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Les cellules de reconversion et la situation des travailleurs âgés de Saint-Gobain

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 109 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 04/02/2015
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de l'Emploi et de la Formation

    Nous apprenions récemment par la presse, la mésaventure qui frappe à nouveau les travailleurs de Saint-Gobain à Sambreville. Il semble, en effet, que les nouvelles mesures relatives à l'accompagnement des travailleurs les conduisent à une recherche active d'emploi.

    Si l'on analyse le marché du travail et la situation des travailleurs concernés, plusieurs éléments ne manquent pas de susciter chez moi une vive inquiétude.

    Pour commencer, il y a le principe même des cellules de reconversion, qui vise à assurer aux travailleurs frappés par un licenciement collectif le fait de bénéficier d'un laps de temps utile pour faire le deuil de leur perte d'emploi. Il est admis que perdre un emploi dans ces conditions crée un vide psychologique et émotionnel comparable à la perte d'un proche, d'où la notion de deuil. Il y a aussi le fait que, face à cet état de fait, les individus ne sont pas égaux, certains demandant plus de temps pour assimiler la perte et par conséquent, être prêts à se repositionner sur le marché de l'emploi.

    D'autre part, les cellules de reconversion, comme leur nom l'indique, visent à assurer aux travailleurs qui y participent la possibilité de se réorienter éventuellement dans une autre voie professionnelle. Or, les nouvelles mesures conditionnant l'octroi d'allocations de chômage sont liées à la recherche active d'emploi.

    Cette pression pour un emploi à tout prix déforce l'efficience des cellules de reconversion. Sur ce double constat, il apparaît que la mission visée par la cellule de reconversion risque de perdre de son efficacité. Les travailleurs contraints d'accepter un emploi à ces conditions, parfois sous statut précaire ou atypique, perdent en effet leur droit à une reconversion efficace et durable, donnant accès à un véritable emploi de qualité.

    Un autre élément relaté par Vers l'Avenir indique que les travailleurs prépensionnés sont aussi frappés par ces mêmes mesures. Dans l'état actuel, quelques 70 personnes, voire familles feront, demain, l'objet d'un contrôle accru de leur droit à bénéficier des allocations de chômage, et ce, dans un contexte économique difficile où il est admis que trouver un emploi n'est pas chose facile, tant pour les jeunes que pour les prépensionnés.

    Combien de ces travailleurs ont-ils été inscrits dans cette cellule de reconversion ?

    Combien font actuellement l'objet d'un suivi ?

    Combien sont-ils à avoir retrouvé un emploi ?

    Quelles sont les possibilités de permettre à ces travailleurs de se refaire une « santé » professionnelle et, par le biais d'un accompagnement ciblé, de se réorienter professionnellement de façon durable sans avoir à subir une pression quelconque pour leur retour à l'emploi ?

    Par ailleurs, disposons-nous, pour la Wallonie, de chiffres clairs relatifs à un retour à l'emploi pour des travailleurs ayant transité par une cellule de reconversion ?

    Enfin, combien de travailleurs prépensionnés en Wallonie seront-ils contraints de rechercher activement un emploi en vue de maintenir leur droit aux allocations de chômage ? Quelle est ou sera la position du FOREm vis-à-vis de ces travailleurs ? Quelle est et sera celle de Madame la Ministre ?
  • Réponse du 09/03/2015
    • de TILLIEUX Eliane

    La cellule de reconversion mise en place pour la restructuration de l’entreprise Saint-Gobain Glass à Auvelais concerne 327 travailleurs. Parmi ceux-ci, 67 pourront bénéficier de l’abaissement de l’âge normal d’accès au bénéfice des allocations de chômage avec complément d’entreprise à 53 ans et 2 mois, pour les ouvriers, et 55 ans et 2 mois, pour les employés.

    Durant l’accompagnement par la cellule de reconversion, le travailleur licencié bénéficie, avec ses anciens collègues :
    - d’activités collectives sur les techniques et outils de recherche d’emploi, mais également d’informations sur les formations, les métiers en tension, les nouvelles dispositions légales, la dégressivité, la discrimination, … ;
    - d’un suivi individuel par les conseillers du FOREm ;
    - d’un suivi psychosocial par les accompagnateurs sociaux engagés parmi le personnel licencié de l’entreprise.

