/

L'agro-écologie

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 530 (2012-2013) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 18/06/2013
    • de DETHIER-NEUMANN Monika
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine

    L’agro-écologie est une notion encore peu institutionnalisée. Néanmoins, face au bilan économique, social et environnemental de l’agriculture conventionnelle, il convient de mieux en cerner la portée.

    Lors de ma dernière intervention au sujet de l’agro-écologie justement, Monsieur le Ministre répondait que l’agriculture écologiquement intensive doit être l’objectif de la Wallonie en matière d’agriculture et qu'il souhaitait inscrire cet objectif dans le Code agricole. Cela impliquant une orientation de la recherche, de la formation et de l’encadrement.

    Or je suis interpellée par rapport à ce terme d’« agriculture écologiquement intensive » que Monsieur le Ministre utilisait pour répondre à ma question sur l’agro-écologie.

    En effet, ces deux termes ne sont pas synonymes. À ce sujet, la France est en passe de changer complètement son fusil d’épaule en proposant de tendre désormais vers l’agro-écologie et non plus vers l’agriculture raisonnée. L’objectif poursuivi est la révision du système et non plus sa modification à la marge.

    Des associations protectrices de l’environnement telles qu’Inter-Environnement Wallonie (IEW) mettent en garde devant l’agriculture écologiquement intensive. Selon IEW, l’agriculture écologiquement intensive aurait pour but une agriculture tournée vers l’exportation, au service du marché. À cette fin, l’agriculture écologiquement intensive, concept fourre-tout, proposerait des méthodes agricoles issues de l’agro-écologie, et ce, entre autres, à côté des OGM ! Il y a donc clairement une priorité de la productivité au détriment de la durabilité. L’agriculture industrielle intensive se voit donc teintée de vert, mais cette voie ne propose aucun changement d’orientation agricole que nous souhaitons pourtant pour la Région wallonne. À quand un réel changement de paradigme à la française en Wallonie ?

    Ce que nous souhaitons aujourd’hui, c’est une réflexion liant agriculture et alimentation, la prise en compte des dimensions sociales, un modèle économique qui assure un revenu à tous les agriculteurs, une attention aux savoirs paysans et pas uniquement aux savoirs techniques.

    Par rapport à cela, Monsieur le Ministre peut-il tout d’abord nous rassurer quant aux objectifs et aux visions de l’agriculture qu'il défend pour la Wallonie ?

    Peut-il nous assurer que l’« agriculture écologiquement intensive » telle que décrite plus haut n’est pas dans ses objectifs pour le nouveau Code agricole ?

    Quelle est concrètement sa vision de l’agro-écologie ?

    Monsieur le Ministre peut-il nous dire aujourd’hui comment il l’intègre dans le Code agricole ?
    Quelle est la place qu'il lui réserve dans ce Code ?

    Comment le Code renforce-t-il les perspectives de l’agro-écologie ?

    Plus pratiquement, comment Monsieur le Ministre compte-t-il appuyer les agriculteurs qui se lancent dans ce type d’évolution de leur modèle agricole ?

    Quelles évolutions compte-t-il insérer dans les principaux régimes d’aides dont il dispose (DPU, conditionnalité de toutes les aides) de manière à favoriser les pratiques agricoles plus durables – soit l’agro-écologie – et pour décourager ou restreindre les pratiques qui s’en éloignent le plus ?

    Je pense en effet que sans changement dans ces régimes et normes, il sera très difficile de provoquer une évolution des pratiques.

    Ma dernière intervention portait plus spécifiquement sur les formations en matière d’agro-écologie actuellement encore manquantes en Région wallonne. Monsieur le Ministre promettait d’ailleurs d’inscrire cette matière dans le cursus des écoles supérieures dès septembre 2013.

    Où en est actuellement ce projet de formation agro-écologique en haute école ? Quels contacts Monsieur le Ministre a-t-il pris ?

    Quels sont les retours des écoles supérieures ?

