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Le poids du monde associatif dans le paysage économique

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 255 (2012-2013) 1

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  • Question écrite du 27/06/2013
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, des P.M.E., du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles

    Ce n'est une découverte pour personne, le tissu associatif joue un rôle essentiel dans le développement et l'épanouissement des citoyens tant il est actif dans un panel de domaines aussi différents que complémentaires les uns aux autres.

    Le récent rapport de l'étude réalisée par la Banque nationale pour la Fondation Roi Baudouin appuie ce constat en affirmant que le secteur associatif reste également un acteur majeur de l'économie belge.

    En effet, celui-ci révèle que le secteur associatif de Belgique représente 4,5 % de la production totale de notre économie ainsi que 3,6 % du total des investissements (chiffres 2010). Non seulement les associations sont génératrices d'une part importante de notre PIB, mais elles le sont également pour l'emploi.

    Toujours selon cette même étude, ce secteur représentait en 2010, 11,9 % de l'emploi salarié total de l'économie belge. En clair, un Belge sur neuf.

    Si la santé et l'action sociale représentent les branches les plus actives et regroupent à elles deux la moitié du financement public alloué aux associations, les emplois sont nombreux dans toutes les branches du secteur (à l'exception de l'agriculture et de l'industrie).

    Au regard de ces constats, Monsieur le Ministre peut-il nous informer quant à son analyse de la force de ce tissu associatif au sein de notre économie et surtout des perspectives et autres développements positifs de ce secteur ?

    Existe-t-il une politique transversale cohérente et concertée quant à l'ensemble de ce secteur ? Si tel n'était pas le cas (ou peu le cas), ne serait-il pas intéressant de réfléchir en ce sens dans l'intérêt du secteur et au vu du contexte budgétaire difficile ?

    Comment pourrions-nous davantage travailler au développement de celui-ci étant donné la diversité des domaines exploités et la richesse socioéconomique qu'il porte ?

    Une des particularités, et je dirais même une des forces, de ce monde associatif est la collaboration, le partenariat. Ne serait-il donc pas pertinent de réfléchir selon le mode de fonctionnement du terrain ?




  • Réponse du 11/07/2013
    • de MARCOURT Jean-Claude

    Comme souligné, le secteur associatif se caractérise d’abord par son extrême diversité, tant dans les activités développées que dans la taille des structures concernées. Et il est clair que ce secteur pèse lourd dans le paysage socio-économique de notre pays et de notre région. L’histoire institutionnelle de la Belgique, notamment à travers le développement des piliers chrétien et laïc, a largement contribué à la diffusion de ce modèle.

    La manière dont le PIB est actuellement calculé met clairement en avant le poids du secteur et reconnaît de facto le poids économique mis en exergue dans cette question. Cependant, il convient de rappeler, qu’à de rares exceptions près, les emplois créés au sein du secteur associatif le sont grâce à des subventions attribuées par divers niveaux de pouvoir public, pour permettre de réaliser un certain nombre de missions de services publics, répondant à des besoins d’ordre « social », au sens large du terme, insuffisamment rencontrés. Selon l’enquête menée par la Fondation roi Baudouin en 2012, dans le secteur associatif, 6 emplois sur 10 bénéficient de subventions liées à un projet et 7 sur 10 sont subventionnés de manière structurelle.

    Les secteurs de la santé, de l’action sociale, comme mentionnés, mais aussi de la culture, de l’insertion socioprofessionnelle, de l’Aide à la jeunesse, structurent principalement le secteur associatif. Et effectivement, ces associations occupent nombre d’emplois. Selon l’Institut des comptes nationaux, en 2010, l’évolution de l’emploi salarié a été plus dynamique dans le secteur associatif, avec une croissance de 3,7 %, contre seulement 0,7 % dans l’ensemble de l’économie. Aussi le poids relatif des associations a-t-il augmenté entre 2009 et 2010, tant en termes d’emplois que de rémunérations générées.

