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Le financement complémentaire des cultes et de la laïcité par les communes

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2014
  • N° : 41 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 09/10/2014
    • de HAZEE Stéphane
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    La législation prévoit que le financement de certains cultes reconnus incombe aux communes. Ainsi, l’article 1321-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation dispose que le Conseil communal est tenu de porter annuellement au budget des dépenses toutes celles que les lois mettent à la charge de la commune et spécialement, notamment, les secours aux fabriques d’église et aux consistoires, conformément aux dispositions existantes sur la matière, en cas d’insuffisance constatée des moyens de ces établissements ou l’indemnité de logement des ministres des cultes, conformément aux dispositions existantes, lorsque le logement n’est pas fourni en nature.

    La législation dispose par ailleurs que le financement des autres cultes reconnus et de la laïcité incombe aux provinces, pour ce qui concerne le déficit des établissements cultuels, les travaux aux édifices des cultes et des maisons de la laïcité ou le logement des ministres des cultes.

    Il s’agit de dépenses légalement obligatoires pour les pouvoirs locaux concernés.

    À côté de la prise en charge de ces dépenses obligatoires, il arrive que certaines communes interviennent, de façon complémentaire au financement provincial obligatoire, en faveur de certains cultes reconnus ou de la laïcité.

    Quand une commune décide d’assumer un tel financement complémentaire à l’égard d’une communauté confessionnelle ou non confessionnelle, est-elle tenue, au nom du principe d’égalité, d’assurer une même démarche à l’égard des autres cultes reconnus ou de la laïcité, dont le financement obligatoire est pris en charge par la Province ?
  • Réponse du 27/11/2014
    • de FURLAN Paul

    Si une commune décidait d’assumer un financement complémentaire à l’égard d’une communauté confessionnelle ou non confessionnelle vis-à-vis de laquelle les provinces sont légalement tenues d’intervenir, il serait effectivement requis, au nom du principe d’égalité, qu’elle assure une même démarche, c’est-à-dire qu’elle réserve des moyens financiers ou matériels identiques, à l’égard des autres cultes reconnus ou de la laïcité dont le financement est également pris en charge par la province. En effet, si une commune n’agissait pas de la sorte, elle révélerait des préférences confessionnelles, ce qui est inadmissible.

    Cela dit, je n’ai encore jamais été amené à contrôler un acte par lequel un conseil communal octroie une subvention à un établissement cultuel financé par la province ou à son pendant au niveau laïc, c’est-à-dire un établissement chargé de la gestion des intérêts matériels financiers de la communauté philosophique non confessionnelle reconnue. En conséquence, je n’ai dès lors pas eu l’occasion d’examiner cet acte à la lumière des considérations développées ci-avant.

    Concrètement, les seuls actes qui m’ont été soumis sont des actes par lesquels les communes (voire également les provinces) octroient, de façon directe ou indirecte, des subventions à des maisons de la laïcité. Or, les maisons de la laïcité ne rentrent pas dans le champ d’application de la loi du 21 juin 2002 relative aux établissements chargés de la gestion des intérêts matériels et financiers des communautés philosophiques non confessionnelles reconnues.

    En effet, l’article 4 de la loi en question dispose que :
    - les communautés philosophiques non confessionnelles sont reconnues par le Roi (une par province et deux pour l’arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale) ;
    - le Roi reconnait les services d’assistance morale et en fixe le nombre sur le ressort territorial concerné ;
    - dans le chef-lieu de chaque province, il est établi un établissement de droit public appelé « établissement d’assistance morale du Conseil central laïque » ;
    - l’établissement est chargé de la gestion des intérêts matériels financiers de la communauté philosophique non confessionnelle reconnue et des services d’assistance morale reconnus qui se situent sur le territoire concerné.

    D’autre part, l’article 27 de la même loi précise les charges philosophiques d’assistance morale qui sont admissibles au niveau des établissements précités, et l’on peut voir que les frais de fonctionnement des maisons de la laïcité ne sont pas envisagés à ce sujet.

    Sachant encore qu’actuellement, 44 services d’assistance morale ont été reconnus par le Roi, et que le nombre de maisons de la laïcité situées sur le territoire de la Wallonie est supérieur à ce dernier. Cela confirme donc bien que les maisons de la laïcité ne peuvent être confondues avec les services d’assistance morale reconnus.

    Cela dit, pour revenir plus précisément à la question, je pense qu’il est possible de poser le principe d’égalité qu'évoque l'honorable membre comme suit : « il n’est pas concevable que l’État puisse considérer une prétendue valeur intrinsèque de la religion ou de la philosophie considérée, pour ne financer que celle qui aurait, selon lui, une valeur particulière, à l’exclusion des autres ».

    Concrètement, cela confirme les éléments que j’ai formulés ci-avant : si une commune décide d’assumer un financement complémentaire à l’égard d’une communauté confessionnelle ou non confessionnelle vis-à-vis de laquelle les provinces sont légalement tenues d’intervenir, elle doit assurer une même démarche à l’égard des autres cultes reconnus ou de la laïcité dont le financement est également pris en charge par la province.

    Mais, la question qui se poserait alors en pareille circonstance serait de savoir si une telle attitude ne vide pas, de facto, les dispositions légales en vigueur en matière de financement des établissements cultuels de leur substance. En effet, si tous les niveaux de pouvoir peuvent tout financer et s’ils doivent alors en conséquence tout financer, quel sens a encore la distinction décidée par le législateur et que l'honorable membre a parfaitement rappelée au préalable ?

    En réalité, le législateur ayant réparti les cultes entre les niveaux communal et provincial, il semblerait illégal qu’une commune subsidie un établissement cultuel financé au niveau provincial ; car ce faisant, elle empièterait manifestement sur une compétence provinciale.

    Par contre, si l’on axe l’accent sur le plan idéologique (ou philosophique), on retombe alors sur la loi du 16 juillet 1973 garantissant la protection des tendances idéologiques et philosophiques, laquelle dispose, en son article 5 : « qu’aucune autorité publique ne peut mettre de manière permanente une infrastructure à la disposition d'un organisme relevant d'une tendance idéologique ou philosophique que si elle est à même d'octroyer dans un délai raisonnable un avantage équivalent aux autres organismes qui en font la demande. »

    Autrement dit, si une commune met des moyens financiers ou matériels à disposition d’une maison de la laïcité ou d’un établissement confessionnel ou non confessionnel dont le financement est pris en charge par la province, elle doit veiller à disposer des mêmes ressources pour les autres entités culturelles ou cultuelles qui en feraient la demande.