    Pendant les premiers mois d’accompagnement (3 mois pour les moins de 45 ans et 6 mois pour les plus de 45 ans), les travailleurs doivent participer aux activités de reclassement proposées. Pendant cette période, ils touchent une indemnité de reclassement (indemnité qui correspond au salaire normal et aux avantages habituels découlant du contrat de travail), payée par l’ancien employeur ; ce n’est qu’au terme de cette période que les travailleurs n’ayant pas retrouvé un emploi, et ayant participé aux activités de reclassement, pourront solliciter des allocations de chômage. Durant cette période, les travailleurs construiront un projet de reconversion ou de réinsertion dans le cadre de leur transition professionnelle.

    Au terme de cette période obligatoire de 3 ou 6 mois, chaque travailleur pourra décider de poursuivre volontairement l’accompagnement au sein de la Cellule de reconversion afin de continuer le travail de réinsertion et de reconversion. Tout travailleur de Saint-Gobain faisant l’objet d’un licenciement collectif, qui fait le choix de s’inscrire à la Cellule pour l’Emploi et de participer à la Cellule de reconversion, bénéficie pendant la durée de son accompagnement d’un contrat d’accompagnement socioprofessionnel avec le FOREm. Ce contrat lui permet de travailler à son projet de réinsertion et de reconversion professionnelle en bénéficiant des mêmes avantages qu’un stagiaire en formation (indemnité de formation, frais de déplacement, assurances, dispense ONEM…).

    Depuis la modification des règles de disponibilité des chômeurs par le Gouvernement fédéral, au 1er janvier 2015, la disponibilité active et passive des chômeurs a été étendue à 65 ans. Quel que soit leur âge, les chômeurs complets et les chômeurs avec complément d’entreprise, doivent être disponibles sur le marché de l’emploi et rechercher activement un travail. Seuls les chômeurs âgés de 60 ans au 31 décembre 2014 et ayant bénéficié, en 2014, d’allocations de chômage comme chômeur complet ou chômeur avec complément d’entreprise restent dispensés.

    Selon l’ONEM, en décembre 2014, 25.544 chômeurs wallons avec complément d’entreprise étaient dispensés d’inscription comme demandeurs d’emploi. Parmi eux, 20.047 chômeurs étaient âgés de 60 ans et plus et continuent, dès lors, d’être dispensés d’inscription; 5.497 chômeurs étaient âgés de moins de 60 ans et doivent désormais se rendre disponibles sur le marché de l’emploi et rechercher activement un travail.

    La décision du Gouvernement fédéral a ceci d’interpellant qu’elle recule l’âge maximal du contrôle de la disponibilité et que cette décision prévoit un effet rétroactif, ce qui a effectivement un impact pour des travailleurs qui ont accepté de quitter leur entreprise sous certaines conditions et permis, de la sorte, à des travailleurs plus jeunes de conserver leur emploi. Au-delà du sort de ces travailleurs licenciés, la question de l’âge maximal de disponibilité sur le marché de l’emploi reste de la seule compétence fédérale.

    En matière d’assouplissement du contrôle de la disponibilité pour les chômeurs avec complément d’entreprise, la marge de manœuvre de la Région s’avère réduite. En effet, compte tenu du cadre normatif en discussion avec le Fédéral, aucun public non explicitement dispensé du contrôle de la disponibilité ne pourra être purement et simplement exempté de contrôle par les services régionaux.

    Toutefois, le Gouvernement wallon a demandé au Comité de gestion du FOREm, composé des représentants des partenaires sociaux, de lui proposer un modèle opérationnel du contrôle de la disponibilité des demandeurs d’emploi. Ce modèle devra intégrer une prise en compte plus fine de la situation des demandeurs d’emploi wallons dans l’évaluation de leurs efforts de recherche d’emploi.

    Pour les chômeurs avec complément d’entreprise, cela ne signifiera sans doute pas une immunisation des effets du contrôle de la disponibilité, mais plutôt une appréciation de leurs démarches en fonction de leur âge, de leur état de santé ainsi que de l’existence, au niveau local, de postes de travail correspondant à leurs compétences et à leur expérience.

    Enfin, les résultats des cellules de reconversion sont compilés et analysés annuellement par le FOREm et ses partenaires. Le rapport d’activité 2014 est en voie de finalisation. En 2013, 66.5 % des travailleurs actifs (hors accès à la prépension, pension, maladie de longue durée…) ont retrouvé un emploi, dont plus de 60 % en contrat à durée indéterminée. Ce taux de réinsertion monte à plus de 78 % pour les employés qui disposent souvent de compétences plus facilement transposables d’une entreprise à l’autre.