/

La place de l'acier dans la politique industrielle de l'Union européenne

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2012
  • N° : 15 (2012-2013) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 18/10/2012
    • de TROTTA Graziana
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, des P.M.E., du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles

    Le 11 octobre dernier, Monsieur le Ministre a débattu avec ses homologues européens de la politique industrielle de l'Union européenne dans le cadre du Conseil « Compétitivité ».

    La veille de cette réunion, la Commission européenne, par l'intermédiaire du commissaire Antonio Tajani en charge de l'industrie, a présenté sa communication sur la politique industrielle.

    Avec la nouvelle stratégie industrielle décrite dans cette communication, la Commission entend «inverser la tendance à l’affaiblissement du rôle de l’industrie en Europe en faisant passer la part de ce secteur dans le PIB de son niveau actuel d’environ 16 % à 20 % d’ici à 2020».

    Elle propose de travailler de concert avec les États membres et l'industrie pour se concentrer sur les investissements et l’innovation selon «six lignes d’action prioritaires : les technologies de fabrication avancées, les technologies clés génériques, les bioproduits, une politique industrielle, une construction et des matières premières durables, les véhicules propres et les réseaux intelligents».

    On peut déplorer le fait que la communication de la Commission ne mentionne pas une seule fois la sidérurgie et l'acier. Il y a pourtant bel et bien des secteurs dans ce domaine qui fabriquent des produits de niche à haute valeur ajoutée, produits que la concurrence, en particulier extra-européenne, ne peut pas fabriquer faute de savoir-faire.

    Quelle est précisément la position de la Belgique, que Monsieur le Ministre représente dans ce domaine, sur ce point ? Monsieur le Ministre s'est-il entretenu directement avec le Commissaire Antonio Tajani sur l'absence de l'acier dans la communication de la Commission ?

    Selon la presse, l'objectif de Monsieur le Ministre serait de «pousser la Commission à mettre en place dans le secteur de l'acier des mesures qui protègent les activités à haute valeur ajoutée, à terme, de la concurrence des groupes non européens en Europe». Il aurait notamment proposé de mettre en place «un mécanisme de surveillance primaire des importations d'acier qui menaceraient clairement les productions locales».

    Monsieur le Ministre peut-il en dire davantage sur ces mesures de protection potentielles ? Quels sont les États européens favorables à ce type de mesure ? Quel est «l'équilibre des forces» sur ce dossier au niveau européen ? Comment avancent ces propositions ?
  • Réponse du 22/11/2012
    • de MARCOURT Jean-Claude

    La Commission européenne a présenté sa communication sur le réexamen de l’initiative sur la politique industrielle le 10 octobre dernier. Cette communication identifie quatre domaines et six lignes d’action prioritaires. Elle s’inscrit dans le suivi d’une consultation à laquelle la Région wallonne a répondu au début de cette année. De même, la région a été à l’origine d’un « non-papier » sur le sujet. Celui-ci a été présenté au conseil et à la commission le 11 octobre dernier.

    Lors du conseil qui réunissait les Ministres de l’Industrie des 27, le 11 octobre, c’est précisément la Région wallonne qui, en accord avec les autres régions, représentait la Belgique. Les deux grandes lignes de force de l’intervention étaient :
    1) L’importance d’une prise en compte de l’industrie dans d’autres formations du Conseil.

    L’approche de la commission doit en effet être globale et mieux intégrée. Dès lors l’ensemble des secteurs, y compris la sidérurgie et les secteurs en mutation, qui ne sont pas mentionnés dans la communication de la commission, doivent y trouver leur place. L’importance de la cohérence de l’approche communautaire a été soulignée. Pour la Région wallonne, il faut que la politique industrielle figure à part entière dans le cadre financier pluriannuel, mais en outre il faut qu’elle s’appuie sur des politiques énergétiques, environnementales, d’emploi, commerciales et dans le domaine de la concurrence.

    2) La nécessaire transversalité de la Politique industrielle dans la relance économique.

    La politique industrielle est, pour la Région wallonne, une politique transversale et un élément essentiel de la relance. Dans cette perspective, il faut être attentif à ce que la suppression d’investissements ne handicape cette place et ce message a été relayé auprès du conseil et de la commission. Il a été demandé que les outils de contre-offensive face aux abus de positions dominantes – outils qui existaient dans le Traité CECA - soient sérieusement examinés par la commission. Cette dernière a également été invitée à harmoniser et à simplifier le régime des aides d’État comme le demandait la France, suivie par sept autres pays, dont la Belgique.

