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La négociation, après les accords de branche en matière de réduction des gaz à effet de serre, des accords de branche en faveur de l'emploi

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2012
  • N° : 7 (2012-2013) 1

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  • Question écrite du 25/10/2012
    • de STOFFELS Edmund
    • à DEMOTTE Rudy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    Monsieur le Ministre-Président a été le destinataire d’un « appel de la Confédération de la construction wallonne (CCW) aux autorités régionales et locales wallonnes  », daté du 31 août 2012 et demandant aux communes « des nouvelles mesures « à effet immédiat » contre la crise » et à la Région wallonne des mesures qui positionnent le secteur de la construction à moyen terme «  comme « secteur porteur » pour le redéploiement à l'horizon 2022 ». En d’autres termes, c’est une invitation à négocier avec le secteur un « accord de branche » en faveur de l’économie et de l'emploi (comparable aux accords de branche en matière d’énergie). On dit que le secteur de la construction est un bon indicateur pour la santé économique d’une région. Il me semble donc que la demande de la CCW est une opportunité qui pourra – espérons-le – faire école. Opportunité à saisir dans un esprit constructif à l’égard d’un secteur qui tend la main aux politiques que nous sommes, se proposant comme partenaire d’une politique à mettre en œuvre en commun.

    « En Wallonie comme ailleurs, la conjoncture de la construction oscille entre récession et stagnation (recul des prêts hypothécaires et des permis de bâtir, etc.), et cela en raison, d’une part, des incertitudes économiques internationales et, d’autre part, des récentes mesures fédérales de rigueur budgétaire. ». Le contexte appelle donc à ce que les efforts soient conséquents, mais aussi à ce que les perspectives fassent l’objet de négociations et d’accords de façon à ce que tout le monde puisse récolter les fruits des politiques mises en œuvre. Je pense particulièrement à la nécessité de négocier avec le secteur des objectifs en matière d’emploi et de formation – objectifs qui devront être traduits en résultats moyennant une contribution de toutes les parties autour de la table.

    Oui, actuellement, le climat économique est difficile pour les investisseurs tant privés que publics. C’est ainsi que la CCW regrette que « même le « pic » de travaux communaux que nous espérions, comme tous les 6 ans, à l’approche des élections locales (2006, 2000, 1994), ne s’est pas concrétisé en 2012 vu l’extrême prudence budgétaire des communes. ». La politique keynésienne, anticyclique ne démarre pas vraiment, bien que les besoins sont là. Mais leur mise en chantiers est postposée ou annulée, entre autres parce que les communes (et les provinces) sont confrontées à une série de dépenses courantes telles qu’elles inspirent plutôt la prudence voire même l’abstention des acteurs locaux sur le plan des chantiers d’investissement.

    « Heureusement, une série de programmes de travaux régionaux sont mis en œuvre, dont l’Alliance Emploi-Environnement, le « Pivert », l’ancrage communal de logements, le Plan « routes », les bâtiments scolaires, les stations d’épuration de l’eau, les infrastructures pour les ZAE etc. » La CCW applaudit la volonté du Gouvernement wallon d’attaquer une série de dossiers, mais estime que cela est « insuffisant pour réellement relancer la croissance économique générale. ».

    Aux yeux de la CCW, il faut à court terme une batterie de mesures complémentaires, à négocier par le Gouvernement wallon avec le secteur, certes, mais aussi avec les autorités locales, afin de les encadrer et de leur redonner confiance pour qu’elles puissent « prendre part à cet effort de relance économique à travers une série de mesures vertueuses, à effet immédiat et à coût quasi nul ». Citons les mesures visées par la CCW, sans trop entrer dans le détail :

    1° réalisation effective et accélérée des investissements et adjudications budgétés;
    2° simplification administrative dans les marchés publics; 
    3° accélération des délais de paiement;
    4° libération sans retard des cautionnements sur les travaux publics réalisés;
    5° délivrance accélérée des permis d’urbanisme et d’urbanisation.

