/

La lutte contre la pauvreté infantile

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 233 (2012-2013) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 16/09/2013
    • de TROTTA Graziana
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des Chances

    Le 7 décembre 2006, à l'initiative de Madame Olga Zrihen, le Sénat adoptait une résolution relative à la lutte contre la pauvreté infantile qui touche, selon les estimations, près d'un enfant sur cinq en Belgique.

    En juillet 2010, la Belgique assumait pour 6 mois la Présidence du Conseil de l'Union européenne, et elle faisait de la lutte contre la pauvreté infantile l'une de ses priorités.

    On se rend bien compte que la résolution du Sénat a été comme un déclencheur. Elle a permis une visibilité croissante, une plus grande prise de conscience du phénomène et les autorités s'attellent avec une énergie croissante à activer tous les leviers possibles pour lutter plus efficacement contre la pauvreté touchant les enfants.

    La résolution du Sénat demandait notamment au Gouvernement fédéral de «mettre sur pied une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté infantile». Cela n'est pas resté sans effet, puisque le 3 juin dernier, la Secrétaire d'État à l'Intégration sociale et à la Lutte contre la pauvreté a annoncé le Premier Plan national de Lutte contre la Pauvreté infantile.

    Ce plan, qui s'inscrit plus largement dans la Stratégie Europe 2020 de la Commission européenne, prévoit pas moins de 140 actions.

    La Secrétaire d'État a indiqué avoir mis autour de la table tous les niveaux de pouvoir pour trouver et mettre en œuvre, conjointement, des solutions à cet enjeu de première importance. Elle a demandé aux ministres concernés de s’engager à élaborer et à mettre en œuvre des actions durables.

    En tant que Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Égalité des chances, Madame la Ministre participe avec le Ministre-Président au groupe de travail inter-fédéral.

    J'ai pu lire que la Secrétaire d'État souhaite encourager les CPAS à mettre en place une structure locale de concertation où les CPAS, écoles, crèches et associations de lutte contre la pauvreté, entre autres, se rencontreraient pour rechercher des solutions sur mesure à proposer aux enfants de leur commune en situation de pauvreté.

    En novembre 2012, une conférence intitulée «La pauvreté infantile : quelle place dans les CPAS ?» était organisée par l'UVCW et la Fédération des CPAS, avec le soutien de Madame la Ministre.

    Par conséquent, quels leviers Madame la Ministre peut-elle encore activer pour intensifier la lutte contre la pauvreté infantile ? Quelle est la valeur ajoutée du Plan national de lutte contre la pauvreté infantile pour l'action wallonne dans ce domaine ? Est-ce que l'idée d'une structure locale de concertation va être concrétisée ?

    Quelles collaborations peuvent être renforcées ou mises en place dans cet objectif (par exemple avec l'Aide à la Jeunesse, avec l'Éducation, l'Enfance, etc.) ?

    Enfin, le dispositif wallon «Plan de cohésion sociale» piloté par le Ministre P. Furlan en charge des Pouvoirs locaux prévoit que Madame la Ministre peut octroyer aux communes un financement complémentaire dans le cadre d'actions spécifiques de lutte contre la pauvreté (financement « Article 18 »). Peut-elle préciser les modalités de fonctionnement de ce mécanisme ? Dans quelle mesure a-t-il jusqu'à présent été mis en oeuvre ? Combien de communes en ont bénéficié ?
  • Réponse du 27/11/2013
    • de TILLIEUX Eliane

    L’étude publiée en septembre dernier par l’IWEPS « Regards sur la pauvreté et les inégalités en Wallonie » (Working paper n°16) met effectivement en exergue les risques de pauvreté, la déprivation matérielle et les inégalités vécues au quotidien par une partie importante de la population wallonne (près d’1 Wallon sur 5).

    L’étude indique que les enfants sont proportionnellement plus nombreux à souffrir de déprivation que le reste de la population belge. Quel que soit l’indicateur observé, un enfant sur quatre vit sous le seuil de pauvreté ou subit la déprivation en Wallonie.

