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Le moratoire en 2013 relatif aux nouveaux engagements par rapport aux mesures agro-environnementales

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 152 (2012-2013) 1

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  • Question écrite du 08/01/2013
    • de DETHIER-NEUMANN Monika
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine

    Lors de notre dernière discussion sur le budget, Monsieur le Ministre a annoncé un « moratoire » sur les nouveaux engagements par rapport aux mesures agro-environnementales, et ce, pour l’année 2013. J’aimerais dès lors en savoir un peu plus de sa part.

    Monsieur le Ministre justifie cette dernière par l’absence de budget, résultant du fait que l’enveloppe européenne pour les MAE 2007-2013 serait épuisée. Cette justification ne me convainc cependant pas. À tout le moins, cette réponse me semble incomplète.

    En effet, cette explication ne convainc pas dans la mesure où, d’un point de vue budgétaire, les nouveaux contrats 2013 ne seront de toute façon payés pour la première fois qu'à la moitié de l'année 2014, soit avec le budget de la période de programmation européenne 2014-2020. Sachant par ailleurs que, pour ce qui est des engagements en cours, le paiement de ceux-ci est inéluctable, dans la mesure où la Région wallonne s’est engagée, à l’égard des destinataires de ces mesures, à les payer pour la mise en œuvre des mesures en question. Quelle que soit la décision prise aujourd’hui, le budget MAE pour 2013 sera donc inchangé et Monsieur le Ministre ne peut dès lors pas affirmer que sa décision est motivée par la rigueur budgétaire nécessaire en 2013.

    Je me permettrai également de rajouter que, pour le reste, il semble que la situation constatée aujourd’hui, à savoir l’épuisement de l’enveloppe européenne que la Wallonie a décidé d’affecter aux MAE, était largement prévisible. Il nous revient en effet que, dès 2007, et donc dès l’entame du PDR actuel, il était connu – et inscrit dans le PDR !- que ce budget serait insuffisant et qu'il faudrait financer sur fonds purement wallons en fin de période de programmation sauf si on libérait des budgets sur d’autres mesures.

    Toujours est-il que, si l’on se place du côté des agriculteurs, cela signifie que 1/5 des agriculteurs sous contrat MAE, soit un peu plus de 10 % de tous les agriculteurs wallons se voient privés pendant au minimum un an d'aides qui s'élèvent à plus de 3000 euros en moyenne par agriculteur, mais qui peuvent monter beaucoup plus haut chez les agriculteurs les plus impliqués dans les MAE (jusqu’à plus de 30.000 euros pour certains) ... Or nous sommes face à des agriculteurs qui ont fait le choix de s’investir pour la sauvegarde de notre environnement, ce qui s’est parfois concrétisé par une extensification progressive de l’exploitation. Un choix que l’on ne peut raisonnablement pas décourager et qui engage forcément ces agriculteurs sur du long terme ! Il n’est donc pas juste que ce soient ceux-là qui soient pénalisés en premier ! Le piège est d’autant plus vicieux que les semis d’automne sont terminés et que la destruction d’une MAE non reconduite ne peut se faire facilement, tant du point de vue agronomique que du point de vue économique. Pire, il semblerait que les parcelles actuelles de MAE de moins de 10 mètres de large ne seront plus éligibles aux DPU si elles ne sont pas reconduites en MAE. En effet, pour être éligible aux DPU et indépendamment des MAE, toute parcelle doit faire 10 mètres de large. L’agriculteur se voit donc doublement pénalisé.

    Un autre cas de figure me revient et concerne les phénomènes d’érosion et de coulées boueuses. Au sein des territoires les plus touchés par les derniers épisodes particulièrement préoccupants, certaines communes ont initié des réflexions globales visant à apporter des réponses structurelles pour éviter ces catastrophes à l’avenir. Il est clair que les MAE constituent l’outil central des plans d’actions qui émergent de ces concertations entre communes, agriculteurs, citoyens, administration agricole et la cellule Giser spécialisée dans ces phénomènes d’érosion. La ville de Thuin a notamment réalisé une démarche très intéressante dans ce cadre et elle débouche sur des propositions d’aménagement sur 500 hectares. La suspension des MAE met complètement à mal tout ce travail pourtant fondamental.

    Ma première question portera dès lors sur la concertation menée avec le secteur agricole. Comment Monsieur le Ministre l'a-t-il consulté et informé de sa décision ?

    Je me pose par ailleurs des questions quant au signal donné. Les MAE constituent en effet un outil indispensable pour la mise en place des différentes politiques environnementales, qu’il s’agisse de Natura 2000, du Plan PLUIES, de la directive-cadre eau, du PGDA, du Plan air-climat, ou encore de la lutte contre les coulées boueuses, et sont probablement l’outil d’aides agricoles pour lequel l’effort d’évaluation est le plus élevé. Notons également, en cette période particulièrement sensible pour les producteurs laitiers, l’apport que constituent ces aides à leur égard, pour la gestion de leurs prairies naturelles ou de haute valeur biologique.