    Cependant, l’analyse du poids du secteur associatif en regard du PIB n’est sans doute pas la meilleure manière d’évaluer correctement l’apport des ASBL au développement socioéconomique de la Belgique et de la Wallonie, même si, toujours selon l’Institut des comptes nationaux, en 2010, le poids de la sphère associative dans le PIB est de quelque 5,5 %, avec une valeur ajoutée brute s’élevant à près de 20 milliards d’euros.

    En effet, la plupart des ASBL jouent un rôle essentiel non pas tant en matière de production de richesses, telle qu’on l’entend habituellement et telle que les indicateurs économiques actuels permettent de l’évaluer, mais plutôt en ce qu’elles participent clairement à la redistribution des richesses.

    En travaillant sur les domaines tels que la santé, elles participent à la mise en œuvre de missions de services publics qui concernent l’intérêt général. Elles jouent un rôle crucial dans la mise en œuvre des politiques sociales redistributives que se doit d’avoir pour vocation un « état moderne ».

    Il ne s’agit évidemment pas de tenir un discours caricatural sur le secteur associatif, qui viserait à minorer le rôle de ce secteur et à le considérer comme secondaire par rapport aux entreprises de l’économie marchande « classique ». Au contraire, la véritable plus-value des ASBL n’est pas reflétée à leur juste valeur dans les indicateurs tels que le PIB, et il convient de le souligner.

    C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le gouvernement a mandaté l’IWEPS et le CESW pour qu’ils réfléchissent à la constitution de plusieurs indicateurs liés au développement social et au développement environnemental en prenant en compte d’autres éléments que ceux du PIB, ce afin d’évaluer plus justement le niveau de richesses de la Wallonie, en lien avec le niveau de bien-être de ses citoyens. Les travaux sont en cours, car le débat est scientifique et éminemment idéologique. Les indicateurs qui font actuellement l’objet d’une réflexion prennent en compte la qualité de vie, le développement durable, la soutenabilité de notre économie, etc. L’état des recherches est d’ailleurs accessible sur le site internet de l’IWEPS. Sur base de celles-ci, le gouvernement pourra prendre attitude quant à l’utilisation qu’il fera de ces nouveaux indicateurs, étant entendu qu’un indicateur n’a de sens que s’il peut être utilisé pour comparer des données, en fonction soit d’une évolution dans le temps soit d’une situation d’un pays ou d’une région à l’autre. En clair, ce débat doit, pour être pertinent, dépasser les frontières de la Wallonie et idéalement pouvoir être posé au niveau des institutions internationales.

    Poser la réflexion d’une politique transversale en ce qui concerne le secteur associatif est bien sûr pertinente, mais ne peut être cantonnée à la seule dimension économique du débat. Ce serait, justement, réduire les associations à un simple rôle d’acteurs « économiques » stricto sensu, alors que, nous le savons tous, elles jouent un rôle majeur pour assurer la cohésion sociale dans notre pays et, particulièrement, comme c’est le cas aujourd’hui, en période de crise « multiforme », parce que financière, économique, environnementale, sociale, voire existentielle.

    Cette question n’est pas dissociable d’une réflexion sur le rôle de l’état et des services publics et, surtout, d’une approche gouvernementale globale, notamment dans le cadre de la discussion sur un pacte associatif, tel qu’ébauché sous la précédente législature. Celui-ci n’a cependant pu aboutir pour deux principales raisons :
    * primo, le secteur associatif est beaucoup trop hétérogène pour pouvoir adhérer à un texte commun, à moins que celui-ci ne concerne que des dispositions tellement minimalistes qu’elles en perdraient tout caractère opérationnel ;
    * secundo, si ce pacte aborde la question des relations avec les pouvoirs publics, il convient alors de prendre en compte les répercussions importantes sur les bases légales visant la reconnaissance et le financement des ASBL, en restant attentifs à ce que cela ne se fasse pas au détriment de certaines activités ou certains secteurs.

    En conclusion, si la question d’une politique globale en faveur du secteur associatif mérite d’être posée, elle ne peut l’être dans le cadre unique du développement économique et doit surtout prendre en compte les liens forts qui unissent ce secteur aux pouvoirs publics.