à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique
Remettre sur le marché locatif des logements inoccupés constitue un enjeu important de la politique du logement, que ce soit au niveau local ou régional.
Il y avait en Wallonie au 31 décembre 2011, 4606 logements publics inoccupés : 3 621 logements louables et 985 non louables, autrement dit des logements insalubres, vétustes et nécessitant des travaux lourds.
Monsieur le Ministre peut-il faire le point dans un premier temps sur les dispositifs régionaux existants pour diminuer le nombre de ces logements publics inoccupés ?
Si l'on dispose de chiffres pour le secteur public, il en va autrement du secteur privé. Tantôt on entend dire qu'il y aurait quelque 35 000 logements privés inoccupés sur le territoire wallon, tantôt il serait plutôt question de 15 à 20 000. De quelles données dispose-t-on pour le parc locatif privé ? Combien seraient réellement inoccupés en Wallonie ? Comment les identifier et comment inciter les propriétaires à les remettre en location ? L'identification est en effet à la base de toute politique efficace de remise sur le marché des biens privés inoccupés.
Certaines communes disposent d'un inventaire des immeubles privés abandonnés. Monsieur le Ministre sait-il combien de communes wallonnes disposent d'un tel inventaire ?
La « réquisition douce » prévoit que tout opérateur immobilier peut proposer au propriétaire de prendre le logement inoccupé en gestion ou en location. Ce mécanisme est-il souvent utilisé ?
Bien sûr tous les logements privés inoccupés ne sont pas louables rapidement et certains nécessitent même des travaux importants. Quand le logement est occupable rapidement, les causes de l'inoccupation peuvent être variées.
L'âge avancé des propriétaires qui ne veulent ou ne peuvent plus assumer la gestion locative ou ne peuvent obtenir un prêt pour réaliser les travaux, peut être une de ces causes. Qu'est-il fait pour inciter et accompagner les propriétaires plus âgés à remettre un bien en location ?
Dans d'autres cas, le coût des travaux requis pour remettre le bien en état freine les propriétaires et tous ne sont pas au courant des aides existant pour la rénovation. Qu'en est-il de l'information des propriétaires ?
Réponse du 21/10/2013
de NOLLET Jean-Marc
En ce qui concerne les logements publics tout d’abord, les programmes d’acquisition-rénovation intègrent pleinement la nécessité de lutter contre la vacance de logements dans le secteur privé ou parfois de certains logements acquis par les pouvoirs publics : * Les programmes d’ancrage communaux prévoient qu’à côté de la construction, l’un des modes opératoires de la création de nouveaux logements sociaux consiste en opération d’acquisition et réhabilitation ou restructuration d’immeubles existants. C’est ainsi que plusieurs immeubles inoccupés du patrimoine des pouvoirs locaux, des fabriques d’église, etc. peuvent être valorisés au travers de travaux de rénovation et affectés au logement public. La priorité est accordée à ce mode opératoire sur la construction neuve. Plus de 20 % des opérations retenues dans le cadre de l’ancrage 2012-2013 sont des opérations de rénovation d’immeubles existants. * Les programmes de rénovation du parc de logements publics (PEI, PIVERT) portent remède aux carences constatées dans les logements existants et permettent dès lors leur maintien ou leur remise en service locatif.
La question de l’identification et du dénombrement des logements inoccupés en dehors du secteur public est un problème récurrent et, jusqu’à présent, il faut reconnaître que les estimations varient fortement. C’est la raison pour laquelle une attention particulière est portée à cette problématique au niveau de l’ancrage communal. Dans le cadre des circulaires relatives aux ancrages 2012-2013 et 2014-2016, les communes ont été tenues d’actualiser leurs estimations et de les transmettre à l’administration. Pour une parfaite information, selon les informations qui m’ont été transmises par mon administration, 204 communes ont ainsi effectué un inventaire des biens inoccupés.
Je note par ailleurs qu’une proposition de décret modifiant le Code wallon du Logement et de l’Habitat durable et portant sur la détection des logements vides a été déposée au Parlement wallon. Sans m’immiscer dans le travail parlementaire qui est en cours, je pense que cette proposition est une réponse possible à la difficulté rencontrée par les communes d’inventorier avec précision les logements inoccupés.