    Plus particulièrement, à l’heure où les enquêtes publiques viennent de commencer, je m’interroge sur la façon dont Monsieur le Ministre va pouvoir faire décoller des politiques comme Natura 2000 si, parallèlement, il coupe les fonds permettant de financer les mesures de gestion de ces mêmes sites Natura 2000. Même question concernant la lutte contre l’érosion des sols, hautement problématique à l’heure actuelle. À cet égard, je m’interroge, et je ne suis pas la seule, sur l’avenir de la cellule de conseils Giser dont l’expertise est pourtant largement reconnue.

    Par ailleurs, si les surfaces couvertes par les MAE aujourd’hui sont encourageantes, Monsieur le Ministre est-il conscient que la suspension va directement faire régresser ces surfaces ? Par ailleurs, pense-t-il que les objectifs environnementaux sont atteints et justifient la suspension de ce régime d’aide ? Comment compte-t-il rattraper cette suspension et ce mauvais signal donné, en termes environnemental, pour les prochaines années ?

    J’aimerais également interroger Monsieur le Ministre quant à l’opportunité de cette décision et aux choix opérés.

    Quel est le degré de consommation de l’enveloppe européenne destinée aux aides aux investissements agricoles ?

    Si celle-ci est dépassée, ces aides seront-elles également suspendues en 2013 ?

    Si elles ne le sont pas, comment justifie-t-il que ces aides soient maintenues, alors que les MAE qui bénéficient à la moitié des agriculteurs wallons ne le sont pas ?

    Monsieur le Ministre a-t-il par ailleurs envisagé de faire les économies nécessaires sur des régimes d’aide nettement moins performants au niveau environnemental, comme l’indemnité compensatoire, ou la prime à l’herbe ?

    Enfin, il me revient qu’au niveau des aides à l’agriculture, nous sommes au-dessus de la moyenne européenne pour ce qui concerne les aides du premier pilier et l’axe 1 du second pilier (aide aux investissements), mais en dessous de cette moyenne européenne concernant les aides ciblées sur des objectifs notamment environnementaux.

    Monsieur le Ministre ne craint-il pas une réaction de l’Europe à cet égard ?

    Dans la perspective de la nouvelle PAC, est-il réaliste de vouloir creuser encore davantage cet écart ?
  • Réponse du 28/01/2013
    • de DI ANTONIO Carlo

    J’ai longuement débattu de la question des mesures agro-environnementales, lors de la séance publique de la Commission des travaux publics, de l'agriculture, de la ruralité et du patrimoine du lundi 14 janvier 2013. J'invite l'honorable membre à prendre connaissance des éléments de réponses concernant ce dossier dont elle semble connaitre les moindres détails.

    Concernant sa première question, nous informerons officiellement et directement le milieu agricole lorsque l’ensemble des éléments concernant les différentes pistes sera à ma disposition. J’ai chargé mon administration d’actualiser certaines données et de réfléchir à la procédure administrative à mettre en place dans le cadre du moratoire.

    Les MAE ont été un succès en terme de participation et en terme de résultats. Nous ne devons certainement pas compromettre les résultats engrangés depuis de nombreuses années, mais nous ne pouvons pas nous permettre d’hypothéquer les futures mesures. Je ne pense pas qu’une suspension d’un an des mesures non ciblées puisse avoir des conséquences sur plusieurs années. L’important est réfléchir sur un futur programme de mesures plus performantes et plus efficaces.

    Concernant les aides ISA, l’enveloppe européenne doit être aussi renforcée, car ce programme est, lui aussi, une réussite. Les transferts concernés sont internes à l’axe « Amélioration de la compétitivité des secteurs agricole et forestier ». En cette période de crise, l'honorable membre conviendra que la compétitivité agricole est aussi sensible pour l’agriculture que l’amélioration de l’environnement et l’aménagement de l’espace rural. De plus, dans la logique de respecter les budgets initialement prévus pour chacun des axes, je privilégie les transferts internes.

    Enfin, comme l'honorable membre le sait, les montants alloués entre les deux piliers sont historiques et varient pour chacun des états membres. Dans le cadre des négociations pour la future Politique agricole commune, il est évident que nous demanderons le maximum pour chacun des piliers tout en devinant qu’il n’y aura pas d’augmentation sensible des sommes disponibles.

    Pour la PAC comme pour les mesures agro-environnementales, le véritable enjeu pour moi maintenant est de préparer l’échéance de 2014.