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L'accord de Lima sur les engagements de réduction des émissions de CO2

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 194 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 13/01/2015
    • de COURARD Philippe
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Le 14 décembre dernier, et après deux semaines de tractations, les 193 États membres de l'ONU ont conclu un accord à Lima, en vue de limiter le réchauffement climatique, qui, selon le rapport du GIEC, a atteint le niveau le plus élevé depuis 800.000 ans. À terme, l'objectif global est de limiter la hausse du thermomètre de la planète à 2° C à l'horizon 2020.

    En dépit des divergences nord-sud sensiblement prégnantes dans l'arène des négociations, ce consensus qualifié de « timide », « insuffisant » par les organisations internationales luttant contre réchauffement climatique, a pu voir le jour et bénéficier d'un cadre général en ce qui concerne les futurs engagements des nations, dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

    À l'issue de ce rendez-vous, il a été établi qu'une période de transition aura lieu, durant laquelle, des négociations vont se succéder dès février 2015, et un accord multilatéral devra être érigé fin 2015, lors de la conférence sur le climat à Paris. À la date butoir du 1er novembre prochain, une synthèse sur les différents engagements pris par les nations sera réalisée par le secrétariat des Nations Unies, dans l'optique d'évaluer les efforts que chaque pays aura envisagé de consentir, comparativement à l'objectif final de réduction du réchauffement à 2° C.

    Cette action commune est un grand pas en avant et l'initiative de cette conférence témoigne de l'ampleur et d'une inéluctable prise de conscience internationale sur cette problématique qui ne peut plus être bottée en touche ! Cependant, derrière les effets d'estrade, il faut une réelle volonté politique ! En effet, le protocole de Kyoto est significatif en la matière dans la mesure où, il avait fait du changement climatique son fer de lance pour la période 2008-2012. En toile de fond, cet instrument supposait que des mesures contraignantes soient décrétées consécutivement au non-respect des engagements des pays émetteurs de CO2. Suite au « burden sharing »intra-européen, la Belgique, et plus spécifiquement la Région wallonne, s'est engagée à réduire 7,5 % de ses émissions de GES pour 2008-2012, mais force est de constater que les résultats sont maigres au regard des taux prévisionnels, et ce, à l'échelle internationale.

    Par conséquent, quel engagement a défendu la Région wallonne par rapport à cet accord de Lima ? Quelle est la stratégie de Monsieur le Ministre en la matière ? Quelles politiques projette-t-il de mettre en place ?

    En outre, de manière générale, quelle est la situation actuelle de la Région wallonne ? Monsieur le Ministre a-t-il déjà eu une réunion de concertation avec les autres entités du pays?

    Existe-t-il des blocages? Le cas échéant, lesquels ? N'est-il pas urgent d'établir le "burden-sharing" intrabelge ? Monsieur le Ministre pourrait-il nous préciser un éventuel calendrier ?
  • Réponse du 11/03/2015
    • de FURLAN Paul

    Pour rappel, lors de ces réunions internationales sous l’égide des Nations unies, l’Union européenne parle d’une seule voix pour ses États membres. L’ensemble des points politiques défendus reste en ligne avec le mandat européen pour la COP 20 de Lima. La Wallonie, via les experts de mon administration et de mon cabinet, était bien présente à toutes les réunions qui ont permis de définir ces positions, déjà exposée à cette assemblée. De nouveau, je tiens à rappeler que l’Union européenne en tant que signataire de l’amendement au Protocole de Kyoto pour 2020 et engagée dans la transition énergétique via son parquet 2020 et ses récents objectifs 2030, reste un des partis les plus proactifs au sein des négociations internationales sur le changement climatique.

    Comme en a certainement pris connaissance l'honorable membre, l’Accord de Lima n’a abouti qu’à définir un processus politique qui devrait permettre de conclure un accord mondial à Paris en décembre 2015. Aucun engagement chiffré sur les niveaux de réduction n’est mentionné dans l’accord de Lima. Ce processus prévoit des dépôts de soumissions notamment sur le niveau d’ambition et la responsabilité commune, mais différenciée, essentielle pour assurer la transition juste, équitable socialement à laquelle je tiens beaucoup. Elles seront fixées lors des Conseils européens des Ministres de l’Environnement.

    Concernant la mise en œuvre des engagements européens et leur répartition entre les Régions et le Fédéral (« burden sharing »), j’ai déjà eu l’occasion de le présenter devant le Parlement. En voici la synthèse.

