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Les coupes à blanc.

  • Session : 2004-2005
  • Année : 2004
  • N° : 3 (2004-2005) 1

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  • Question écrite du 01/10/2004
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Polémique à propos d'une coupe à blanc de 300 hectares

    Dans son édition du 8 septembre 2004, le journal “Le Soir” titrait : “Controverse sur les mises à blanc”. Dans son édition du 7 septembre 2004, le journal “La Meuse” titrait : “Une saignée de 300 hectares en forêt. La DNF se défend : “C'est tout le massif qui y gagnera”.

    Selon la presse, M. Michel Letocart, président de l'association “Prosylvia” et directeur pensionné de la DNF de Malmédy, est formel. Il est cité avec les propos suivants : “On se désole de voir l'ouragan dévaster 300 hectares de forêt, mais, ici, on ferme les yeux. On va finir par tondre l'Ardenne. C'est scandaleux, inadmissible”.

    Par ailleurs, il s'étonne que Monsieur le Ministre n'intervient pas pour - je cite à nouveau - juguler pareille hémorragie.

    Le directeur concerné réplique que la loi interdisant les coupes dépassant les 25 hectares n'est pas d'application parce que la topographie du terrain est telle que le risque d'une érosion n'existe pas. Et il propose de replanter 55 % des feuillus et 45 % de résineux, soit seize espèces différentes.

    Nous voilà posés devant un débat de fond. Je cite le directeur : “Aujourd'hui, la fonction écologique d'une forêt passe avant sa fonction économique”.

    Est-il nécessaire que les deux fonctions d'une forêt soient le point de départ d'une confrontation polémique ? Ou y a-t-il moyen de renforcer progressivement la fonction écologique tout en sauvegardant la fonction économique qui, à nos jours, n'est pas uniquement déterminée par la monoculture de bois mais aussi, par exemple, par l'attraction touristique - autre fonction économique d'une forêt plus diversifiée sur le plan biologique ?

    Est-il préférable de procéder selon la méthode préconisée par l'ancien directeur, c'est-à-dire par des coupes à blanc de surfaces importantes, ou est-il préférable d'opter pour des mises à blanc moins larges, par exemple par bandes successives de 50 à 100 mètres de large, tel que proposé par la Société royale forestière de Belgique ?

    L'exemple faisant jurisprudence - si je peux m'exprimer ainsi - je souhaiterais connaître la position de Monsieur le Ministre à cet égard. Elle est importante parce qu'elle va orienter la politique

    d'investissement dans la forêt, notamment des propriétaires privés et publics qui sont, d'une part, les communes et, d'autre part, la Région wallonne.

    Je souhaiterais également connaître, dans l'hypothèse où de telles coupes à blanc massives se répètent, l'effet d'une telle politique sur le prix du bois au mètre cube. En d'autres termes, sur une partie des recettes communales de bon nombre d'entités locales.
  • Réponse du 25/10/2004
    • de LUTGEN Benoît

    C'est la loi du 28 décembre 1931 relative à la protection des bois et des forêts appartenant à des particuliers qui réglemente actuellement la pratique des coupes à blanc. Le Ministre peut exercer un droit d'opposition à une coupe excessive, mais ce droit doit être justifié par un dépassement de surface de 25 hectares en résineux et de 10 hectares en feuillus et par la nécessité :

    - de maintenir les terres sur les hauteurs et sur les pentes;
    - de défendre le sol contre les érosions et les envahissements des eaux;
    - d'assurer le défense du territoire;
    - de sauvegarder l'hygiène et la stabilité publiques;
    - de maintenir les sources.

    Force est de constater que le cas présent ne répond pas à ces critères.

    Dans cette problématique, la ligne de conduite suivie par la Division de la nature et des forêts dans les bois soumis est reprise dans la circulaire du 22 septembre 1997 sur les plans d'aménagement forestier. La surface maximale de coupe à blanc est comprise entre 50 ares et 2 hectares en relation avec la protection des sols et de l'eau (sols de pente, zones le long des cours d'eau, sols hydromorphes, proximité des zones de source et des puits de captage). La dépêche du 30 octobre 2003 prévoit que, dans les autres zones, la surface des coupes à blanc ne peut dépasser 5 hectares sauf dérogation (peuplements âgés sur de grandes surfaces qu'il est nécessaire de régénérer rapidement ou motif de conservation de la nature, notamment pour la protection du traquet pâtre ou de l'engoulevent, ...).

    La DNF poursuit également des pistes de sylviculture économique plus proche de la nature, de type Pro Silva, de façon à éviter la pratique de coupes à blanc tout en favorisant la régénération naturelle. Plusieurs cantonnements vont tester la méthode.

    Actuellement, l'inventaire permanent des ressources forestières, instauré par le décret du 16 décembre 1995, nous informe que la surface moyenne des coupes à blanc en peuplement d'épicéas est de 3,1 hectares en bois soumis et de 4 hectares en bois privé.

    En fonction des conditions de la loi du 28 décembre 1931, bon nombre de coupes excessives ne peuvent actuellement être interdites. Il est donc urgent que, dans le cadre de révision du Code forestier, une mesure simple et facilement applicable soit prévue pour interdire la pratique de grandes coupes à blanc. Il est à noter d'ailleurs que celles-ci, par effet de dominos, provoquent d'autres coupes à blanc chez les propriétaires voisins.

    Pour revenir à la coupe de Luchy, j'ai demandé au propriétaire de fournir un plan de gestion où apparaît clairement un objectif d'installation d'espèces diversifiées après la coupe du peuplement monospécifique d'épicéas. Cet objectif devrait à la fois allier les points de vue économique, écologique et même d'attrait touristique pour la région.

    Enfin, en ce qui concerne l'impact des grandes coupes à blanc sur le marché du bois, celles-ci ne doivent pas être encouragées, comme il en est fait mention ci-dessus; l'impact reste toutefois extrêmement limité car le marché du bois est un marché mondial. Dans ce cadre, les prélèvements

    en Région wallonne n'y représentent qu'un très faible pourcentage et ne peuvent qu'avoir une incidence très locale.