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L'accueil et l'hébergement des personnes porteuses d'un handicap

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 120 (2012-2013) 1

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  • Question écrite du 02/05/2013
    • de GONZALEZ MOYANO Virginie
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des Chances

    Je souhaiterais revenir sur la problématique récurrente du manque de solutions d'accueil et d'hébergement pour les enfants porteurs d'un handicap devenus adultes et lourdement dépendants. Aussi, la Fédération internationale des Ligues des droits de l'Homme a engagé une action en justice contre l'État belge. Le 13 décembre 2011, elle déposait une réclamation contre l'État belge auprès du Comité européen des Droits sociaux à Strasbourg pour violation des articles 13 à 16, ainsi que de l'article 30 de la Charte sociale européenne révisée.

    Les associations belges s'indignent de la non-assistance aux personnes les plus fragilisées de notre société et réclament des autorités belges qu'elles se conforment aux engagements pris dans le cadre des accords internationaux.

    En 2007 déjà, des associations représentatives des trois régions du pays s'associaient dans le Manifeste du Citoyen pour dénoncer le scandale du manque de places. Elles réclamaient avec urgence la mise en place de solutions adaptées : accueil de jour, hébergement, répit et services de qualité permettant une vie indépendante.

    Depuis lors, à de nombreuses reprises, toutes les associations ont rappelé aux pouvoirs publics l'urgence de leurs besoins et les drames vécus au quotidien par les familles.

    Qu'en est-il, au niveau de Madame la Ministre, de l'accueil et de l'hébergement des personnes handicapées ? Quelles mesures et/ou démarches envisage-t-elle de prendre pour tenter d'y remédier ? Partiellement ?
  • Réponse du 20/06/2013
    • de TILLIEUX Eliane

    La Fédération internationale des droits de l’homme a effectivement déposé une réclamation à l’encontre de la Belgique auprès du Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe.

    Cette réclamation porte sur le manque de places et de solutions adaptées de prise en charge pour les personnes ayant un handicap de grande dépendance.

    Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de l’exprimer, il convient encore et toujours de dégager des moyens pour augmenter le nombre de places dans les services d’accueil et d’hébergement pour personnes handicapées et concomitamment de diversifier l’offre de service afin de permettre aux personnes qui en ont la capacité de bénéficier d’une solution de prises en charge ou d’accompagnement plus souple et plus adaptée à leurs besoins ; je pense notamment aux services « Répit », aux logements supervisés et aux activités citoyennes.

    Depuis le début de la législature, et malgré un contexte budgétaire difficile, j’ai non seulement pu préserver les moyens budgétaires relatifs à la politique d’intégration des personnes handicapées, mais également pu dégager des moyens supplémentaires afin d’augmenter l’offre existante et mettre en place ces solutions diversifiées.

    Le nouveau contrat de gestion a été conclu en juin 2012 entre le Gouvernement wallon et l’AWIPH pour une durée de 5 ans (2012-2017) articule la politique d’intégration des personnes handicapées autour de 4 axes stratégiques :
    1) une société inclusive ;
    2) un continuum de prestations et un soutien personnalisé aux personnes en situation de handicap ;
    3) une qualité accrue des services ;
    4) une organisation plus efficiente.

    Le contrat de gestion de l’AWIPH prend bien sûr en compte cette nécessité de poursuivre le déploiement de l’offre de service et sa diversification.

    Pendant de très nombreuses années, l’approche en matière de services à destination des personnes en situation de handicap a été dichotomique et exclusive : soit la personne était au domicile et disposait de très peu de soutien, soit elle bénéficiait d’un service spécifique et disposait alors d’une solution standard tout au long de son existence.

    Cette vision dichotomique ne correspond plus au souhait des personnes et de leur famille qui recherchent davantage à bénéficier du soutien nécessaire prioritairement dans leur milieu de vie. Les services, eux aussi, souhaitent pouvoir répondre de façon plus adéquate aux demandes des personnes.

    Ce soutien dans le milieu de vie ordinaire est assuré par les services ambulatoires (d’aide précoce, d’aide à l’intégration et d’accompagnement) qui favorisent le maintien au domicile. 

    Il s’agit de développer des approches intégrées des besoins et de proposer des solutions diversifiées et coordonnées conjuguant les forces des uns et des autres au service de la personne. Il faut valoriser le rôle des différents acteurs, reconnaître les expertises et les mettre à disposition au sein de la communauté.

    Il s’agit également de proposer des solutions calibrées en fonction des besoins, en privilégiant le développement des compétences, le maintien des acquis et surtout la qualité de vie des personnes.

    Il en va de même pour les personnes présentant un handicap de grande dépendance dont les besoins en termes de services et de prestations peuvent varier notamment en fonction leur réel degré d’autonomie, de leur environnement familial, de leur lieu de vie… Il n’existe pas une solution unique mais un éventail de solutions institutionnelles ou dans le milieu de vie ordinaire.

