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La norme sectorielle concernant le bruit émis par les parcs éoliens

  • Session : 2013-2014
  • Année : 2013
  • N° : 248 (2013-2014) 1

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  • Question écrite du 05/12/2013
    • de EERDEKENS Claude
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Le projet de cadre éolien soumis récemment à enquête publique fait expressément référence à une norme sectorielle de bruit à créer.

    II semblerait que ladite norme sectorielle soit actuellement en préparation puisqu'elle fait l'objet de l'avant-projet 828 donné en première lecture au Gouvernement wallon le 14 novembre. Cette norme sectorielle n'existe donc pas encore formellement.

    Il est alors curieux que les chiffres (en dBA) que Monsieur le Ministre souhaite voir inscrits dans cette future norme se trouvent déjà bel et bien dans le texte du cadre éolien soumis récemment à enquête publique avec la carte « positive ».

    Il est curieux de constater que les promoteurs éoliens eux-mêmes citent cette future norme sectorielle dans des études d'incidences complémentaires requises suite à l'arrêt Dumont (Conseil d'État).

    Il est curieux que ces promoteurs soient mis au courant de ladite norme avant que celle-ci ait été soumise à enquête publique.

    En conséquence, les questions suivantes sont posées à Monsieur le Ministre.

    1. Est-il exact que Monsieur le Ministre veut, par ce biais, relever le niveau nocturne de 40 à 45 dBA, ce relèvement pouvant avoir un caractère saisonnier ?

    2. Quelle est la raison qui justifierait ce relèvement alors que le rapport établi par ICA à la demande de la Région wallonne (rapport que Monsieur le Ministre n'a communiqué publiquement à des citoyens légitimement demandeurs que sous la pression de la Commission des recours administratifs) et celui du Conseil supérieur de la santé signalent très clairement que la sensibilité au bruit éolien est nettement supérieure à celle relative aux autres bruits tels que ceux issus du trafic routier ou ferroviaire?

    3. Dans ce cas, pour quelles raisons Monsieur le Ministre prépare-t-il une norme dangereuse pour les riverains et permissive pour les promoteurs de parcs éoliens ?

    4. N'est-il pas imprudent, tant sur le plan de la santé publique que sur le plan légal, que les fondements de cette proposition soient basés sur la seule étude d'ICA, laquelle n'a fait l'objet d'aucun consensus technique autre que celui venant de la Région wallonne, juge et partie en la matière?

    5. Le parlement devrait avoir accès à l'étude ICA. Pourquoi n'est-ce pas le cas puisque celle-ci a été déposée au SPW en octobre 2012 ?

    6. Pourquoi, par l'adoption de cette norme, la Belgique se différencierait-elle des pays comme l'Allemagne (où sont actuellement en service plus de 20 000 éoliennes) qui limitent le niveau nocturne à 40 dB, ceci en accord avec les recommandations de l'OMS?

    7. N'est-il pas hautement imprudent d'établir une telle norme alors que l'étude ICA sur laquelle elle est basée prévoit des dépassements pendant 8 % du temps du niveau de 43 dB ... à une distance des éoliennes non spécifiée?

    8. Puisque le rapport ICA déjà cité et les mesures certifiées de «Vent de Raison» mettent sans conteste en évidence les dépassements sonores de tous les parcs actuellement en service ayant fait l'objet d'investigations détaillées, quelles mesures Monsieur le Ministre envisage-t-il pour corriger immédiatement cette situation?

    9. Comment le projet de normes tient-il compte des conclusions du même rapport ICA concernant l'inadéquation actuelle de la modélisation ex ante de la propagation du bruit issu des éoliennes ? Cette défaillance des modèles mathématiques crée une sous-estimation du niveau sonore pouvant aller jusqu'à 8 dB, ce qui constitue de facto une tromperie des autorités devant juger du bien-fondé des projets de parcs éoliens, autorités qui sont techniquement incapables de vérifier la validité des résultats des calculs qui leur sont présentés.

    10. On pourrait penser que, par ce biais, Monsieur le Ministre envisage de légaliser les parcs qui actuellement sont, pour la plupart, sinon tous, en infraction. Cette possibilité est bien sûr inacceptable. Est-ce le cas?

    11. On pourrait aussi penser que, par ce biais, Monsieur le Ministre souhaite promouvoir l'installation de nouveaux parcs éoliens, sans autre considération pour les riverains que celles qui lui ont été imposées soit par le Conseil d'État sur requête des riverains lésés, soit par les mesures de bruit techniquement certifiées et réalisées à leurs frais par ces mêmes riverains? Est-ce le cas ?
  • Réponse du 13/01/2014
    • de HENRY Philippe

    Le cadre de référence, tel qu’adopté par le gouvernement le 11 juillet 2013, ne mentionne aucun chiffre, contrairement à ce qu’affirme l’Honorable Membre, puisqu’il renvoie à un arrêté portant conditions sectorielles à ce sujet. L’étude d’incidences environnementales de la cartographie mentionne, elle, bel et bien des chiffres. Cette étude a étudié les impacts environnementaux, dont ceux liés au bruit et émet des recommandations.