Les dispositions relatives à la « réquisition douce » donnent de bons résultats quand elles sont mises en œuvre, comme c’est par exemple le cas à Namur et à Charleroi. À Namur, un courrier est envoyé à tous les propriétaires de logements abandonnés leur proposant, s’ils le souhaitent, une prise en gestion accompagnée le cas échéant de la prise en charge des investissements nécessaires. Quant à la ville de Charleroi, dans le cadre de cette procédure, les services communaux ont repéré 191 propriétaires dont un bien était inoccupé sans raison valable.
Il faut toutefois reconnaître que cette procédure est peu mise en œuvre car elle représente une arme « ultime » dans la lutte contre l’inoccupation. En effet, le premier instrument est la taxe sur les immeubles abandonnés qui est du ressort des communes. Les dispositions des articles 80 et suivants du Code wallon du Logement et de l’Habitat durable sont beaucoup plus contraignantes, et leur mise en œuvre nécessite la mobilisation de moyens non négligeables de la part de l’opérateur immobilier qui souhaite y faire appel.
Les soucis sont de plusieurs ordres : * La mise en œuvre de la procédure rencontre le plus souvent l’opposition du ou des titulaires de droits réels ; et chacun sait combien une action en justice qui dure est coûteuse, et il faut donc que l’opérateur soit à même d’en supporter les frais, voire de créer un service apte à assurer le suivi de telles opérations. * En admettant qu’il soit fait droit à la demande de réquisition, les immeubles abandonnés étant le plus souvent en mauvais état, l’opérateur doit donc trouver le(s) financement(s) pour pouvoir assurer la rénovation.
Pour faire face aux difficultés rencontrées par les opérateurs pour mobiliser des logements, j’ai mis en place une véritable politique structurelle.
Le 23 décembre 2010, le Gouvernement wallon a adopté deux arrêtés visant à favoriser le conventionnement des logements du secteur locatif privé au profit des ménages à revenus modeste ou précaire. Le premier arrêté vise des aides aux travaux afin de remettre sur le marché locatif privé des logements inoccupés. Ces aides sont constituées d’une subvention et d’une avance remboursable et peuvent atteindre jusqu’à 75.000 euros par logement pris en gestion. Le second arrêté est destiné à faciliter la prise en location par des familles nombreuses de logements adaptés à leur taille. Concrètement, cet arrêté prévoit le versement d’une aide à la location allant de 100 à 150 euros venant en déduction du loyer de familles nombreuses logées dans des logements de 3 chambres et plus. Ces deux arrêtés visent exclusivement les logements pris en gestion par des organismes à finalité sociale (Agences immobilières sociales et Associations de promotion du logement).
Dans ce domaine, plusieurs avancées importantes ont été engrangées au premier semestre 2013 par le biais de nouveaux arrêtés adoptés par le Gouvernement wallon : - les aides dont il est question ci-avant sont désormais également accessibles aux Sociétés de Logement de service public qui prennent des logements en gestion ; - les aides pour la réalisation des travaux peuvent désormais être obtenues pour tout bâtiment rénové et/ou transformé en logements. La précédente mouture de l’aide concernait uniquement les logements inoccupés depuis plus de 12 mois. - les aides à la location sont désormais accessibles à tous les nouveaux logements pris en gestion et non plus seulement les logements de 3 chambres et plus.
Une campagne d’information sur ces aides en faveur des propriétaires qui confient leur bien en gestion à une Agence immobilière sociale ou une association de promotion du logement a été organisée en 2012 par le Fonds du Logement. Je voudrais également mettre en avant la création d’une cellule d’accompagnement technicosocial au sein du Fonds du Logement dont le rôle est d’accompagner les propriétaires et faciliter la rénovation de biens immobiliers pris en gestion par les Organismes à Finalité sociale.
En conclusion, je crois pouvoir dire que la combinaison de mesures incitatives et dissuasives offre aux communes et aux opérateurs en général une palette d’outils tout à fait intéressante pour lutter contre l’inoccupation.