmètre et les grandes orientations, ainsi qu’un avant-projet d’accord de coopération.

    Après de très nombreuses heures de réunions, un projet d’accord de coopération s’est dégagé.

    Cet accord retient les principes essentiels suivants :

    Le Centre actuel devient le Centre interfédéral pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme et les discriminations. Il est habilité à mettre en œuvre ses missions dans les compétences de l’Etat fédéral comme des entités fédérées (son siège demeurera à Bruxelles). Ses missions sont parfaitement connues et concernent la promotion l’égalité des chances, le suivi des tâches prévues dans l’article 33 §2 de la Convention du 13 décembre 2006 des Nations Unies en ce qui concerne les droits des personnes avec un handicap, la réalisation d’études et de recherches, la remise d’avis et de recommandations ou l’organisation d’actions de sensibilisation. Nouveauté de l’accord, si nécessaire, le centre pourra ester en justice

    Le Centre exercera ses missions en toute indépendance, conformément aux Principes de Paris, tels qu’ils figurent à l’annexe de la résolution 48/138 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 20 décembre 1993.

    Le Centre sera géré par un conseil d’administration interfédéral composé de 20 membres, auxquels s’ajoute le membre de la Communauté germanophone, dans le rapport suivant :
    * 10 membres désignés par la Chambre des représentants, dont au maximum 5 du même sexe ; 5 membres appartenant au rôle linguistique néerlandophone, 5 membres appartenant au rôle linguistique francophone ;

    * 10 membres plus 1 membre (dont au maximum 6 sont du même sexe) désignés par les Régions et les Communautés, selon la répartition suivante :
    - 4 membres désignés par le Parlement flamand, dont au maximum 2 du même sexe;
    - 2 membres désignés par le Parlement wallon, dont une femme et un homme ;
    - 2 membres désignés par le Parlement de la Communauté française, dont une femme et un homme ;
    - 2 membres désignés par le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, dont une femme et un homme et dont un membre appartient au rôle linguistique néerlandophone et un membre au rôle linguistique francophone ;
    - 1 membre désigné par le Parlement de la Communauté germanophone.

    Le Conseil d’Administration interfédéral peut se réunir sous la forme d’une session plénière ou sous la forme de chambres restreintes. Ces chambres sont :
    * une chambre fédérale composée des 10 membres désignés par la Chambre des représentants ;
    * une chambre flamande composée des 4 membres désignés par le Parlement flamand ;
    * une chambre francophone composée des 4 membres désignés par le Parlement wallon (2) et le Parlement de la Communauté française (2) ;
    * une chambre bruxelloise composée des 2 membres désignés par le Parlement de la Région Bruxelles-Capitale.

    Le conseil d’administration interfédéral et les différentes chambres prennent leurs décisions à la majorité absolue (50% des voix émises plus une voix).

    La loi sur l’emploi des langues administratives est d’application.

    Lorsqu’un dossier relève d’une compétence exclusive d’une Région ou d’une Communauté, les prérogatives du conseil d’administration sont exercées par la chambre compétente. Le conseil d’administration est responsable des arbitrages en cas de litige entre chambres.

    Effectivement, les missions exercées par le Centre en matière de migration et de traite des êtres humains seront désormais exercées par une autre instance, spécifiquement créée par une loi fédérale. Cette situation n’est pas celle défendue par la Wallonie et la Fédération Wallonie-Bruxelles mais, dans le cadre d’une négociation qui implique de voir chacune des parties obtenir satisfaction sur une part de ses revendications, cet élément rencontre une demande forte émise par la Flandre.

    Cet élément fait donc partie de l’accord global dont l’équilibre a été négocié. Il a été accepté comme un compromis, moyennant les garanties suivantes :

    Afin de conserver un lien nécessaire avec le nouveau Centre interfédéral pour l'égalité des chances, le Gouvernement fédéral veillera à ce que les personnes qui siègeront dans le conseil d’administration de la chambre fédérale du Centre interfédéral pour l’égalité des chances constituent également le conseil d’administration du Centre fédéral compétent pour l’analyse des flux migratoires, la protection des droits fondamentaux et la lutte contre le traite des êtres humains.

    De plus, il est prévu qu’à terme, ce centre des migrations rejoigne la coupole interfédérale des droits de l’homme. En effet, à l’initiative de l’Etat fédéral, un accord de coopération relatif à une Institution nationale des droits de l’homme sera élaboré avant juin 2013, en vue d’intégrer dans un même ensemble les différentes institutions de protection des droits de l’homme, en tenant compte des organismes existants.

    Le Centre interfédéral pour l’égalité des chances est cofinancé par les entités fédérées, selon une clef de répartition de 79/21 établie dans l’accord de coopération. La Fédération Wallonie-Bruxelles et la Wallonie prennent en charge 48% du budget à charge des entités fédérées (selon un rapport 12/36), la Flandre 48%, Bruxelles 3% et la Communauté germanophone 1%.

    En 2013, seront maintenus les budgets actuels déjà prévus via les protocoles d’accord, soit 299 063 euros. En 2014, le financement wallon passera à 437 000 euros et, en 2015, à 590 400 euros.

    Aucun transfert de personnel n’est prévu dans l’accord. Pour les questions pratiques, l’honorable membre pourra interroger les ministres compétentes en matière d’Egalité des chances.

    Il apparaît donc que les représentants de la Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles ont relayé la volonté des deux gouvernements d’aboutir à la conclusion de cet accord de coopération visant à construire, avec l’ensemble des partenaires, une institution indépendante et efficace de lutte contre le racisme et les discriminations.