/

L'établissement d'un inventaire complet de toutes les obligations

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2012
  • N° : 24 (2012-2013) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 26/10/2012
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    Que Monsieur le Ministre me permette de saisir l'occasion de la préfiguration du compte 2011 pour partager avec lui une réflexion qui concerne les futures marges budgétaires d'une politique régionale. En effet, cette question me semble d'autant plus pertinente que le nombre et l'importance des charges du passé ainsi que les perspectives douteuses liées à la crise actuelle pèsent lourdement et risquent de limiter les marges budgétaires à venir.

    Distinguons entre deux types de charges : celles qui peuvent être chiffrées de façon approximative au moins et celles qui n'ont pas encore fait l'objet d'une évaluation chiffrée.

    Parmi les charges qui ont été chiffrées, nous en avons au minimum quatre : la dette, l'encours, les garanties et le financement alternatif. Le tout fait un montant d'environ 17.5 milliards d'euros pour un budget annuel de recettes de l'ordre de 6.7 milliards d'euros, soit 261 % des recettes. À cela doivent être ajoutées d'autres charges chiffrées dont nous n'avons pas encore la compétence, mais qui vont être transférées dans le cadre des réformes institutionnelles. S'ajoute également le poids de l'endettement des autorités locales qui — lorsque cela ne va plus —frapperont aux portes de la Région wallonne. Tôt ou tard, nous serons contraints d'œuvrer de manière à reconstituer des marges en faveur des communes placées « sous tutelle budgétaire » - pour reprendre le terme utilisé.

    1. Le niveau de la dette : 5.7 milliards — je me réfère aux analyses faites par la Cour des comptes. Nous en avons discuté lors des travaux en commission.

    2. L'encours : 4 milliards comprenant bien sûr d'un côté les travaux qui s'étalent sur plusieurs années et dont les factures vont encore nous arriver. Mais comprenant aussi les factures dont le paiement est en retard : nous avons discuté suffisamment de fois de la problématique des bénéficiaires de subventions ou de payements qui attendent parfois très longtemps.

    3. Le financement alternatif de l'ordre de 2.7 milliards n'est, certes, pas une dette au sens classique du terme, mais il constitue quand même une charge ayant un impact sur nos capacités d'actions futures dans la mesure où nous avons pris l'engagement d'honorer le payement.

    4. Et n'oublions pas les garanties en faveur des 0IP, notamment en faveur des OIP du secteur logement (SWL, SWCS et FLW). On dira qu'il s'agit d'une couverture du risque. Même si je peux admettre cela, cette couverture du risque ne va pas rester sans conséquence sur notre capacité d'action et sur notre rating (voir le taux d'intérêt que nous devrons payer pour nous approvisionner en capital). Il est vrai aussi qu'une partie des dettes pour lesquelles la Région wallonne s'est portée garant, est couverte par des inscriptions hypothécaires et le taux de dossiers qui foirent est heureusement minime comparé au volume total. Mais peut-on dire qu'il s'agit simplement d'une couverture du risque s'il s'agit d'OIP avec lesquelles nous sommes liés par une relation in-house ? Si la SWCS emprunte, elle le fait en lieu et place du Gouvernement wallon, qui a externalisé la politique du crédit social. Mais n'est-ce pas comme s'il s'agissait d'une dette directement contractée par la Région wallonne ? D'autres dettes garanties l'ont été pour couvrir l'emprunt destiné à subventionner des logements qui ne sont pas la propriété de la SWL, par exemple. Dans ce cas, la question se pose un peu différemment.

    5. Les compétences transférées : on en connaîtra déjà deux qui vont peser sur le budget de la Région wallonne dans la mesure où, d'une part, nous devrons nous préparer à financer, au moins en partie, le poids des pensions de nos fonctionnaires et, d'autre part, le transfert de la compétence relative à l'emploi ne se fera pas de façon parallèle avec le transfert de 100 % des moyens. En commission, Monsieur le Ministre évoquait le chiffre d'un manque à gagner de l'ordre d'un demi milliard d'euros.

    6. Les dettes des autorités locales pèsent, si mon information ne me trompe pas, environ 16 milliards d'euros. Et nous n'avons qu'une maîtrise partielle quant à leur évolution. En effet, l'autorité fédérale a imposé aux communes une série de politiques sans que ces impositions soient accompagnées des moyens budgétaires suffisants. Les communes, confrontées à leurs populations respectives et chargées de répondre aux besoins et objectifs, se tourneront inévitablement vers leur autorité de tutelle pour solliciter l'aide. La refuserons-nous ?

    Parmi les charges qui n'ont pas encore pu être chiffrées, nous en trouvons au minimum quatre qui pèseront également sur nos capacités futures d'action : le réseau des routes, le logement, le vieillissement de la population, les nouvelles compétences transférées aux communautés notamment en matière de soins de santé. Sans parler des impositions nouvelles qui nous tomberont sur la tête au départ l'UE. Impossible de dire actuellement quel va être le montant précis à dégager pour répondre aux défis, aux attentes et aux besoins en la matière.

    1° Le réseau routier : l'état du réseau est une de ces charges qui risque de nous occuper encore pendant quelque temps, question de disposer d'un réseau sécurisé répondant aux exigences en matière de qualité et de qualité de vie pour les riverains, sans parler des petites extensions pour assurer le raccordement par exemple des zonings au dit réseau.