    Ainsi, à l’initiative de la Présidence wallonne de la Commission nationale Climat durant l’année 2013, les négociations sur le « burden sharing » ont presque abouties. Comme évoqué dans la question, un accord politique était trouvé sur la majorité des points, dont la répartition des efforts en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

    Cet accord politique était complété par un projet d’accord de coopération de plus de 100 pages, formalisant les règles administratives pour assurer sa mise en œuvre. Cet accord était acceptable pour la Wallonie, bien que résultant de compromis. Si nous acceptions de faire un effort conséquent notamment en matière d’énergie renouvelable, un nécessaire ajustement devait se concrétiser en matière de revenus de la mise aux enchères et de financement international. Néanmoins, tant qu’il n’y a pas d’accord sur tout, il y a accord sur rien ! Ainsi, les dernières réelles réunions de négociations en décembre 2013 sont restées sur un blocage politique de la seule Région flamande, isolée, qui refusait que le Fédéral puisse bénéficier de toutes sources revenus de la mise aux enchères des quotas, tout en s’attribuant plus de 60 % de la part de ces mêmes revenus.
    S’il y eut une ébauche de reprise des négociations en 2014, la Région flamande est venue unilatéralement avec la proposition que mentionne l'honorable membre dans sa question.
    De nouveau, cette proposition surévaluait la part flamande des revenus de la mise aux enchères des quotas, notamment au regard du faible niveau d’ambition exprimé en matière d’énergie renouvelable de 10.5 % de leur consommation finale.

    Autre aspect essentiel pour la Wallonie : le financement structurel de la solidarité internationale en matière de changement climatique, par exemple via les contributions au Fonds vert et des projets bilatéraux, étaient totalement « effacés » du projet d’accord. Dès lors, la Wallonie et le Gouvernement fédéral ont décidé de contribuer unilatéralement et volontairement au financement 2014 du Fonds vert. Cette contribution a été annoncée à la conférence de Lima en décembre 2014. Cet engagement est essentiel pour d’une part faire en sorte que la Belgique assume ses responsabilités et d’autre part d’éviter une mise au ban de la politique climatique de notre pays à l’échelle européenne et internationale.

    Dans la proposition wallonne déposée le 11 décembre au Comité de Concertation, le Gouvernement Wallon suggérait de repartir des propositions d’accord déposé au Comité de Concertation en décembre 2013, qui couvrent tous les aspects clefs et interdépendants du « burden sharing ». J’ai insisté pour que des initiatives rapides émanent de la nouvelle présidence bruxelloise de la CNC en 2015.

    En Wallonie, le décret climat du 20 février 2014 a pour objet d’instaurer des objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre à moyen et long termes, et de mettre en place les instruments pour veiller à ce qu’ils soient réellement atteints.
    Ce décret couvre toutes les sources d’émission de gaz à effet de serre situées en Wallonie (ETS et non ETS) ainsi que les six gaz à effet de serre visés par le Protocole de Kyoto.

    Il comprend deux grands objectifs :
    - une réduction de 30 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990 en 2020 ;
    - une réduction de 80 % à 95 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990 en 2050.

    L’objectif pour 2020 est donc plus ambitieux que l’objectif européen.

    En Wallonie, la réduction moyenne des émissions sur la période d’engagement 2008-2012 est de 24,6 % grâce à des réductions dans les secteurs de l'énergie (utilisation accrue de gaz naturel) et de l'industrie (accords de branche, restructurations…) et ce malgré l’augmentation importante des émissions du transport routier.

    Cette réduction dépasse l’objectif de réduction de la Wallonie dans le cadre du Protocole de Kyoto (diminution de 7,5 % durant la période 2008-2012 par rapport aux émissions de 1990) et permet de se rapprocher de l’objectif wallon du décret climat.

    Quant au nouveau Plan Air Climat Énergie, mon cabinet et mon administration finalisent actuellement le dépouillement de l’enquête publique, comme déjà annoncé. Le Plan Air Climat Energie aura pour horizons temporels 2020, 2030, 2050 et 2100. On parle bien d’une transition, d’une mutation profonde de nos habitudes de consommation et de nos modes de production. Tous les aspects de cette transition doivent faire l’objet d’une réflexion, car il faut tenir compte de nos capacités à changer nos comportements et aussi de nos capacités financières pour réaliser les investissements nécessaires.