Une plainte de familles de patients de l'établissement de défense sociale "Les Marronniers" à Tournai
Session : 2012-2013
Année : 2013
N° : 227 (2012-2013) 1
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Question écrite du 09/09/2013
de TIBERGHIEN Luc
à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des Chances
Le 3 juillet dernier, des familles de patients de l’établissement de défense sociale «Les Marronniers» de Tournai ont envoyé une plainte au Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe à propos des conditions de vie de leurs proches internés.
Selon ces personnes, la logique sécuritaire, le souci de protéger la société de la dangerosité présumée du malade, dominent largement l’aspect médical. Les signataires reprochent un encadrement thérapeutique insuffisant qui entraîne des perpétuités psychiatriques de fait.
Madame la Ministre a-t-elle pris connaissance du contenu de cette plainte ? Les familles ont-elles été contactées par l’établissement de défense sociale ? Par la direction compétente au sein du SPW ? Quelle est la réaction de Madame la Ministre par rapport à ces accusations ?
Réponse du 27/11/2013
de TILLIEUX Eliane
Le contexte de l'internement est particulier. En effet, il s'agit d'une mesure de sûreté prise à l'encontre de personnes qui ont commis un délit ou un crime et considérées comme non-responsables de leurs actes.
Le rôle de la Défense sociale du CRP est double. Il s'agit à la fois de protéger la société mais aussi de soigner le patient et de préparer un projet de réinsertion. Pour que des modalités soient accordées au patient (sorties, congés, libérations) par la commission de Défense sociale, il y a un certain nombre de conditions qui doivent être respectées par le patient mais aussi parfois par son entourage.
Dans ce contexte, les psychiatres et les équipes thérapeutiques sont évidemment très exigeants quant au respect de ces conditions et c'est la commission de Défense sociale qui a toujours le dernier mot. Il peut parfois arriver qu'il y ait une certaine frustration du patient ou de la famille par rapport à ce qui a été accordé ou non.
J’en reviens aux différents éléments soulevés dans cette question.
* Par rapport à l’encadrement Le nombre de psychiatres a doublé en 10 ans, le personnel d'encadrement est du personnel soignant, les normes sont les normes d'encadrement d'un hôpital psychiatrique avec du personnel de sécurité supplémentaire.
* Par rapport à la qualité des soins Les programmes thérapeutiques du centre sont reconnus internationalement comme en témoignent les publications scientifiques et les présentations à des congrès scientifiques, comme notamment le CIFAS (Congrès International Francophone sur les Agresseurs Sexuels au Canada) en juillet 2013. Les programmes thérapeutiques servent aussi d'exemples à l’étranger.
* Par rapport à l’organisation des soins et la spécificité de chaque unité de soins Les patients sont toujours accueillis dans le pavillon « Admissions », ils y sont soignés et évalués dans un contexte de soins avec un encadrement renforcé de type « IB », après 3 à 6 mois, ils sont orientés vers une unité de soins qui mènera alors le projet thérapeutique jusqu’à son terme.
Trois critères interviennent : la notion de public-cible (donc de diagnostic), la notion de sécurité et la notion de « groupe » : - Public-cible : quatre public-cibles ont été identifiés, selon les constatations de nos études et les recommandations de la littérature internationale concernant le « Forensic » : les patients psychotiques, les patients déficients intellectuels, les délinquants sexuels et les patients présentant essentiellement des traits de personnalité antisociale. Les programmes thérapeutiques sont évidemment adaptés. Il faut noter que la co‑morbidité est importante et que le patient présente généralement plusieurs diagnostics. - Sécurité : Le niveau de sécurité n’est pas identique dans toutes les unités de soins et nos études montrent que le niveau de dangerosité n’est évidemment pas identique pour tous les patients. Ce critère intervient donc dans le choix de l’unité. - Groupe : La vie au sein de l’unité est active et dynamique ; il y a de nombreuses interactions entre les patients, notamment lors des activités thérapeutiques. La notion d’intégration dans un groupe de patients intervient donc dans l’orientation du patient.
* Par rapport aux contacts avec les proches La notion de réseau primaire de soutien et donc le lien avec les proches et la famille est évidemment un élément essentiel du programme thérapeutique. Ces contacts sont donc favorisés. Ils sont toutefois soumis aussi aux impératifs de sécurité et au respect des conditions imposées par les Commissions de Défense sociale. En 2012, 4115 visites de familles ou proches ont eu lieu en Défense sociale.
* Par rapport aux modalités accordées (sorties, congés...) Il faut rappeler que les modalités sont accordées par les Commissions de Défense sociale et ensuite organisées par le CRP. A titre d’exemple : 18 000 sorties ont été organisées en 2012.
* Par rapport aux droits du patient La Défense sociale du CRP Les Marronniers est un hôpital. Les règles relatives aux droits du patient sont donc respectées et le contrôle du respect de ces règles est effectué notamment par l’inspection. - Dossier médical : les patients peuvent avoir accès à leur dossier médical, notamment à tout ce qui est somatique et à tout ce qui est directement en relation avec les soins psychiatriques sans lien avec le contexte expertal ou l'interprétation subjective. Le dossier d’écrou, propriété de la Justice, n’est pas concerné par cette loi. - Médiation : un service de médiation existe et fonctionne de manière très active. La médiatrice rencontre régulièrement les médecins et la direction de l’hôpital. Elle a, notamment, été invitée lors du Comité de Direction de juin 2013 ; son rapport 2012 a fait l’objet d’un point du Conseil d’Administration du 17 juillet 2013 et du Conseil médical du 9 août 2013. - Avocat : Chaque patient est accompagné d’un avocat. Ceux–ci entretiennent des contacts réguliers avec les médecins, les équipes et la direction de l’hôpital. Les demandes ou plaintes éventuelles des patients empruntent régulièrement aussi cette voie–là.
Enfin, une rencontre a été organisée avec les familles suite à la plainte pour leur expliquer le contexte et celle-ci s’est déroulée dans un climat très constructif.