    Cette différence régionale ne résulte pas du seul différentiel de pauvreté entre la Flandre et la Wallonie. Il s’agit bel et bien d’une vulnérabilité des enfants plus importante en Wallonie comparativement à la Flandre : alors que sur 100 personnes pauvres en Flandre, 21 sont des enfants, cette proportion atteint 28% en Wallonie.

    La pauvreté infantile n’est pas qu’une question de revenus ; certes, la situation sur le marché du travail des adultes dans le ménage (à l’emploi, au chômage, bénéficiaire du RIS,…) est un déterminant important en ce qui concerne le risque pour les enfants de se retrouver dans une situation de pauvreté. Mais il faut aussi examiner les conséquences qu’entraine la pauvreté en termes d'exclusion sur le plan du logement, de l'enseignement, de la participation, de la santé... Pour ne donner que quelques exemples, il n'est pas toujours possible, pour les enfants issus de ménages vivant sous le seuil de pauvreté, de participer régulièrement à des activités de loisirs en dehors de la famille; ces enfants n'ont souvent pas de place en dehors de la maison pour jouer en toute sécurité, ils n'ont pas toujours un endroit adapté pour étudier, il leur manque souvent de nouveaux vêtements, etc.

    La pauvreté infantile ne peut par ailleurs être retirée du contexte familial. C’est pourquoi le Gouvernement wallon s’attèle, tant à travers l’action individuelle des ministres que via sa participation aux Plans fédéraux, à lutter contre la pauvreté infantile pour contribuer à l’amélioration de la situation des familles.

    En 2012, le secteur de l’aide aux Familles géré par mon Département représentait 159 500 000 euros soit la plus grande part des moyens alloués aux secteurs de la famille et des aînés. Cela équivaut à près de 20% du budget annuel global alloué aux politiques sociales et de santé en Wallonie.

    Des mécanismes d’aide sont également prévus au sein du dispositif des Plans de cohésion sociale mis en œuvre dans 181 villes et communes wallonnes de langue française. La finalité de ces plans est d’améliorer l’accès aux droits fondamentaux et le bien-être de tous via le développement social des quartiers et la lutte contre toute forme de pauvreté et d’exclusion, en ce compris celles des enfants. L’analyse des projets de plans 2014-2019 est en phase de finalisation, et une attention particulière a été accordée aux projets s’adressant aux enfants et à leurs familles.

    Comme l'honorable membre l’a souligné, j’ai également décidé d’octroyer des moyens supplémentaires aux communes pour développer leur Plan de cohésion sociale, dans le cadre de l’article 18 du décret du 6 novembre 2008 régissant les PCS. Cette mesure est destinée aux communes les plus défavorisées, celles dont l’ISADF (Indicateur d’Accès aux Droits Fondamentaux) est supérieur à 0, et les subventions sont directement rétrocédées aux associations partenaires qui mènent les actions. Une convention de partenariat est conclue entre la commune et chacun de ses partenaires « article 18 » détaillant les modalités des actions développées.

    Lors de la programmation 2009-2013, 70 communes ont bénéficié d’une subvention « article 18 ». Pour le nouveau PCS 2014-2019, j’ai souhaité que les actions présentées s’inscrivent dans une ou plusieurs des thématiques suivantes :
    - la lutte contre la pauvreté et principalement les inégalités de santé ;
    - l’habitat permanent au travers d’un soutien aux services aux personnes habitant dans ces équipements ;
    - l’intergénérationnel dans une optique de partage de savoirs entre enfants et aînés.

    Le nombre de communes bénéficiant de cette subvention devrait être légèrement supérieur à celui observé lors de la première programmation.

