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L'agroforesterie en Wallonie

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 104 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 11/02/2015
    • de BROGNIEZ Laetitia
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Ruralité, du Tourisme et des Infrastructures sportives, délégué à la Représentation à la Grande Région

    L’agroforesterie a ses partisans et ses détracteurs. Certains mettent en avant les enjeux environnementaux, d’autres y voient une opportunité de diversification agricole avec, à la clé, des revenus complémentaires ; enfin, d’autres encore estiment qu’au contraire, elle peut entraîner une perte de productivité des terres arables en particulier, pensons aux obstacles pour les machines.

    Si les impacts de l’agroforesterie à moyen et long termes sur les rendements des grandes cultures n’ont pas encore été mesurés, différents bénéfices ont été identifiés : une source de revenus complémentaires (fruits, production de bois de chauffage, de bois d’œuvre, énergie, voire même une augmentation de la location de chasse), une protection contre les aléas climatiques (atténuation du vent, ombrage), une protection des sols contre l’érosion, une meilleure fertilisation des sols, etc.

    Quelques freins importants au développement de l’agroforesterie sont pointés. Citons d’abord le bail à ferme : la plantation d’arbres représente un investissement sur le long terme, ce qui n’est pas toujours compatible avec une location de terres. Deuxièmement, l’abattage des arbres peut être conditionné à l’obtention d’un permis.

    En Wallonie, une subvention peut être sollicitée en application de l’arrêté du Gouvernement wallon relatif à l’octroi de subventions pour la plantation et l’entretien de haies vives, de vergers et d’alignements d’arbres.

    A-t-on une idée de l’intérêt que suscite l’agroforesterie chez les agriculteurs au regard des primes sollicitées ? Cette pratique se développe-t-elle ? Sous quelle forme ?

    Le groupe de travail du Réseau wallon de développement rural a fait remarquer que cette aide n’était pas adaptée pour des projets de grande ampleur et que, en outre, cette enveloppe « subsides » était insuffisante, qu’elle était épuisée dès le début d’année. Qu’en est-il ? Qu’en pense Monsieur le Ministre ? A-t-il eu un contact avec son collègue en charge de l’Environnement à ce sujet ?

    Contrairement à la Région flamande, la Wallonie n’avait pas pris l’option offerte dans le cadre du PwDR 2007-2013 d’adopter une mesure de soutien spécifique à l’agroforesterie. Le projet de PwDR 2014-2020 accorde-t-il une attention particulière à l’agroforesterie ? Pour ce qui concerne le premier pilier de la PAC, l’agroforesterie entre-t-elle dans le cadre du verdissement ?

    Le prédécesseur de Monsieur le Ministre avait annoncé, en novembre 2012, avoir accordé une subvention pour un projet de recherche ayant pour objectif d’identifier les plus-values de l’agroforesterie pour l’élevage bovin. Cette recherche est-elle terminée ? Quelles en sont les conclusions ?

    Une réflexion a-t-elle déjà été menée pour répondre, si telle est la volonté, à la problématique soulevée découlant de la conclusion de bail à ferme ?

    Par la présente question, je souhaitais connaître le point de vue de Monsieur le Ministre sur l’agroforesterie, son implémentation éventuelle en Wallonie, les perspectives en la matière, …
  • Réponse du 05/03/2015
    • de COLLIN René

    S'il est exact que l'agroforesterie a des impacts positifs pour l'environnement et la biodiversité, cette pratique engendre aussi des pertes de productivité pour les terres arables notamment, avec la diminution des rendements.

    Outre ces diminutions de revenu, un des freins à son développement, et non des moindres, est le bail à ferme, qui en l'état est difficilement compatible avec des projets dont le retour sur investissement est de 50 à 60 ans, voire plus. Une étude financée dans le cadre d’un projet LEADER sur cette thématique a mis en évidence cet aspect des choses. Dès lors, il ne faut pas voir l'agroforesterie comme une source de diversification des revenus de l'agriculteur, mais plutôt comme un placement à long terme et un investissement pour les générations à venir.

    Compte tenu de ces éléments et s'il y a certes un intérêt pour l'agroforesterie en Wallonie en matière de protection des sols contre l’érosion, celui-ci restera limité à certains systèmes agroforestiers comme les haies et vergers et ce, tant en zones herbagères qu'en zones de cultures.

    La définition de l'agroforesterie est aussi sujette à interprétation. Ainsi, si on peut y retrouver différentes formes comme les alignements d'arbres, les bandes boisées, les haies et les vergers hautes tiges, la Commission européenne, dans le cadre du second pilier de la PAC, est plus restrictive dans sa définition avec l'obligation qu'il y ait une association exclusive de production agricole et de production forestière.

    En termes de soutien financier, l'arrêté du Gouvernement wallon du 20 décembre 2007 relatif à l'octroi de subventions à la plantation et l'entretien de haies, permet également de financer, dans une certaine mesure, des projets agroforestiers au même titre que la MAE "Eléments du paysage" pour l'entretien. Les budgets annuels qui y ont été dédiés ont été de 220.000 euros en 2011 et 2012, de 209.000 euros en 2013 et de 210.000 euros en 2014 et 2015.

    Sur les deux dernières années (2013 et 2014), 193 subventions ont été accordées. 47 concernent des haies de plus de 300 m de long (dont 10 atteignent le maximum subsidiable annuellement de 1 000 m) et 7 des dossiers de plantation d’alignements d’arbres d’au moins 100 arbres (dont 6 sont combinées avec des plantations de haies de plus de 500 m). Ces 48 dossiers peuvent clairement être assimilés à de l’agroforesterie. Cela représente donc 25 % des demandes de subventions. Le montant des subsides correspondants est de 212.720 euros, soit 50 % du budget.

    L’intérêt est manifestement là. Les réalisations sont pour le moment limitées par le plafond de 1000 m de haies subsidiables par an (certains propriétaires étalent de ce fait leur projet sur plusieurs années). Par ailleurs, aucune promotion particulière n’est faite pour cet arrêté, étant donné que son budget est consommé annuellement sans nécessiter la moindre promotion. Si une telle promotion était développée, le succès serait vraisemblablement au rendez-vous. Ainsi, certains parcs naturels (Haute Sûre Forêt d’Anlier, Burdinale et Mehaigne p.ex.) ont fait la promotion des haies, ce qui a permis en 5 ans (2009 – 2013) la plantation de 67 km de haies.

    Le projet de recherche envisagé sur la plus-value dans le secteur bovin ne s'est pas concrétisé suite à un avis négatif remis par l'Inspection des finances.

    Dans le cadre du 1er pilier de la PAC, l'agroforesterie peut-être valorisée comme surface d'intérêt écologique (SIE) et ce, pour autant que ces parcelles aient été financées dans le cadre du second pilier. Cela étant, les alignements d'arbres et les haies pourront être valorisés comme SIE et dès lors être comptabilisés dans le calcul du verdissement comme l'autorise le règlement européen.

    Pour le second pilier, le soutien à l'agroforesterie est prévu dans le projet de PwDR (Programme wallon de Développement rural) actuellement en discussion avec les services de la Commission européenne. Il est quoiqu’il arrive acquis de maintenir une aide à la plantation, que ce soit via l’aide wallonne actuelle ou via une aide dans le cadre du futur PwDR.

    Par ailleurs, dans l’évolution du bail à ferme, une attention particulière sera portée au potentiel de développement de l'agroforesterie en Wallonie.