    Les mesures demandées ne me semblent pas excessives, mais permettront de relancer une série de chantiers de façon à remplir les carnets de commandes pour la fin de l’année et pour l’année suivante – question de donner de façon proactive un coup d’impulsion à l’économie pour qu’elle puisse surmonter l’actuel stand-by et sans que cela ne demande des dépenses en plus, sauf que les dépenses seront faites plus tôt que sans ce coup de pouce. Va-t-on devoir négocier avec le secteur bancaire, et particulièrement les banques que nous avons aidées activement à s’en sortir lorsqu’elles étaient le dos contre le mur, des conditions de financement plus favorables à l’investissement local ? Probablement que oui ! Dans cet ordre d’idées : peut-on négocier une espèce d’écopack pour les communes ?

    Toujours pour stimuler l’activité à court terme, la CCW demande au Gouvernement wallon de renforcer l’équipe administrative chargée de gérer l’écopack pour éviter un goulet d’étranglement dans l’Alliance Emploi-Environnement et de mettre fin aux lenteurs et surcoûts des raccordements électriques provisoires comme définitifs.

    Après le coup de pouce, après l’élément déclencheur, il faut songer au redéploiement durable – tant pour l’économie que pour l’emploi. Et en effet, les défis sont de taille :

    1. Défi budgétaire : Régions dotées de nouvelles compétences fiscales et sociales, sans moyens financiers correspondants.
    2. Défi démographique : plus d’enfants, plus de ménages et plus de séniors, mais pénurie de logements, d’écoles et de séniories.
    3. Défi énergétique : la performance énergétique du bâti et les énergies renouvelables.
    4. Défi de la concurrence internationale.

    Ces défis ne nous laissent pas le choix : pour reprendre la CCW - il faut «plus de croissance quantitative et qualitative, plus d’activités, plus d’entreprises, plus d’emplois pour amener plus de recettes publiques, pour investir davantage à travers un climat social de qualité et un appareil public modernisé». C’est très exactement le sens du Plan Ambition 2020 que lancent l’UWE, l’UCM et avec eux la CCW. Et ce sont les principes que nous retrouvons dans la DPR, principes sous-jacents au PM 2.vert et à l’Alliance Emploi-Environnement. Principes que le Gouvernement wallon cherchera probablement à concrétiser dans le cadre du plan « Horizon 2022 ».

    Constatant la convergence des objectifs et des plans, la CCW se déclare prête à y contribuer, rappelant que la construction, avec son intensité en emploi, sa contribution déterminante au PIB, ses effets multiplicateurs et sa capacité de réponse aux besoins collectifs (écoles, logements, zonings, transports, PEB…), répond à la définition de ce qu’on appelle être un secteur porteur de l’économie et d’emploi.

    La construction se positionne donc comme pilier des stratégies de relance économique et de conversion vers un modèle d’économie durable voulu également par l’UE (voir les différentes directives) : citons à titre d’exemple la réduction de la consommation énergétique moyennant une PEB améliorée et le développement du potentiel d’innovation et de croissance des bâtiments à faible consommation d’énergie. Des investissements, qui – selon le Professeur Hindriks (UCL) s’auto-amortiront au fil des années grâce aux économies d’énergie…

    S’il est vrai que le SDER mise déjà partiellement sur la construction en rappelant la nécessité, d’ici 2040, de créer 350.000 nouveaux logements et d’en isoler 800.000 existants, il faut encore que l’objectif soit assorti des moyens nécessaires, faute de quoi, cela risque de rester un vœu pieux. L’annonce d’un objectif n’a encore jamais créé des emplois. La réalisation de l’objectif annoncé nécessiterait des moyens pour créer par an quelque 11.000 logements nouveaux et pour rénover par an quelque 26.000 logements existants. Comparons ces chiffres avec la réalité de maintenant et nous comprendrons vite qu’avec un budget de 900 M d'euros pour le logement public on sera condamné à courir derrière le lapin sans jamais avoir une chance de le rattraper. On aura donc bel et bien besoin du concours du secteur privé, du bailleur pour être clair à qui on doit réserver des conditions suffisamment attractives pour qu’il investisse dans l’immobilier.

    Allez-vous donc négocier avec la CCW (et le réseau de partenaires) pour trouver un accord, dans le cadre du SDER et du plan Horizon 2022, visant des objectifs chiffrés (à court terme, à moyen terme jusque 2022 et à long terme jusque 2040) ? Objectifs chiffrés et qui lient l’ensemble des partenaires.

