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La modernisation de la comptabilité publique

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 78 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 17/02/2015
    • de MOUYARD Gilles
    • à LACROIX Christophe, Ministre du Budget, de la Fonction publique et de la Simplification administrative

    Monsieur le Ministre n'est pas sans savoir que la Commission européenne ambitionne de révolutionner la comptabilité publique, dans l’objectif de faire passer cette dernière dans le XXI siècle, en lui faisant adopter une vision patrimoniale plutôt que budgétaire.

    En effet, suite à la crise financière de 2007 qui a mis en lumière le flou qui entourait les comptes de plusieurs États, la Commission européenne a souhaité mettre ne place des normes favorisant la transparence ainsi que l’harmonisation entre les pays.

    Une décision européenne remontant à 2011 indique : « que les comptes des États membres devront répondre à un arsenal d’exigences ». Le modèle choisi étant celui des IPSAS, pour international public sector accounting standards. Et la Commission européenne va en proposer une nouvelle traduction, qui entrera en vigueur à l’horizon 2020, et qui répondra au nom d’EPSAS. Des précisions quant au timing seraient attendues d’ici mars/avril 2015.

    Nous assisterons donc au travers de l’EPSAS à la mise en place d’une comptabilité patrimoniale qui permettra de disposer d’un cliché figeant tant l’ensemble des actifs que des passifs et d’avoir une vision correcte du patrimoine. De la sorte il en sera terminé du mode « trésorerie » qui ne donnait qu’une vue purement budgétaire, ne s’appuyant que sur les entrées et les sorties financières.

    Face à cette situation le cabinet de réviseurs d’entreprises EY, indiquait dans la presse que la mise en place des normes EPSAS demandera du temps et nécessitera des budgets non négligeables : entre 2,55 et 3,58 euros par habitant. Ce qui représente pour la Belgique un coût qui sera compris entre 29 et 40 millions d’euros.

    De plus, en 2013, une étude commanditée par l’Europe estimait que la Belgique était à 65 % compatible avec IPSAS. Pour la Flandre le pourcentage était même de 82 %, tandis que la Wallonie et Bruxelles devaient se contenter d’une cote unique de 54 %. Pour EY, la Wallonie ne serait « …nulle part … Elle n’est pas capable d’établir ses colonnes “actif et passif”, elle ne dispose pas du logiciel nécessaire ».

    Le cabinet EY invite donc le monde politique à prendre les mesures nécessaires pour se préparer à la mise en place d’EPSAS en utilisant déjà IPSAS.

    Quelle est l'analyse de Monsieur le Ministre de la situation ? Qu’envisage-t-il de faire en vue de préparer au mieux la Wallonie à la mise en place des normes EPSAS ? Est-il exact que la Wallonie ne serait « …nulle part… », qu’ « elle n’est pas capable d’établir ses colonnes “actif et passif" » et qu’ “elle ne dispose pas du logiciel nécessaire” ?
  • Réponse du 05/03/2015
    • de LACROIX Christophe

    Les normes EPSAS (European Public Sector Accounting Standards) ont été envisagées afin de mettre en place un système de comptabilité harmonisée, suite aux problèmes de fiabilité de données rencontrés au moment de la crise financière et notamment de la dette souveraine.

    Je suis évidemment un partisan de l’établissement de sources de données crédibles et complètes, c’est l’essence même de la comptabilité publique.

    La standardisation induit la comparabilité des états financiers entre pays ou entre régions qui permet d’améliorer le cadre de la surveillance budgétaire et d’éviter les requalifications a postériori de certaines opérations comptables. La sécurité budgétaire se verrait dès lors accrue.

    Historiquement, le Gouvernement wallon avait décidé d’implémenter la nouvelle comptabilité publique en commençant par le cadre décrétal, avant d’entamer les développements informatiques correspondants.
    En sa séance du 13 février 2014, le Gouvernement avait estimé que les développements informatiques liés à la nouvelle comptabilité publique – autrement dit le développement d’un remplacement du GCOM – devaient être portés par le SPW. Cette mise en place va nécessiter des moyens budgétaires importants, le GCOM ne permet pas de répondre aux exigences évoquées, d’où les différentes dispositions du décret des dépenses qui dérogent/suspendent les dispositions du décret WBFIN.

    Aujourd’hui, une question d’opportunité se pose toutefois : les adaptations du GCOM pèsent lourdement sur le budget pour des évolutions parfois mineures. D’où l’idée d’arrêter les dépenses pour ce type d’adaptation et de réserver les enveloppes pour le développement du nouvel outil.
    Sur la finalisation du cadre normatif, la principale pièce manquante, outre l’arrêté de gouvernement lié aux SACA (Services administratifs à comptabilité autonome) (1), est le décret relatif aux OIP qui va leur imposer les exigences de la nouvelle comptabilité et remplacer la loi de 1954 pour ceux qui y sont soumis.
    Les développements ont été retardés pour y intégrer les nouvelles exigences de reporting qui s’appliquent désormais non seulement aux OIP, mais aussi à tous les organismes du secteur 13.12 (administrations d’États fédérés)
    Si on regarde la carte européenne qui donne une vue d’ensemble des paysages comptables au sein de l’Union européenne, la Wallonie se situe dans une maturité comptable (2) comprise entre 40 et 70 %. Un pays comme l’Allemagne, se situe à moins de 40 % de maturité comptable, d’après la même étude. Je ne pense pas que l’on puisse, dès lors, en conclure que le degré de maturité comptable est un signe de bonne ou de mauvaise gestion.
    Je pense que l’on doit profiter de ce changement d’outil pour y intégrer les futures exigences EPSAS.
    Cependant, il semble que le règlement ne sortira que fin de cette année, voire début de l’année prochaine. Il est évident que je serai également attentif à l’adaptation de nos textes légaux, à l’évolution du cadre de ces normes ainsi qu’au calendrier de l’implémentation. L’année 2020, qui est une date approximative avancée par Eurostat, semble être un planning ambitieux, mais possible.
    Par ailleurs, je suis aussi soucieux quant à la prise en compte des observations formulées par la Cour des comptes vis-à-vis de l’informatique comptable lors du dernier audit y afférent qui conduisent aujourd’hui la Région à prendre le temps de réfléchir pour poser les bases les plus solides d’un nouvel environnement comptable.

    En conclusion, ma volonté est clairement de répondre aux exigences actuelles, voire d’anticiper des évolutions futures au niveau européen.



    (1) L’AWAC (Agence wallonne de l’Air et du Climat) est le seul service administratif à comptabilité autonome (SACA) en Région wallonne, anciennement dénommés « services à gestion séparée ». Ces administrations sont dotées d'une autonomie de gestion, mais sans personnalité juridique. (Loi du 22 mai 2003 portant organisation du budget et de la comptabilité de l'État fédéral). Il y en plusieurs en Fédération Wallonie Bruxelles, il s’agit surtout des écoles.
    (2) Maturité comptable signifie comptabilité en partie double, imputation simultanée des dépenses en comptabilité générale et en comptabilité budgétaire.