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L'impact du verdissement de l'électricté et de la tarification progressive solidaire et familiale sur les factures énergétiques en Wallonie

  • Session : 2013-2014
  • Année : 2014
  • N° : 348 (2013-2014) 1

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  • Question écrite du 26/02/2014
    • de STOFFELS Edmund
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique
    En 2012, 178.128 clients actifs en électricité, soit 12 % des clients, présentaient une dette moyenne de 229 euros, soit au total 40,7 millions d'euros. Pour le secteur gaz, les clients en retard de payement sont de l'ordre de 74.692 (13 % ) avec une dette moyenne de 298 euros, soit au total 22,2 millions d'euros.

    Du côté des clients inactifs, ils sont pour l'électricité au nombre de 149.008 (avec une dette moyenne de 530 euros soit au total 78,9 millions d'euros) et pour le gaz au nombre de 79.626 (avec une dette moyenne de 637 soit au total 79,6 millions d'euros).

    Cela fait au total pour l'électricité 330.000 clients en retard de paiement et pour le gaz 154.000 clients - en ce compris les clients protégés en vertu d'un règlement régional, à savoir les clients en médiation de dettes présentant une situation financière particulièrement difficile.

    Le retard de paiement déclenche une série de réactions, à commencer par un rappel (563.000 clients actifs ayant reçu un rappel en 2012, soit 38 % pour l'électricité) (217.246 clients ayant reçu un rappel en 2012 pour le gaz, soit 14.2 % des clients actifs). Même si les chiffres sont en baisse par rapport à 2011, ils restent encore interpellants. Le rappel est généralement suivi d'une mise en demeure, si le paiement continue à tarder, et se prolonge vers une déclaration de défaut de paiement.

    Le nombre de déclarations de défaut de paiement s'élève pour 2012 à 87.850 clients pour l'électricité et à 46.000 pour le gaz – ce qui représente une nette progression comparé aux années d'avant. La précarité énergétique est donc en train de gagner du terrain, et ce, de façon significative. Parmi ces clients on retrouve une proportion de plus en plus importante de clients protégés et de ménages qui disposent d'un revenu précaire et modeste.

    L'étape ultime du processus culmine dans le placement d'un compteur à budget. En effet, dans le cas où le client est déclaré en défaut de payement, le fournisseur demande le placement d'un compteur à budget chez le gestionnaire des réseaux de distribution (GRD) du client. En 2012, il y avait 88.400 clients équipés d'un compteur à budget pour l'électricité et 44.000 pour le gaz.

    Du côté électricité, 14 % ont une dette entre 500 et 1.000 euros et 12 % au-delà de 1.000 euros - soit un quart des 88.400 ménages qui ont une dette sérieuse comparé à leur revenu. 1.000 euros représente une consommation électrique de 4.500 KWh (calculé sur base de la moyenne de 0.22 euros par KWh), soit une consommation au-delà du point neutre du système TPSF. Peut-on légitimement estimer que la dette cumulée en électricité ne remonte, en moyenne, pas plus à une année – vu les délais moyens entre le rappel, la mise en demeure, la déclaration de défaut de payement et le placement d'un compteur à budget. De plus, il est fort probable que les clients ayant une dette importante en électricité se retrouvent aussi assez souvent parmi les clients endettés pour le gaz, où nous avons 18.7 % des clients avec un dette de 500 à 1.000 euros et 15.3 % de clients avec une dette au-delà des 1.000 euros.

    En d'autres termes, il y a en Wallonie des milliers de ménages qui ont déjà une dette énergétique importante du fait qu'ils sont déclarés en défaut de paiement.

    Ce constat ne risque-t-il pas de s'aggraver avec la politique actuelle de verdissement de l'électricité et avec la mise en place du système TPSF ?

    Comment Monsieur le Ministre analyse-t-il cette situation? Dispose-t-il d'une analyse transversale et du coût-optimum pour le développement des énergies renouvelables en Wallonie? Quelle est l'évolution de la précarité énergétique en Wallonie sous cette législature?

    Monsieur le Ministre a-t-il évalué l'impact global des différentes politiques énergétiques développées en Wallonie sur la facture des citoyens ?
  • Réponse du 13/03/2014
    • de NOLLET Jean-Marc

    L’évolution de la précarité énergétique est liée à l’évolution de la précarité de manière globale. En Wallonie, une personne sur cinq se trouve en situation de risque de pauvreté. Selon l’étude sur la précarité en Belgique réalisée par l’ULB et l’Université d’Anvers, entre 1999 et 2009, la part du revenu du ménage consacrée à l’énergie est passée de plus de 13 % à plus de 14 % pour les ménages correspondant au premier décile de revenus. Le taux de risque de pauvreté en Wallonie est quant à lui passé de 17 % en 2004 à 19,2 % en 2011. Les problèmes de pauvreté ne sont donc, hélas, pas l’apanage des politiques énergétiques.

    En ce qui concerne ce secteur spécifiquement, la politique menée depuis le début de cette législature vise à réussir la transition énergétique vers un modèle à même de fournir des services énergétiques durables, sûrs et compétitifs pour tous, qui protège les citoyens comme les entreprises des fluctuations incontrôlables des prix, qui garantisse la pérennité de l'approvisionnement et dont la composition a le moins d'impact possible sur notre climat et notre environnement. Pour ce faire, cette politique se décline en trois axes: consommer moins ; consommer et produire mieux ; et enfin produire autrement.