    2° Le logement : le projet de SDER prévoit, pour les trois décennies à venir, la création de 350.000 logements, dont une partie de logements publics ou conventionnés. À côté de cela, il va falloir encourager l'investissement dans l'entretien (salubrité, sécurité) et de la performance PEB du 1.4 million de logements existants, sachant que nous avons un parc de logements particulièrement vieux et nécessiteux en entretien et en amélioration (ne fut-ce que pour répondre aux exigences européennes en matière d'énergie). Suivant une estimation prudente et à la grosse louche, l'effort public se chiffrerait à au minimum 12 milliards d'euros - ce qui ne veut rien dire d'autre que nous devrons accélérer la cadence si l'on compare à la législature actuelle qui mobilise, certes, 900 millions, sauf si notre objectif s'étale sur douze législatures, ce qui est évidemment un non-sens.

    3° Le vieillissement de la population nous mettra devant des défis en matière de création de services d'aide à domicile ou en matière de création de maisons de repos et de maisons MRS. Les programmations à long terme, établies sur base de pronostics en matière d'évolution démographique, me font croire que l'engagement pèsera quelques milliards.

    4° Les compétences fédérales transférées vers les communautés — notamment en matière de soins de santé — risquent de poser des casse-têtes à celles-ci et provoqueront, à coup sûr, des retournements tôt ou tard vers les Régions pour qu'elles les aident dans le financement des nouvelles tâches, dont le transfert ne va pas être accompagné à 100 % des moyens.

    Mon objectif n'est pas de noircir le tableau, mais que notre politique soit basée non pas sur des annonces, mais plutôt sur des fondements solides que sont les chiffres. Ce seront eux qui détermineront l'ampleur des marges dont nous disposerons à l'avenir. Marges qui découlent de la capacité de la Région wallonne de s'approvisionner sur le marché du capital afin de financer les politiques avec lesquelles nous serons confrontés à l'avenir.

    Ne devons-nous pas dresser un inventaire complet de toutes les obligations que nous devons honorer et qui pèseront sur les capacités d'action des futurs gouvernements wallons ?
  • Réponse du 26/04/2013
    • de ANTOINE André

    Sans aucun doute, de grands défis nous attendent à l’avenir que ce soit via le vieillissement de la population ou bien les conséquences des réformes institutionnelles récentes, voire à venir. En tant que Ministre du Budget et des Finances, mon objectif est de préserver nos finances publiques saines afin de maintenir, comme l'honorable membre le suggère, la capacité d’action de la Wallonie intacte et être en mesure de répondre à tous les défis qu'il a cités.

    Depuis 2009, comme l'honorable membre a pu le constater, nous sommes dans un contexte de rigueur budgétaire visant le retour à l’équilibre dès 2015. Nous respectons scrupuleusement la trajectoire qui nous a été fixée. Lors de la confection du budget 2013, de nouvelles mesures d’économies ont été prises afin de concourir à cet objectif, et ce, malgré des paramètres macroéconomiques très défavorables.

    Ceci nous permet de réduire au fil des exercices budgétaires et des efforts consentis, le déficit de la région et donc, in fine, l’augmentation de la dette régionale qui est mécaniquement ralentie d’année en année.

    Tous les efforts consentis durant cette législature pour respecter cette tendance permettront de ne pas entraver les capacités d’action futures de la Wallonie.

    L'honorable membre m'interroge sur les garanties octroyées, en particulier, aux emprunts levés par les OIP du secteur du logement.

    Je rappelle que ces garanties permettent, par exemple pour la SWCS, de réduire à la fois le taux des crédits hypothécaires sociaux octroyés et le différentiel de taux (différence entre le taux de financement et, principalement, le taux des crédits) couvert budgétairement par la Wallonie via une dotation en capital.

    Il est néanmoins important de surveiller au plus près l’augmentation de l’encours de dette garantie même si son existence est pleinement justifiée. Elle présente en grande partie un caractère social puisqu’elle permet à un grand nombre de nos citoyens précarisés d’avoir un toit et un logement décent à des conditions très abordables.

    Néanmoins, il s’agit bien d’une dette, mais une dette portant sur un autre opérateur que la Wallonie qui en est simplement le garant. De plus, en terme de risque, j’insiste sur le fait qu’elle est en grande partie couverte par des actifs et qu’elle n’a jamais été formellement appelée.

    En tant que Ministre des Finances, mon ambition fut d’améliorer la gestion de la dette en mettant en place les outils nécessaires à la Wallonie pour pouvoir agir et lever des capitaux sur les marchés financiers.

    Dès mon arrivée, mon souci 1er fut d’améliorer et de moderniser la gestion de la dette régionale. Ceci est d’autant plus nécessaire face à la crise et aux mutations des marchés financiers que nous avons vécu en direct ces dernières années.

    Parmi les améliorations mises en place, je citerai sans être exhaustif, une attention particulière à la gestion des risques, une transparence accrue avec la publication du 1er rapport annuel de la dette wallonne, un cadre de gestion défini par le Conseil commun du Trésor, un contrat caissier dont la débit en compte courant sera augmenté à 3,25 milliards d’euros dès le 1er janvier 2013, ...

    En particulier, je pointerai également la conclusion d’un programme de financement EMTN (Euro Medium Term Notes) mis en place en 2012. Alors que le contexte économique et financier était difficile pour tous les émetteurs souverains avec des difficultés d’accès au marché des capitaux à de bonnes conditions, nous avons réussi via ce programme à lever une grande partie des besoins de financement 2012 en quelques semaines à de très bonnes conditions. Je suis persuadé que cet outil se révélera précieux pour les futurs gouvernements wallons.

    L’étape ultime de cette modernisation reste la mise en place d’une agence de la dette régionale pour laquelle nous espérons avoir un large consensus.

    Cette modernisation et ce retour à l’équilibre placeront la Wallonie en position de pouvoir répondre aux défis qui se présenteront à elle durant les prochaines années.