    Le gouvernement s’est inspiré des recommandations de ces experts pour définir les normes à respecter en matière de bruit pour les éoliennes.
    Il n’est nullement curieux que les promoteurs éoliens soient au courant du projet de norme avant que celle-ci ne soit adoptée. En effet, quel que soit le type de projet de texte réglementaire, il est coutume de consulter, préalablement à la première lecture par le Gouvernement wallon, les instances, services administratifs, commissions, fédérations et secteurs concernés par le texte en projet. Il s’agit d’entendre les remarques formulées et d’en tenir compte si cela se justifie, mais en aucune manière d’obéir à un lobby.

    D’autre part, la législation ne prévoit pas de consultation du public pour les projets d’arrêtés d’exécution du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement.

    Voici les réponses aux onze questions précises posées par l’honorable Membre.

    1. Il est exact que le projet de conditions sectorielles pour les parcs éoliens, adopté en première lecture le 28 novembre 2013, fixe la norme de niveau de bruit nocturne à la valeur de 43 dBA, sauf lorsque la température dépasse 16 ° à 22 heures durant les nuits d’été, pour lesquelles la norme est ramenée au niveau maximum de 40 dBA. C’est, en effet, durant ces nuits que les riverains sont les plus susceptibles d’ouvrir leurs fenêtres.

    2. L’étude ICA fait la proposition d’une norme de 45 dBA, applicable à un paramètre spécifiquement défini dans cette étude. Ramenée au niveau continu équivalent dss conditions générales, cette proposition devient 43 dBA, valeur choisie hors conditions nocturnes estivales.
    Le Conseil supérieur de la Santé rappelle que le bruit des éoliennes est plus gênant que les bruits issus du trafic routier ou ferroviaire.  La valeur de 43 dB en tient compte. En effet, la directive européenne 2002/49/CE, relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement, qui concerne essentiellement les bruits des infrastructures de transport, ne demande de cartographier les niveaux de bruit Lnight qu’à partir de 50 dBA. Ceci indique clairement que, pour cette directive qui est le fondement de la politique européenne en matière de bruit, les expositions inférieures à Lnight 50 dBA ne sont pas préoccupantes.
    Je rappelle à l’honorable  Membre que le Lnight est une moyenne sur toutes les nuits d’une année entière. Or la norme de 43 dBA pour le LAeq des éoliennes permettra largement de respecter un Lnight de 40 dBA.

    3. La norme proposée n’est pas dangereuse pour les riverains. Elle est plus sévère que la recommandation 2009 de l’OMS pour les bruits nocturnes.  Cette marge de sécurité tient compte de la gêne supplémentaire du bruit éolien.
    La norme proposée n’est pas permissive pour les promoteurs éoliens. La limite effective appliquée jusqu’à présent, en fonction du cadre de référence 2002, était de 43 à 44 dBA. La nouvelle limite est de 43 dBA en général, 40 les nuits les plus chaudes.
    Il y a donc une protection augmentée par rapport au cadre 2002.

    4. Les fondements de la proposition de conditions sectorielles ne reposent pas uniquement sur l’étude ICA, mais également sur :
    - la comparaison avec d’autres législations étrangères;
    - la directive européenne 2002/49/CE;
    - les Guidelines for Community Noise de l’OMS de 1999;
    - les Night Noise Guidelines for Europe de l’OMS de 2009
    - les conditions générales d’exploitation applicables aux établissements soumis à permis d’environnement;
    - les études récentes spécifiques au bruit éolien;
    - l’avis du Conseil supérieur de la santé;
    - le rapport d’incidences sur l’environnement consécutif à la publication du projet de cartographie de l’éolien en Wallonie;
    - les impératifs de production d’énergie renouvelable.

    5. L’étude est disponible pour toute personne qui en fait la demande auprès de mon Administration ou de mon Cabinet.

    6. À part l’Allemagne, plusieurs pays ont fixé une limite à 45 dBA. Le choix de la combinaison 43/40 nous paraît être une moyenne très raisonnable et en accord avec les recommandations de l’OMS.

    7. La norme proposée ne prévoit pas de dépassements possibles.

    8. Les parcs en fonctionnement ne sont pas visés par le projet de conditions sectorielles. Depuis deux ans, tous les permis accordés imposent une campagne de contrôle acoustique après la mise en service du parc. Il y a donc une volonté marquée d’assurer une meilleure surveillance de l’existant.
    9. Le projet ne contient pas encore de dispositions harmonisées pour la réalisation des études prévisionnelles. En effet, je souhaite que les propositions du bureau d’I.C.A soient confrontées au préalable aux observations de la communauté scientifique.

    10. Les parcs existants restent soumis aux conditions imposées dans leur permis.

    11. Je souhaite promouvoir l’installation de nouveaux parcs éoliens, dans le respect du projet de conditions sectorielles, lesquelles tiennent compte de tous les avis et études citées ci-dessus, de manière à protéger au mieux les riverains.