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Les appareils domestiques intelligents

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 203 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 19/01/2015
    • de STOFFELS Edmund
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    « Des appareils domestiques intelligents », ainsi titrait l’Écho du 2 janvier dernier.

    En 2009, quand le projet a été lancé, certains doutaient de sa pertinence. Mais aujourd’hui, alors que la sécurité d’approvisionnement de la Belgique est devenue une vraie préoccupation, la thématique est d’une actualité brûlante. Une expérience a été menée sur la question.

    Des appareils intelligents : une expérience concluante ?

    Évidemment, il ne faut pas confondre les MWH consommés et les MWH développables.

    Doel 1, la plus petite centrale nucléaire belge, dispose d’une capacité de 433 MW développables.

    Si l’on extrapole les résultats relevés par Linear à l’ensemble de la population belge, on arrive à un potentiel de 2 GW de consommation supplémentaire qui peuvent être appelés au cours de la journée durant 30 minutes et à un potentiel de 280 MW de consommation qui peuvent être postposés durant 15 minutes.

    Durant l’hiver, des pics sont observés autour de 18h15. Il faut pouvoir disposer d’au moins 4 heures de flexibilité. Cela ramène le potentiel de flexibilité des appareils électroménagers comme la machine à laver, le sèche-linge et le lave-vaisselle à 60 MW, mais s’y ajoutent 207 MW de potentiel venant des chauffe-eau électriques et 0,9 MW venant de la recharge des voitures électriques, soit au total 267,9 MW de consommation qui peuvent être retardés d’au moins 4 heures.

    Le développement des réseaux intelligents modifiera le paysage énergétique.

    Au vu des questions auxquelles un réseau intelligent permettra de répondre, ne faut-il pas accélérer la mise en œuvre dudit réseau et préconiser le tarif de nuit à d’autres moments, pour déplacer la consommation d’électricité vers des moments qui ne mettent pas en péril l’approvisionnement et nous mettent à l’abri d’un délestage ?
  • Réponse du 12/02/2015
    • de FURLAN Paul

    * Mise en œuvre du réseau intelligent

    Il faut considérer d’une part la gestion de la demande de manière à stabiliser le réseau, et d’autre part la gestion du réseau électrique de manière à pouvoir satisfaire toutes les demandes à tout moment.

    Sur la base des informations provenant des 240 ménages flamands suivis par Linear, l’extrapolation à toute la Belgique montre un potentiel de déplacement de charge de 267,9 MW qui pourraient être retardés d’au moins quatre heures. Les maximums journaliers de consommation en Belgique varient en fonction des jours et des saisons. La charge maximale journalière de Elia en 2014 fut de 12.736,1 MW ; les charges maximales journalières en Belgique entre le 1er janvier et le 03 février 2015 sont comprises entre 9.202,6 MW (le 1er janvier 2015) et 12.633,7 MW (le 22 janvier 2015). Par conséquent, si toutes les résidences en Belgique avaient appliqué le système déterminé par Linear, et pour autant que cela eût été possible, le déplacement de charge n’aurait représenté que 2,1 % à 2,9 % de la charge maximale journalière depuis le 1er janvier 2014 jusqu’au 3 février 2015.

    Plusieurs facteurs interviennent dans la gestion sûre du réseau ainsi que la gestion de ses pics: la production, le transport, la distribution, la consommation, les réserves, le délestage, le Demand Side Management. Il faut aussi considérer les trois aspects suivants dans la gestion du réseau : l’aspect technologique, l’aspect économique, l’aspect juridique. Ronnie Belmans, président du consortium Linear et président honoraire d’Elia, explique : « … Linear montre aussi que la technologie et le monde politique ne sont pas prêts pour une introduction massive de “business models” en gestion de la demande tournés vers les familles ». Par conséquent, de l’aveu même du président du consortium, au moins deux des trois aspects de la gestion de la demande (technologie et économie) ne sont pas au point. Dès lors, une mise en œuvre trop accélérée du réseau électrique intelligent apparait comme difficile, et pourrait aussi nuire à sa stabilité. Il convient de rester prudent à ce stade.