    En ce qui concerne le premier axe « consommer moins », l’impact des mesures est direct et durable dans le portefeuille du citoyen, pour le monde de la construction et pour la planète. Dans ce cadre, différents outils sont mis à dispositions des citoyens pour réaliser de meilleurs choix : conseillers énergie, tuteurs énergie, guichets de l’énergie, simulateurs… Par ailleurs, les primes Energie ont quasiment été doublées et majorées pour les consommateurs précaires et modestes. Avec un budget total primes et écopack de 550 millions euros sous cette législature, ce sont plus de 380.000 ménages qui sont soutenus dans leurs efforts de réduction de leur consommation et, par-là, de leur facture d’énergie.

    La tarification progressive, solidaire et familiale de l’électricité s’inscrit pleinement dans cet axe. De nombreuses réponses ont déjà été fournies quant à son impact pour les ménages. Comme expliqué à diverses occasions, l’objectif est de renverser la tendance actuelle de diminution du prix du kWh avec l’augmentation de la consommation qui implique que les petits consommateurs payent leur kWh nettement plus cher que les gros consommateurs. Par l’octroi d’une allocation correspondant à l’octroi d’un certain volume de consommation, variable en fonction de la composition du ménage, la TPSF va réduire les prix pour les petits consommateurs et ainsi rendre la tarification plus équitable et plus sociale considérant le lien étroit entre consommation électrique et revenus des ménages relevés par diverses études.

    Insérée il y a de nombreuses années dans le décret électricité, inscrite dans la déclaration de politique régionale, désormais adoptée par le Gouvernement wallon, la tarification progressive de l’électricité constitue une avancée importante de cette législature en termes de politique sociale et de politique environnementale en Wallonie appliquée au secteur de l’énergie.

    L’impact sur la facture individuelle dépend de la composition du ménage et de sa consommation. D’après l’étude réalisée récemment, la tarification progressive aura un impact positif sur la facture pour environ 64 % des ménages. Ainsi, une personne isolée consommant 600 kWh verrait sa facture diminuer d’environ 84 euros. La facture d’un ménage de 2-3 personnes consommant 4.250 kWh augmenterait de 27euros. Un ménage de 4 personnes ayant une consommation de 3.750 kWh verrait sa facture diminuer de quelques 19euros. Tandis que pour un ménage de minimum sept personnes ayant une consommation de 7.500 kWh, elle augmenterait de 70euros. Par contre, la facture des bénéficiaires du tarif social diminuera d’environ 184euros quelle que soit la composition du ménage.

    L'honorable membre m’interroge également sur le développement des énergies renouvelables. Il s’agit de l’axe « autrement » de la politique menée sous cette législature. Plusieurs études ont été réalisées en Wallonie pour déterminer un mix d’énergies renouvelables optimal à l’horizon 2020. On peut notamment citer l’ICEDD (2010), qui a réalisé une expertise sur le potentiel technico-économique des différentes filières renouvelables, et l’étude de CapGemini (2010-2011) sur les scénarii de déploiement possibles des filières renouvelables à l’horizon 2020. Plus récemment, une expertise a été confiée à 3E pour adapter au mieux le niveau de soutien aux différentes filières renouvelables, et la CWaPE remet ces jours-ci une proposition de méthodologie pour la détermination des nouveaux taux d’octroi pour les filières d’électricité verte.

    Ces différentes études pointent l’importance d’un mix équilibré d’énergies renouvelables, où toutes les filières sont appelées à se développer à l’horizon 2020, mais à des rythmes différenciés en fonction des critères suivants :
    * Potentiel plus important, notamment socio-économique (biomasse, éolien)
    * Bon rapport coût/efficacité (grand éolien)
    * Continuation d’un secteur qui s’est développé (PV)
    * Critères de durabilité.

    Les objectifs et trajectoires décidés par le Gouvernement s’inspirent largement des conclusions de ces études et des nombreuses concertations menées avec les secteurs concernés.

    L’impact global sur la facture des citoyens de la politique énergétique wallonne menée autour de ces 3 axes, moins, mieux et autrement, peut être analysé au travers des monitorings réguliers réalisés par les régulateurs – la CREG et la CWaPE – qui analysent et commentent semestriellement l’évolution des prix de l’énergie pour le secteur résidentiel. Alors que le surcoût, sur la facture, des différentes politiques énergétiques menées y est bien identifié (dans les éléments relatifs à l’évolution des OSP), il n’y a malheureusement pas d’étude permettant de comparer quel serait l’évolution de la facture en l’absence des politiques menées dans ce cadre. Tout au plus puis-je renvoyer l'honorable membre vers les différentes études et communications réalisées quant à l’impact à la baisse des énergies renouvelables sur le prix de gros de l’électricité. Ainsi, la CREG a chiffré l’économie engendrée par la production photovoltaïque en Belgique, selon les scénarios analysés, entre 42 et 59 millions d’euros en 2012.