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Le scandale des certificats verts

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 391 (2012-2013) 1

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  • Question écrite du 29/03/2013
    • de EERDEKENS Claude
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    « Mais où se cache donc le scandale des certificats verts ? », ainsi titrait « L'Echo» du 22 mars 2013 en page 13 relayant les propos de M. Pierre Louette, physicien et maître de conférences aux facultés Notre-Dame de la Paix à Namur.

    Dans cet article, l'intéressé expose que le système du tiers investisseur a détourné l'objectif des certificats verts et que des particuliers se sont lancés dans un projet citoyen et risqué tandis que les entreprises en ont fait un business avec des gains sans risques.

    M. Louette va donc jusqu'à accuser des sociétés d'avoir détourné à grande échelle les subsides destinés aux particuliers. Il ajoute qu'il est clair que ces sociétés font des bénéfices sur la revente des certificats verts auxquels elles n'auraient pas eu droit si elles avaient joué le jeu d'être des producteurs du photovoltaïque classique.

    En effet, comme l'explique cet enseignant, le système des certificats verts était réservé aux petits producteurs et pas aux géants, qui se camouflent derrière des particuliers.

    Il n'hésite pas à parler de scandale en accusant ces tiers d'avoir fait du business sur le dos des particuliers, d'avoir détourné l'esprit des certificats verts, d'avoir inondé le marché, d'avoir provoqué l'effondrement du marché des certificats verts et, pire encore, d'avoir provoqué le report de la note financière sur l'ensemble des consommateurs tout en jetant le discrédit sur le « photovoltaïque ».

    Ces accusations sont d'une gravité exceptionnelle.

    Monsieur le Ministre est-il au courant de ces détournements et à partir de quand ont-ils commencé à s'opérer ? Quand a-t-il été avisé et par qui de l'existence du système que dénonce M. Louette ?

    Monsieur le Ministre a-t-il l'intention de réclamer à ceux qui ont détourné des montants colossaux, en amassant une fortune personnelle sur le dos de tous les Wallons, les montants ainsi détournés?

    Monsieur le Ministre a-t-il pu chiffrer le montant des détournements commis par année de 2008 à 2012 et quelles sont les dix sociétés qui ont le plus participé à ces détournements? Compte-t-il soumettre les faits à la justice qu'elle soit civile ou pénale ?




  • Réponse du 22/04/2013
    • de NOLLET Jean-Marc

    Je m’étonne de la question de l'honorable membre sur ma position concernant les tiers investisseurs. À plusieurs reprises, j’ai informé le Parlement wallon sur mes réserves à l’égard de sociétés qui, en proposant des formules ‘win-win’, se faisaient passer pour des tiers investisseurs alors qu’elles n’étaient en réalité que tiers payeurs et que le risque pesait entièrement sur le client.

    Je rappelle donc que cette réserve était basée sur les analyses de l’administration et du facilitateur selon lesquelles de telles propositions présentent parfois plusieurs dérives, aussi bien sur le plan financier que sur le plan technique. Des questions importantes à se poser ont notamment trait à l’endossement du prêt par le particulier qui n’a, de plus, aucune vision du bon remboursement qui en est fait par la société, ainsi que la charge du prêt en cas de faillite de la société.

    Je rappelle par ailleurs que des organisations de consommateurs, telles que Test-Achats, ont également mis en garde à plusieurs reprises leurs abonnés, estimant que ce type de formule est financièrement et contractuellement inintéressante. De la même manière, Maître Deprez, Avocat chez CMS de Backer, a publié dans le Trends Tendance du 16 février 2012 un article rappelant les quelques précautions à prendre dans les formules de tiers investisseur et notamment une mise en garde contre les formules de tiers investisseur déguisé qui font supporter le risque financier à leur client.

    La protection du consommateur et le respect des bonnes pratiques commerciales sont du ressort du SPF économie, compétence fédérale ! J’ai donc contacté à deux reprises le Ministre en charge de la protection des consommateurs pour l’alerter des dangers de telles offres. L’administration de l’énergie et la CWAPE ont par ailleurs informé à plusieurs reprises le SPF économie de cette situation. L’administration de l’énergie, qui entretient par ailleurs des contacts réguliers avec le public et les professionnels du secteur, a parfois connaissance de certaines pratiques considérées comme douteuses. Celles-ci sont communiquées au SPF économie qui peut prendre la décision d’instruire un dossier.

    Il s’avère que ces réserves et mises en garde étaient malheureusement fondées. Ainsi, deux sociétés usant de ce type de formule ont récemment été déclarées en faillite, laissant leurs clients démunis face à des prêts bancaires conclus en leur nom et des traites impayées alors que leurs certificats verts ne leur ont pas été rétribués par le « tiers invest ». Certains de ces clients sont parfois doublement floués puisque, débiteurs d’une dette contractée sur plusieurs années, ils n’ont même pas reçu leur installation.

    C’est pourquoi j’ai encouragé la CWAPE à assurer un suivi particulier de ces dossiers délicats. Mon administration analyse par ailleurs la question de l’octroi de ces crédits bancaires, conclus dans des conditions que l’on pourrait à première vue qualifier de peu orthodoxe si l’on se fie aux informations qui m’ont été relayées.

    La réforme ‘Qualiwatt’, adoptée par le Gouvernement wallon à mon initiative le 28 mars dernier, intègre des mesures drastiques contre ce type de dérive, dont le fait de devoir utiliser un contrat type.

    Dès 2012, j’ai soutenu l’initiative de Test-Achats visant à proposer une offre type et un contrat type pour les installations photovoltaïques de petite puissance. L’objectif est d’éviter les offres conjointes d’installation et de financement, afin de bien séparer ces deux métiers et de protéger au mieux les citoyens désirant investir dans une installation photovoltaïque. Ce document est disponible sur le site de l’administration. J’entends maintenant le faire évoluer en un contrat type de référence du SPW, qui sera exigé pour bénéficier du nouveau mécanisme de soutien.

    Je m’en voudrais de conclure sans évoquer le rôle fondamental que les tiers investisseurs sérieux jouent sur le terrain. Dans certains cas, le porteur de projet n’a pas les capacités techniques, financières ou temporelles pour supporter un investissement dans le domaine de l’utilisation rationnelle d’énergie ou de la production d’énergie renouvelable. Le porteur de projet peut dès lors faire appel à un tiers investisseur qui étudiera la faisabilité du projet, assurera le financement et la durabilité du projet dans le temps. En contrepartie, les bénéfices et économies générées par le projet rétribueront partiellement le tiers investisseur.

    Ce système permet ainsi à des citoyens ou collectivités qui n’auraient pas eu les moyens financiers, techniques ou temporels d’investir autrement, d’accéder à une technologie propre et de réduire le poids budgétaire croissant de l’énergie. Le système de tiers investisseur, pour autant qu’il ne reporte pas le risque financier sur le client, est un outil qui permet l’accès du plus grand nombre aux technologies vertes, facilitant l’atteinte des objectifs que la Wallonie s’est fixée.