    L'honorable membre m’interroge également sur la contribution de la Wallonie au Plan fédéral de Lutte contre la Pauvreté infantile. La Fédération Wallonie-Bruxelles et la Wallonie se sont basées sur le Plan d’actions « Droits de l’enfant » (PADE) 2011-2014 pour apporter cette contribution. Ce lien entre le Plan national et notre Plan d’actions « droits de l’enfant » est tout à fait logique puisque le Plan national de Lutte contre la Pauvreté infantile s’est construit autour d’une approche « droits de l’enfant ».

    Précisément, ce plan d’actions « droits de l’enfant », dont le Ministre-Président assure le pilotage, constitue un important levier qui permettra d’intensifier la lutte contre la pauvreté infantile car il contient toute une série de projets visant à combattre les inégalités sociales et les discriminations, dans une approche en 3 piliers ciblant :
    - l’accès aux ressources adéquates ; 
    - l’accès aux services et aux opportunités et
    - la participation des enfants.

    Ces projets, qu’il s’agisse de garantir un logement décent aux familles en difficultés avec enfants, de favoriser la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle, d’améliorer l’accès aux services, d’encourager la participation des enfants et leur droit à être entendus, sont inscrits dans l’axe 3 « Lutte contre les inégalités sociales et les discriminations » du plan, qui devrait par ailleurs être l’axe privilégié du prochain Plan d’actions « Droits de l’enfant » 2014-2017.

    Parmi les actions que je piloterai, l’une portera notamment sur l’identification des données nécessaires au suivi du bon état de santé des enfants de 0 à 18 ans et une seconde sur la disponibilité de statistiques stratifiées par sexe et âge dans le cadre des politiques menées en santé et ce, dans le but d’envisager les politiques complémentaires qui seraient à mettre en place. Le dispositif PCS y est aussi repris, le projet inscrit visant à promouvoir les droits de l'enfant par une sensibilisation des communes concernées et par la possibilité de modifier les PCS pour y inscrire des actions liées aux droits de l’enfant.

    Quant au Plan national de Lutte contre la Pauvreté infantile, il s’étend sur deux ans : les actions qui s’y retrouvent devront donc être mises en œuvre avant 2015. Mon Cabinet participe avec celui du Ministre-Président au Groupe de travail de la Conférence Interministérielle ad hoc (Plan de Lutte contre la Pauvreté infantile) piloté par la Secrétaire d’Etat à l’Intégration sociale et la Lutte contre la Pauvreté. Ce plan a été lancé en juin dernier.

    Afin de s’assurer que nous avançons et que nous tiendrons les délais, le Ministre-Président organise pour le moment des bilatérales avec chaque cabinet et leur(s) administration(s).

    L’objectif de ces bilatérales est de passer en revue l’ensemble des projets du plan et de faire le point sur l’état d’avancement de ceux-ci. La base de travail est l’évaluation intermédiaire des deux plans d’actions « droits de l’enfant » (wallon et FWB) réalisée par l’Observatoire de l’Enfance, de la Jeunesse et de l’Aide à la Jeunesse de la FWB. Cette évaluation est disponible sur leur site internet.

    Il est donc un peu trop tôt pour faire un premier bilan de la mise en œuvre des actions de la Wallonie dans le Plan national de Lutte contre la Pauvreté infantile. L’objectif du Ministre-Président est de présenter au Gouvernement cette évaluation ainsi qu’une actualisation du plan d’actions « droits de l’enfant » dans les prochaines semaines.

    Enfin, dans une perspective à plus long terme, le Plan Marshall 2022 adopté le 11 juillet 2013 en première lecture par les deux gouvernements prend en compte indirectement la lutte contre la pauvreté et l’amélioration de la condition des familles ; ses mesures s’inscrivent en complémentarité avec l’ensemble des dispositifs destinés à améliorer les statuts économique, social et culturel des Wallons et prennent en compte transversalement l’ensemble des défis qui sont des opportunités pour le futur de la Wallonie

    Je reste à disposition de l'honorable membre pour tout complément d’information.