    Objectifs répondant :
    - « aux défis énergétiques : amplification de l’alliance emploi-environnement en rénovation énergétique, création d’écoquartiers pilotes, développement des énergies renouvelables intégrées au bâti, soutiens à l’innovation …;
    - à la pression démographique : construction de crèches, d’écoles, de logements publics et privés, de séniories, d’infrastructures de transport (rail, route, eau), rénovation et densification des noyaux d’habitat … »;
    - mais aussi à la création d’emplois durables et à l’organisation de formations résolvant le défi de la pénurie de main-d’œuvre dont souffre le secteur depuis un certain temps.

    Sur quels thèmes faudra-t-il probablement discuter ? En voici quelques-uns :
    - outre les crédits classiques, il faudra parallèlement développer des financements alternatifs en logement et énergie (livrets d’épargne, SICAV, fonds de pension, tiers investisseurs, partenariats public-privé, Community Land Trust…);
    - rechercher de nouvelles recettes, entre autres, en voirie (redevances d’occupation et vignette autoroutière pour développer et entretenir les infrastructures);
    - réformer la fiscalité régionale et locale, notamment la fiscalité immobilière, afin de stimuler l’investissement résidentiel privé et l’accès à la propriété;
    - préparer de nouvelles alliances emploi-environnement dans le domaine de l’eau et des déchets;
    - amplifier les politiques visant à résorber les pénuries de main-d’œuvre qualifiée;
    - revaloriser des filières d’enseignement et de formation qui y mènent. L’alternance, tant pour les jeunes que pour les demandeurs d’emploi, est une méthode pédagogique à promouvoir. Elle devrait être promue comme une réelle alternative pour les métiers de la construction;
    - se renforcer face aux concurrences extérieures, la Wallonie doit non seulement renforcer la formation, l’innovation (cfr CSTC, Greenwin…), la qualité (cfr nouveau label Construction Quality), le financement et l’exportation de ses entreprises, mais il importe surtout d’harmoniser les règles du marché européen (charges sociales, conditions de travail, contrôles).

    Voilà un beau défi politique, une main qui est tendue par un secteur stratégique. Le Gouvernement wallon sera-t-il d’accord de négocier – pour reprendre ma formule initiale – à l’instar des accords de branche pour le secteur énergie des accords de branche visant la création d’activité économique et d’emplois en Région wallonne ? L’opportunité parait-elle séduisante à Monsieur le Ministre-Président ?
  • Réponse du 21/11/2012
    • de DEMOTTE Rudy

    Les acteurs socioéconomiques tels que la CCW sont les partenaires indispensables des politiques menées par le Gouvernement wallon. Le processus de concertation et de dialogue avec ces acteurs un atout à l’heure où nous devons prendre en main notre avenir.

    La Dynamique Horizon 2022 a été lancée en vue de pouvoir s’assurer que la Wallonie puisse, très rapidement, via une amplification de son développement économique, répondre aux nouveaux défis qui se présentent à elle, à savoir :
    - la réforme institutionnelle,
    - la modification du mécanisme de la loi spéciale de financement,
    - le changement du contexte économique,
    - les éléments liés aux financements européens

    Le Gouvernement wallon n’a évidemment pas attendu cette nouvelle étape pour prendre ses responsabilités, et ce, notamment dans les secteurs de l’immobilier et de la construction qui sont à la croisée des préoccupations sociale, économique et environnementale. Ce qui justifie que le gouvernement soit particulièrement actif en la matière.

    Au-delà de la mise sur pied, un dispositif très vaste de primes relatives au logement, le gouvernement, en partenariat avec la CCW mais aussi de nombreux autres interlocuteurs, a lancé l’Alliance Emploi-Environnement, ambitieux plan de relance axé sur la construction et la rénovation durable en Wallonie.

    Il a mobilisé pas moins de 879 millions d’euros ce qui représente un tiers du Plan Marshall 2.vert pour cette Alliance qui se concentre sur l’isolation et la performance énergétique des bâtiments et qui a pour objectif de faire de l’amélioration de l’environnement une source d’opportunités économiques et de création d’emplois, mais aussi de stimuler la demande de construction et de rénovation durable de bâtiments. C’est un impératif pour la Wallonie dont 44,8 % des logements sont anciens.

    L’Alliance Emploi-Environnement prévoie la création de guichets uniques et la mise en place de 250 « écopasseurs », la mise sur pied, pour le logement privé, de l’écopack qui connait un succès important et, pour le logement public, le programme d’investissements Pivert.