    La Wallonie prépare pour l’instant cette mise en œuvre, notamment par les conventions de recherche Gredor, Flexipac ou Premasol.


    * Tarif de nuit et déplacement de charge

    Dans le projet Linear, 55 familles devaient modifier leurs consommations en fonction de tarifs d’électricité variables. Il y avait six tarifs différents, soit une modulation beaucoup plus souple que le simple tarif de nuit (ou bihoraire) auquel la question de monsieur Stoffels fait référence. La plupart des familles a peu tenu compte des six tarifs de prix que Linear leur envoyait la veille, et elles sont rapidement revenues à leurs anciennes habitudes de consommation.

    L’autre méthode était le déplacement de charge à l’aide d’un outil de contrôle. Linear a équipé 185 familles avec un « Home Energy Management System » qui contrôle les électroménagers comme le lave-vaisselle, le sèche-linge, le boiler, et même le véhicule électrique. Ce système mettait en route les appareils quand l’électricité était excédentaire sur le réseau et les coupait quand moins d’énergie était disponible. Cependant, ce système tenait également compte du comportement et du bien-être des gens. Linear a montré que ce système est techniquement faisable, et que les paramètres de contrôle pourraient être améliorés à l’aide de différents algorithmes. En même temps, Linear a montré que le système de communication domotique doit être amélioré, et qu’il faudrait une standardisation de manière à rendre les couts opérationnels abordables.

    Aucune des deux méthodes n’est donc satisfaisante pour soulager le réseau en l’état actuel des techniques et des habitudes de vie des gens. Il faut également savoir qu’en cas de développement à l’échelle d’un gestionnaire de réseau ou de toute la Belgique d’un système de déplacement de charge, la quantité d’information à envoyer serait considérable, et des progrès doivent encore être réalisés pour pouvoir traiter toutes ces données à échanger. L’échange d’informations pourrait transiter par l’intermédiaire des compteurs intelligents, dont le roll-out a été déplacé pour plus tard en Belgique.


    * Compteurs bihoraires

    Environ soixante pour cent des ménages wallons sont équipés de compteurs bihoraires. Dans le cadre de l’introduction de sources d’énergies renouvelables et dispersées, la CWaPE a estimé (Rapport final REDI Réseaux Electriques Durables et Intelligents -23 janvier 2012) le potentiel technique de déplacement de charge dans le secteur résidentiel en tenant compte de nombreux paramètres (nombre de compteurs bihoraires, types de consommateurs, puissance installée et foisonnement, type de chauffage, été-hiver, roll-out ou non des compteurs). Il s’établit pour les puissances installées, et en « situation actuelle – 2010 » aux alentours de 17 %. Le remplacement des chauffages électriques par des pompes à chaleur à accumulation, l’apparition des véhicules électriques avec le remplacement des compteurs par des compteurs intelligents donnent d’autres valeurs plus élevées. Des essais de déplacement de charge sont en cours, mais surtout dans le but de soulager le réseau lors de la production excessive d’électricité photovoltaïque.


    * Conclusions

    La mise en œuvre d’un réseau électrique intelligent nécessite des changements technologiques, économiques et juridiques. Son implémentation ne peut se faire dans l’urgence. Linear a montré que le potentiel de déplacement de charge par la gestion active de la demande reste relativement faible par rapport au pic de consommation. La CWaPE a montré que l’utilisation de compteurs bihoraires avec la télécommande centralisée a un potentiel de déplacement de charge supérieur, mais cela ne permet pas la gestion active à distance. Il implique la participation active du consommateur en fonction de la différence de tarifs jour-nuit.

    Les réseaux électriques intelligents devront gérer non seulement la gestion technique de soulagement du réseau lors des pics de consommation, mais aussi l’intégration des énergies variables et dispersées lors des pics de production, tout en établissant des tarifs d’électricité acceptables par toutes les parties prenantes, dans un cadre juridique clair et stable.