    Ce projet se concrétise-t-il effectivement pour septembre 2013 ?
  • Réponse du 10/07/2013
    • de DI ANTONIO Carlo

    Comme je l’écrivais récemment à M. Tachenion dans ma réponse à sa question N°443, nous suivons de près les travaux de révision de la loi française d’orientation agricole dans le cadre de la préparation du premier Code wallon de l’agriculture. J’ai eu l’occasion de m’entretenir à ce sujet avec mon homologue français, le Ministre Le Foll, lors d’une rencontre au Salon de l’agriculture à Paris au début mars.

    Si je partage globalement ses idées qui sont proches de celles proposées à la suite des concertations sur le code wallon de l’agriculture, je ne partage pas le choix du terme « agroécologie ». Pour ses pionniers, l’agroécologie est plus qu’un mode de production, il s’agit d’une philosophie de vie.

    Plutôt que de focaliser d’emblée le débat sur un terme que certains allaient refuser en bloc tandis que d’autres allaient nous accuser de le spolier voire de le dénaturer, j’ai opté pour l’écoute lors des concertations.

    Au-delà des termes, ma volonté est en effet de définir un projet fédérateur pour notre agriculture, un projet d’avenir mais réaliste et acceptable par tous.

    À la suite de cette écoute et des concertations, le « modèle » que je propose pour la Wallonie est celui de l’agriculture écologiquement intensive (AEI). Ce modèle, théorisé en France par plusieurs organismes dont l’Institut National de Recherche Agronomique (INRA) a été repris et adapté aux réalités de l’agriculture wallonne par le Centre Wallon de Recherches Agronomiques (CRA-W) qui l’a proposé comme thème central pour son programme stratégique 2013-2015.

    L’agriculture écologiquement intensive est un modèle d’agriculture qui cherche à s’appuyer sur les processus et fonctionnalités écologiques pour produire. Le recours aux fonctions des écosystèmes rend cette agriculture plus efficace en termes d’utilisation de ressources naturelles renouvelables (eau, sol), dans l’utilisation d’énergie et est également moins productrice d’externalités négatives vis-à-vis de l’environnement.

    L’AEI représente un réel changement de modèle et de réflexion qui ne peut se résumer à l’intensification écologique. Elle ne doit pas être confondue avec « l’intensification durable », terme utilisé pour promouvoir des pratiques et des produits souvent peu compatibles avec l’AEI.

    J’ai pu lire récemment certaines « newsletter » qui semblaient confondre ces termes et entretenir une polémique inutile. J’invite tous ceux qui se posent des questions au sujet de l’AEI à lire l’ouvrage « Qu’est-ce que l’agriculture écologiquement intensive » paru en février de cette année.

    Le code wallon de l’agriculture prévoit en son article 1er de soutenir l’agriculture écologiquement intensive. Il ne s’agit pas d’interdire mais de donner les moyens et l’encadrement à tous les agriculteurs wallons pour évoluer dans cette voie qui est aussi source d’un meilleur avenir pour notre agriculture. Les nouvelles normes et aides se baseront sur les objectifs de l’article 1er tout en veillant à permettre une évolution à un rythme soutenable pour ceux qui doivent évoluer.

    L’agroécologie et l’agriculture biologique peuvent être considérées comme les formes les plus poussées d’AIE. Les recherches dans ce domaine, les pratiques innovantes des agriculteurs, doivent être mises au profit de tous.

    La formation que l'honorable membre mentionne concerne l’agriculture biologique. Je soutiens le collectif pour la formation en agriculture biologique constitué de plusieurs Hautes Écoles et de divers représentants du secteur de l’agriculture biologique.

    Suite au travail de ce collectif, la Haute École provinciale de Namur a déposé cette demande de reconnaissance de la formation auprès du ministre compétent.

    Le Conseil général des Hautes Écoles l’a approuvée mais mon collègue en charge de l’enseignement supérieur a décrété un moratoire concernant l’ouverture de nouvelles formations tant que le paysage de l’enseignement supérieur n’est pas réformé.

    J'invite l'honorable membre à questionner à ce sujet le Ministre Marcourt à qui j’ai personnellement écrit récemment pour lui rappeler l’importance de cette demande portée par de nombreux acteurs et nécessaire pour encourager l’évolution de notre agriculture.