    Cela étant, il est en effet souvent fait référence à des listes d’attente et à un temps relativement long pour les personnes pour trouver réponse à leur demande.

    À ma demande, l’AWIPH s’emploie depuis le début de la législature, et j’ai rappelé à l’AWIPH à plusieurs reprises combien ce travail est urgent et d’importance, à mettre en place une liste d’attente unique en collaboration avec les services agréés.

    Un groupe de travail relatif à la constitution de cette « liste unique » piloté par l'AWIPH a clôturé la première étape de son travail, en l'occurrence l'élaboration d'un dossier d'admission commun pour les structures d'accueil et d'hébergement. Celui-ci a été soumis en septembre 2012 à l'approbation du Comité de gestion de l'AWIPH.

    Ce dossier commun doit faciliter les démarches des personnes ou de leur famille lors de la recherche d'une structure d'accueil ou d'hébergement.

    Les informations contenues dans ce dossier telles que le parcours, les attentes, les besoins spécifiques, les souhaits, le délai d'admission souhaité pourront, avec l'accord de la personne ou de sa famille, être partagées avec les autres services d'accueil ou d'hébergement et avec les services de l'AWIPH via une base de données commune.

    Les services qui seraient sollicités par la personne pourraient ainsi rapidement avoir un aperçu de sa situation et surtout cela évitera aux personnes de multiplier les demandes.

    Cette liste unique doit aussi permettre d'avoir une vision plus précise du nombre de personnes en attente d'une solution de prise en charge et surtout une vision des délais dans lesquels une solution est attendue. Des personnes s'inscrivent en effet bien longtemps à l'avance, espérant pouvoir trouver une solution en temps opportun.

    Par ailleurs, il s'agira de prévoir que les services ne pourront prendre en charge que des personnes figurant sur cette liste. Cette façon de procéder doit permettre de faire coïncider de manière beaucoup plus efficiente l'offre et la demande.

    Une telle liste doit permettre d’améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande et de favoriser les échanges d’informations entre les Bureaux régionaux de l’AWIPH et les services agréés.

    La liste d’attente actualisée et informatisée permettra de connaître toutes les personnes ayant accompli la démarche administrative auprès des Bureaux régionaux de l’Agence, en ce compris les personnes de grande dépendance.

    En termes de déploiement de l’offre et de diversification de l’offre, j’ai veillé à dégager des moyens depuis 2009 afin de répondre à cet impératif.

    Depuis 2009, environ 200 places ont été créées dans les services résidentiels et d’accueil de jour pour adultes. Aucun moratoire ne limite la création de places dans les institutions wallonnes : des places ont été ouvertes entre autres aux Elfes à Libramont, au Perce-Neige à Jambes et aux Lucioles à Lasnes, en plus des conventions nominatives pour des cas prioritaires sur l’ensemble du territoire wallon. Il est toutefois clair que la création de places est directement conditionnée à l’obtention de moyens nécessaires pour les financer.

    Au budget 2013, l’AWIPH a réservé un montant de 1,6 million d’euros pour créer une cinquantaine de places en faveur de nouveaux cas prioritaires.

    L’objectif est de créer 50 à 60 places supplémentaires chaque année future pour atteindre un minimum de 500 places supplémentaires à l’échéance de l’actuel contrat de gestion (2017). À noter que la création de 500 places d’accueil et d’hébergement représente un budget total d’environ 20 millions d’euros.

    Par ailleurs, deux mesures visent encore à augmenter le nombre de personnes de grande dépendance dans les services d’accueil et d’hébergement et/ou de leur réserver prioritairement les places.



    1) La transformation de places résidentielles pour adultes en logements supervisés.

    Les services résidentiels pour adultes dont la capacité agréée et subventionnée par l’AWIPH est inférieure à 60 places doivent transformer une place (leur capacité agréée et subventionnée est réduite d’une place) en trois places de logement supervisées ; par cette opération, 3 bénéficiaires du Service résidentiel avec un handicap léger ou modéré et une capacité minimale d’autonomie glisseront vers le service de logement supervisé, libérant ainsi 2 places qui seront réservées à de nouveaux bénéficiaires ayant un handicap de grande dépendance. Les services d’une capacité d’accueil et d’hébergement supérieure à 60 places devront quant à eux transformer 2 places résidentielles en 6 places de logements supervisés ; c’est ainsi 4 places en service résidentiel pour adultes qui seront libérées par service au bénéfice de personnes ayant un handicap de grande dépendance.

    Ce processus de transformation va permettre en 2013 d’admettre en service résidentiel pour adultes une soixantaine de personnes ayant un handicap de grande dépendance.


    2) Une réforme des services d’accueil de jour pour adultes.

    Une réforme des modalités d’agrément et de subventionnement des services d’accueil pour personnes handicapées est en préparation.