    La crise s’aggravant dans le secteur de l’acier, la commission a mis en place un plan d’action pour mieux gérer celle-ci à l’instar de ce qu’elle a fait, en 2009, pour le secteur de l’automobile et, plus récemment, pour la construction. En septembre dernier s’est réuni un groupe de sherpas du secteur. Ce groupe doit se revoir en décembre prochain. Son objectif est de faciliter le dialogue entre toutes les parties prenantes du secteur. La première réunion a déjà abouti à des constats communs aux parties prenantes sur la nécessité de mettre en place des mesures spécifiques notamment dans le domaine de la politique commerciale extérieure. Une des premières mesures envisagées par le commissaire Antonio Tajani, suite à cette rencontre, est la prolongation d’un mécanisme de surveillance primaire des importations d’acier en Europe. Un tel dispositif existe déjà, mais il arrive à échéance à la fin de l’année. La situation actuelle dans le secteur de l’acier justifie à elle seule une telle prolongation, comme le demandent plusieurs États membres producteurs d’acier. C’est le cas de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne, de la Roumanie, de l’Autriche, le Grand-Duché du Luxembourg et, bien entendu, de la Belgique. La décision de prolongation doit être prise par le commissaire en charge du Commerce extérieur, M. Karel De Gucht, et des contacts ont été pris en ce sens.

    L’intérêt de la démarche du Commissaire Tajani est qu’il compte réunir les seuls États membres producteurs d’acier dans le cadre d’un groupe dit de haut niveau. Ce groupe comprendrait seulement onze membres, ce qui permet d’éviter les habituelles discussions contradictoires entre les partisans d’une réindustrialisation de l’Europe et ceux qui, comme les États du Nord emmenés par les Pays-Bas et la Grande-Bretagne, s’opposent à une politique industrielle intégrée au nom du coût que risquerait de représenter une telle politique, mais aussi d’une volonté de privilégier les industries de service.

    Pour compléter l’information, on notera que les six domaines d’action dans le réexamen de l’initiative sur la politique industrielle sont :
    1) Les marchés pour des technologies avancées pour des productions propres : un PPP est proposé dans le cadre du projet SPIRE (Future and Sustainable Process Industries).
    2) Une politique de produits durables dans les domaines de l’industrie et de la construction : un plan d’action pour une construction durable pour 2013 – 2014 ; des réglementations spécifiques dans le domaine de l’écodesign ; fitness check pour un plan d’action pour développer de nouveaux marchés pour les déchets et le recyclage sont annoncés.
    3) Les véhicules verts : suite au rapport du groupe CARS21, la Commission annonce des actions en vue de soutenir l’introduction de véhicules alternatifs.
    4) Les marchés pour les produits de base –bio : la Commission annonce notamment un système de labellisation et de marchés publics verts basé notamment sur une initiative technologique conjointe.
    5) Des marchés pour les technologies clés génériques : la Commission envisage de soutenir des projets pilotes dans ce domaine avec l’ambition d’un faire un élément de base des Partenariats européens d’Innovation.
    6) Le Smart Grid : dans l’attente du rapport demandé par la Commission à ce sujet, elle définira ses objectifs dans ce domaine afin de rapidement mettre au point un agenda.

    On retiendra par ailleurs les éléments suivants qui intéressent directement notre région :
    - la Commission mettra l’accent sur l’investissement dans la recherche et l’innovation dans toutes ses politiques, et notamment dans la Politique de Cohésion. Les régions sont explicitement nommées comme des acteurs importants ;
    - les PME reçoivent une attention particulière ;
    - l’accès aux financements fait l’objet de propositions très concrètes ;
    - la politique commerciale, la proximité des marchés et des actions dans le domaine de l’énergie sont mises en avant comme des éléments centraux de relance de la politique industrielle ;
    - le marché intérieur sera renforcé principalement via des actions dans le domaine de l’harmonisation des normes et l’accès à la propriété intellectuelle ;
    - la Commission insiste enfin sur la qualité du capital humain et annonce des actions pour favoriser une meilleure articulation entre le monde du travail et celui de la formation, à tous les niveaux ;
    - l’accent est mis sur certains secteurs particuliers (pharmacie, industries de la défense, biotechnologies, véhicule vert et construction verte…) ;
    - les partenariats publics – privés sont privilégiés.

    La Wallonie n’est, a priori, pas mal positionnée, mais il faudra être attentif à saisir les opportunités offertes par les actions mises en œuvre par la commission dans les six secteurs prioritaires identifiés plus loin. La communication de la commission cadre en effet avec les politiques de redéploiement économique de la Wallonie. On retiendra principalement le focus mis sur le secteur de la pharmacie.

    Le réexamen de l’initiative sur la politique industrielle fera l’objet de conclusions au Conseil des Ministres de l’Industrie de décembre 2012.