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Les gains financiers engendrés par l'éolien pour la Wallonie

  • Session : 2013-2014
  • Année : 2013
  • N° : 152 (2013-2014) 1

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  • Question écrite du 08/11/2013
    • de STOFFELS Edmund
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    Je me réfère à un article paru récemment dans le journal l'Écho et dans lequel Monsieur le Ministre annonçait que l'éolien va faire gagner 1 milliard à la Wallonie.

    À la lecture, Monsieur le Ministre semble jongler avec les chiffres, mais force est de constater que s'il en cite quelques-uns, il en contourne d'autres.

    L'objectif est connu : produire 3.800 GWh d'ici 2020 avec des éoliennes.
    Le coût cumulé jusqu'en 2035 : 3,165 milliards avec, en termes de CV avec 0,9 euro par MWh, ou de 3,4 milliards avec 1 euro/MWh.
    Et ce avec un scénario comparatif par rapport au gaz.

    Il est légitime de se poser la question de savoir si cette comparaison est réellement pertinente, vu le caractère intermittent de l'éolien ? N'est-on pas en train de comparer des pommes et des poires ? En effet, est-il judicieux de comparer un scénario de transition (donc limité dans le temps) avec un scénario à long terme ?

    Ainsi, Monsieur le Ministre mentionne « Il faut par ailleurs rajouter le coût du CO2. À 4 euros la tonne de CO2, le coût du gaz progresse de 122 millions d'euros, à 3,950 milliards d'euros. C'est très clair, l'éolien permet de dégager un bénéfice entre 800 millions (avec un certificat vert à 0,9 euro) et 548 millions d'euros (avec un certificat vert à 1 euro) ».

    Cela semble évident que si le coût de la tonne CO2 augmente, le différentiel va encore être plus attractif. On aura donc compris : pour que le scénario qui plait à Monsieur le Ministre soit attractif et convainquant, il faut choisir à titre de comparaison un scénario sombre et inquiétant.

    Plus Monsieur le Ministre noircit le scénario de comparaison, plus le sien sera éblouissant. Mais ne faudrait-il pas inclure dans ses calculs les conséquences budgétaires du caractère intermittent de l'éolien : les besoins d'Elia et des distributeurs en matière d'investissement dans le renforcement du réseau ?

    L'estimation s'élèverait à un milliard dans une perspective rapprochée rien que pour l'adaptation du réseau. À long terme, on dépassera même le milliard. De plus, quid de l'impact budgétaire pour la mise en place d'un réseau intelligent ? Certes, ce n'est pas dû au seul éolien, mais l'éolien représente près de 50 % dans le scénario retenu d'ici à 2020.
    Pourquoi ne pas être complet dans ses comparaisons ?

    Monsieur le Ministre ne lui semble-t-il pas que son argumentaire est construit sur une "demi-vérité" ?

    En effet, le renouvelable ne représente pas actuellement l'optimum économique, son raisonnement est dès lors biaisé car le renouvelable seul est intenable.

    Pour cette même raison, sa comparaison entre le coût cumulé de la production d'électricité jusqu'en 2020 avec soit de l'éolien, soit du gaz n'apparait pas comme des plus pertinentes a-t-il estimé le montant des investissements nécessaires qui devront être ? Comme les certificats verts - relayés sur la facture du citoyen ? Dispose-t-il de chiffres précis ? Dans l'affirmative, quels sont-ils ? Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : je suis favorable à l'éolien public. Je l'ai dit à Monsieur le Ministre à maintes reprises.

    La question ne se résume pas simplement à être « favorable ou contre » l'éolien, il s'agit de savoir quand, comment et dans quelles conditions et avec quelles conséquences faut-il mettre en place la politique du renouvelable. Monsieur le Ministre ne pense-t-il pas que les citoyens aient droit à un parler-vrai avec les enjeux futurs mais aussi l'impact financier réel sur leurs factures ?
  • Réponse du 02/12/2013
    • de NOLLET Jean-Marc

    Je constate que l'honorable membre a pris connaissance avec attention de la comparaison entre le coût du soutien à l’éolien et les bénéfices que l’on peut en retirer sur la diminution de la facture de combustibles fossiles et de CO2, et je m’en réjouis. Cette discussion me paraît effectivement plus pertinente que le seul focus sur le coût de l’éolien que certains de ses collègues semblent préférer.

    La comparaison entre le coût du gaz et le coût du soutien à l’éolien est pertinente, car l’éolien vient en substitution des centrales au gaz comme le confirme l’administration. La production éolienne varie selon l’intensité du vent. Lorsque le vent est favorable, les éoliennes produisent une électricité propre et permettent ainsi de réduire en temps réel la production électrique des centrales au gaz et au charbon – deux combustibles fossiles responsables de gaz à effet de serre.

    Lorsque le vent diminue, les éoliennes ralentissent ou s’arrêtent temporairement et la production électrique classique retrouve son taux d’émission de CO2 initial. Les gestionnaires d’équilibre belges ne considèrent pas l’éolien comme une puissance installée pour laquelle il faut prévoir un back up en cas de défaillance, mais plutôt comme une demande d’électricité qui diminue quand le vent souffle, et qui revient à la normale lorsqu’il ne souffle pas.

    Il ne faut pas pour autant extrapoler le raisonnement en affirmant que le renouvelable seul doit être visé. Tout le monde s’accorde pour dire que dans le cadre de la transition énergétique, les renouvelables et les centrales performantes au gaz sont complémentaires ; il ne s’agit donc pas d’opposer l’un à l’autre. Le problème majeur actuel pour l’intégration des centrales au gaz sur le marché de l’électricité est double : l’inflexibilité des centrales nucléaires devant fonctionner en base load et le faible coût de l’électricité produite à partir de centrales au charbon.

    L'honorable membre estime que je ‘noircis le scénario’ en rajoutant le coût du CO2. J’ai justement voulu éviter cet écueil en prenant comme hypothèse un coût du CO2 très faible, à savoir le prix qui était constaté ces derniers mois sur le marché de la tonne de CO2. À cet égard, il est plausible que le coût réel du CO2 augmente ces prochains mois, suite notamment à la décision récente de la Commission européenne en matière de quotas de CO2.

    L'honorable membre évoque ensuite le coût de l’intégration du renouvelable sur les réseaux. Je n’ai jamais tu que la question de l’intégration croissante du renouvelable (éolien et solaire essentiellement) dans le mix énergétique était un enjeu majeur pour les réseaux dans le cadre de la transition énergétique. Mais la rénovation des réseaux est une nécessité vu le faible niveau d’investissement que l’on connaît depuis plusieurs décennies. Et n’oublions pas que la production décentralisée engendre pour les gestionnaires de réseau de distribution des gains, puisqu’ils doivent moins prélever de l’électricité sur le réseau de transport. Enfin, la mise en œuvre des réseaux intelligents vise justement à limiter les coûts d’adaptation des réseaux, par le biais notamment de l’activation de mesures de gestion active de la demande et l’accueil flexible sur le réseau.

    Enfin, j’ai déjà pu répondre à de nombreuses reprises sur l’impact des certificats verts sur la facture des consommateurs à l’occasion de questions parlementaires à ce sujet.