    L’objectif est d’élargir les plages horaires d’accueil des services et de permettre une fréquentation à la carte et/ou à temps partiel des bénéficiaires de manière à répondre au plus près des besoins et attentes des personnes et de leur famille. Cette réforme va induire la prise l’accueil d’un plus grand nombre de bénéficiaires qui s’élève au total actuellement à environ 2 400 bénéficiaires adultes. À ce stade, il n’est pas encore possible d’estimer le nombre supplémentaire de bénéficiaires qui pourront être accueillis.




    Par ailleurs, il convient également de veiller à une amélioration des infrastructures d’accueil et d’hébergement des personnes handicapées.

    Environ 300 services d’accueil et d’hébergement sont agréés et subventionnés par l’AWIPH en Wallonie. Un budget total de 30 millions d’euros a été dégagé par la Wallonie le 2 mai 2013 afin de leur permettre de réaliser des travaux d’entretien et de rénovation de leurs infrastructures mais également de procéder à des travaux d’aménagement des locaux en lien avec le vieillissement des bénéficiaires et la prise en charge des personnes ayant un handicap de grande dépendance.

    Ce budget de 30 millions d’euros permettra de lancer un programme d’investissement de 5 millions d’euros chaque année pendant 6 ans.

    Ces travaux amélioreront la qualité de la prise en charge et le bien-être des bénéficiaires.

    Afin de diversifier l’offre de service et de favoriser la vie au domicile, il s’agit de continuer à développer le budget d’assistance personnelle et les services ambulatoires.

    Le budget d’assistance personnel existe depuis 2009 et permet actuellement le maintien à domicile de 250 personnes handicapées. La formule répond à un réel souhait des personnes.

    En 2013, la Wallonie a dégagé des moyens budgétaires, à savoir 760 000 euros, afin de répondre à 100 demandes supplémentaires, ce qui portera le nombre total de personnes bénéficiaires d’un budget d’assistance personnelle à 350.

    L’objectif est d’accroître le budget de cette politique afin de rencontrer les attentes de 100 bénéficiaires supplémentaires annuellement pour atteindre au moins 750 bénéficiaires en 2017.




    Les services d’Aide précoce aux enfants et à leur famille, d’Aide à l’intégration pour les adolescents, d’Accompagnement pour les adultes soutiennent aujourd’hui 7 500 personnes.

    En 2013, de moyens budgétaires (274 000 euros) ont été dégagés afin de renforcer le personnel des services d’Aide précoce et ainsi accroître le nombre de bénéficiaires de ces services de 300.
    L’objectif est d’atteindre 9 000 bénéficiaires de ces services d’aide et d’accompagnement en 2017.

    J’ai souhaité enfin développer et soutenir des projets innovants d’aide et d’accompagnement des personnes en situation de handicap.

    Ces projets visent des personnes présentant un handicap plus léger et offrent une aide en milieu de vie ordinaire. Il s’agit de projets tels que :
    - les activités de valorisation et d’utilité sociale ou activités citoyennes : 13 services fonctionnent, pour un budget de 600 000 euros, depuis décembre 2012 ; ils occupent déjà plus de 200 bénéficiaires,
    - la « Transition des jeunes de 16 à 25 ans » dix projets spécifiques ont été mis en place en 2010. Ils visent à améliorer la transition entre l’école et la vie active, un moment charnière souvent problématique en raison d’un manque de soutien et d’orientation. Un budget de 625 000 euros y a été consacré et ce sont quelque 112 jeunes qui en ont bénéficié outre les sensibilisations réalisées dans les établissements d’enseignement spécialisés
    - les logements supervisés ; ils visent à favoriser l’accès à un véritable chez soi pour l’adulte présentant des difficultés importantes en matière d’autonomie résidentielle et à offrir des services de soutien sur mesure dont l’intensité variera selon les besoins et l’évolution de chaque personne.
    - les projets de « Logement encadré novateur », financés depuis le 1er janvier 2011, s’inscrivent dans la volonté de permettre aux personnes de choisir leur lieu de résidence et de disposer des services nécessaires pour pouvoir assumer ce choix.
    Il s’agit de développer des projets alternatifs aux services résidentiels existants et d’ainsi renforcer la diversification des possibilités offertes aux personnes handicapées (logement accompagné, encadré, supervisé).
    Les 9 projets se sont vu attribuer un budget annuel total de 375 000 euros et 109 demandes ont été acceptées au cours de la première année de fonctionnement.
    - les services de répit pour les proches : afin de permettre aux familles de souffler, depuis 2009, 23 services sont financés dans le cadre de l’initiative spécifique Répit pour un montant de plus 1,3 million d’euros.

    En 2009, 517 personnes étaient inscrites dont 387 ont effectivement utilisé les services Répit. En 2010, on dénombrait 906 inscrits pour 572 familles utilisatrices et en 2011, 1 172 inscriptions pour 737 utilisateurs.
    Plus de 50 % des personnes utilisatrices de ces services sont des personnes dites de grande dépendance.

    L’objectif est d’atteindre jusqu’à 4 000 bénéficiaires en 2017 et de pérenniser ces projets pilotes via une réglementation wallonne.