    Complémentairement, l’Alliance Emploi-Environnement prévoit un important volet de formations, pour près de 56 millions d’euros, au bénéfice des demandeurs d’emploi, des apprenants en alternance, des élèves et de leurs enseignants, ainsi que des travailleurs. Les actions concernent donc aussi bien la formation que la promotion des métiers et l’orientation.

    L'honorable membre le voit, même dans un contexte de crise, le Gouvernement wallon a mis en œuvre des moyens considérables pour stimuler la demande. L’Alliance Emploi-Environnement est dans sa phase de mise en œuvre. Le lancement de nouvelles alliances est prévu dans le Plan Marshall 2.vert, mais aussi dans le projet de décret « Stratégie Régionale de Développement Durable ». Si l’opportunité de créer de nouvelles alliances existe, cela ne doit pas se faire sans un regard critique sur la première et dont l’évaluation sera déterminante pour définir les lignes directrices à venir.

    Par ailleurs, singulièrement en période de crise, il est essentiel que la région et les communes soient mobilisées pour optimiser le traitement des demandes de permis et accélère les délais de paiement.
    L’efficacité du processus administratif conditionne directement les décisions sur les investissements immobiliers et contribue donc à la dynamique de l’emploi et de la croissance économique.

    À cet égard, le gouvernement a pris acte, en juillet dernier, de l’évaluation des dispositions normatives relatives à l’aménagement du territoire et à l’urbanisme réalisée par un consortium d’experts indépendants. Le Ministre de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de la Mobilité a été chargé concomitamment de proposer des orientations sur les modifications éventuelles à apporter au CWATUPE quant à la mise en œuvre des recommandations de l'évaluation. L’intention du gouvernement est bien entendu de simplifier les procédures et d’optimiser le cadre réglementaire pour soutenir le développement de projets, en équilibre avec les autres enjeux territoriaux de Wallonie.

    Concernant les délais de paiement, la Wallonie a, au travers du Plan Action Industrie, mis en œuvre une série de mesures qui porte déjà ses fruits : durant les premiers mois de 2012, ces paiements ont été exécutés en moyenne en 61 jours à dater de l’émission de la facture. La diminution est vraiment importante tant par rapport à 2010 (113 jours en moyenne) que par rapport à 2011 (79 jours). Le Gouvernement wallon va maintenant initier une démarche pilote similaire avec les communes wallonnes. Cela répond à une forte demande des acteurs économiques wallons.

    Pour revenir sur à la Dynamique Horizon 2022, des premières mesures potentielles, identifiées par les experts universitaires, concernent le secteur de la construction :
    - une meilleure adéquation entre l’offre et la demande de travail ;
    - l'émergence de nouveaux métiers (e.g. nouvelles technologies, vieillissement, métiers verts, métiers émergents) ;
    - l’adoption d’une vision stratégique globale régionale concernant la politique d'aménagement du territoire ;
    - la simplification et l’accélération des procédures relatives à la mise à disposition des terrains (ZAE, PAE) ;
    - la mise en place d’inventaires cohérents couvrant l’ensemble du territoire non seulement des terrains disponibles (tant publics que privés), mais également un inventaire complet de l’offre de seconde main ;
    - la structuration du cadre et du processus de concertation entre les investisseurs, les riverains, les administrations et les instances d’avis concernées, dès l’ébauche d’un projet ;
    - l’adaptation de l'habitat aux besoins des personnes âgées (moduler la fiscalité immobilière pour favoriser les habitats groupés, créer une base de données) ;
    - l’augmentation des capacités d’accueil de qualité ;
    - l'orientation fiscale et financière pour la Wallonie ;
    - l’accélération et de la simplification des processus décisionnels et administratifs
    - …

    La CCW est actuellement partie prenante à la phase de consultation. Son avis sera évidemment pris en compte.

    Dans ce même esprit de consultation, le gouvernement a acté, en juin dernier, les propositions d’objectifs du SDER et a chargé le ministre de solliciter l’avis des acteurs-clés du développement territorial, parmi lesquels figure la CCW. Par là, la volonté du gouvernement est de privilégier l’adoption d’objectifs partagés pour le territoire wallon et de préciser la trajectoire à suivre pour son développement.

    En ce qui concerne l’opportunité de négocier des accords de branche à l’instar de ce qui se fait dans le domaine de l’énergie, il faut en étudier l’opportunité et les implications.