/

La pollution électromagnétique et ses risques éventuels pour la santé

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 324 (2014-2015) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 25/02/2015
    • de PREVOT Patrick
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    En Belgique, comme dans l’ensemble des pays industrialisés, nous évoluons quotidiennement dans un bain d’ondes électromagnétiques. Qu’elles soient générées par les lignes à haute tension, les radios, les postes de télévision, les appareils électriques, la téléphonie mobile ou encore les technologies sans fil, cette pollution n’a cessé de croître depuis ces dernières années et devrait encore se multiplier à l’avenir.

    Ce développement inquiète d’autant que les informations diffusées sur les éventuels risques de la propagation de ces ondes sur la santé sont souvent contradictoires. Ainsi, les résultats de certaines études tenteraient à minimiser le danger de cette exposition alors que d’autres, au contraire, sont des plus alarmistes. Dans ce second cas, des troubles neuro-endocrino-immunitaires (problèmes de concentration et de mémoire, nausées, maux de tête, dérèglement des fonctions de l’organisme,...) et des risques de dépression et de mal-être sont cités.

    Monsieur le Ministre pourrait-il nous communiquer les informations en sa possession afin d’éclaircir dans la mesure du possible cette confusion ? Dispose-t-il de données chiffrées relatives au nombre de personnes se plaignant et/ou souffrant d’électrohypersensibilité en Belgique ? Quelle position notre pays adopte-t-il face à ce « syndrome » ? Est-il reconnu par le monde médical belge ? Par des pays voisins ? Quel est l’avis de l’OMS sur cette question ?

    En France, la possibilité serait offerte à chaque citoyen de faire mesurer son niveau d’exposition aux ondes à son domicile ou à son lieu de travail sur simple demande à la mairie ou à la préfecture. Qu’en est-il chez nous ? Cette possibilité existe-t-elle ? Vers quelles instances, une personne s’estimant souffrir d’une exposition trop importante aux ondes peut-elle se tourner afin d’obtenir des informations ?

    La situation nécessite-t-elle la mise en place d’une politique d’information et de communication axée sur les dangers de telles ondes et les possibilités de s’en prémunir ? Des actions de prévention sont-elles ou seront-elles envisagées ?
  • Réponse du 18/03/2015
    • de PREVOT Maxime

    La problématique de la pollution par les champs électromagnétiques est très complexe à aborder d’un point de vue environnemental du fait de sa diversité. Le néologisme d’électro-smog a été créé pour qualifier l’ensemble des CEM de niveau et d’intensité différents auquel est exposée la population générale, et ce pendant des durées variables.

    Pour ce qui concerne les risques que pourraient générer ces CEM sur la santé des personnes exposées, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande des normes d'exposition aux CEM qui sont basées sur les effets physiologiques directement mesurables de ces champs. En Belgique, l’avis rendu en 2010 par le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) (1) atteste de l’incertitude existant dans la relation entre source(s) de CEM et risque supposé pour la santé, mais également en ce qui concerne l’importance de ce risque éventuel. Les études épidémiologiques n’ont pas encore pu mettre en évidence de relation claire, mais elles ne peuvent pas non plus confirmer l’absence de ce risque. L’existence d’un risque potentiel des CEM pour la santé suscite cependant chez une partie de la population de fortes émotions. Le caractère imposé de cette exposition aux CEM peut en outre contribuer à une perception plus élevée du risque et à une acceptation moindre de celui-ci.

    Certaines personnes se plaignent ainsi de troubles de santé qu’ils attribuent à l’exposition à des CEM. Ces troubles se manifestent à des niveaux d’exposition inférieurs aux limites d’exposition recommandées et - en tout état de cause - aux niveaux produisant des effets néfastes connus. On parle alors souvent d’hypersensibilité électromagnétique. En 2005, l’OMS caractérisait l’hypersensibilité électromagnétique en se basant sur les divers symptômes que les individus touchés attribuent à l’exposition aux champs électromagnétiques (2). Ces symptômes ne se manifestent qu’à proximité d'équipements ou d'installations électriques (3). On distingue des symptômes dermatologiques et neurologiques.

    Il est important de rappeler que ces symptômes sont attribués par les personnes qui en souffrent. La proximité ou l’usage d’équipements électriques ou électroniques provoquent chez ces personnes des degrés variables d’inconfort ou une perception de mauvaise santé. Il s’agit donc d’une définition opérationnelle, car il n’existe pas de signe clinique objectif ou de marqueur spécifique qui permette de caractériser cette intolérance. De plus, les symptômes décrits ne forment pas un syndrome cohérent. C’est pourquoi il n’a pas été possible d’établir des critères diagnostiques précis.

    Dans les faits, l’appellation d’hypersensibilité est trompeuse, car elle sous-entend implicitement que si l’on diminuait les normes d’exposition aux CEM, il serait possible de réduire le niveau des symptômes. Toutefois, les plaintes des personnes sensibles restent relativement aspécifiques et peuvent diverger des conséquences connues liées à des expositions plus intenses à ces CEM. En outre, il n’existe pas ou peu de constatations cliniques objectives permettant de faire le lien entre ces troubles et les CEM.
    Dans l’état actuel de nos connaissances, le concept d’intolérance électromagnétique semble être mieux adapté. En se rapprochant du concept d'intolérance environnementale idiopathique (4), cela permet de prendre en compte :
    - l’exposition environnementale à des facteurs déterminés ;
    - les conséquences objectives et subjectives connues chez les personnes exposées ;
    - mais, aussi la manière dont les individus pris indépendamment peuvent réagir à leur environnement spécifique.

    En Belgique, il n’existe aucune donnée précise sur la prévalence de l’intolérance électromagnétique.

    Le monde médical belge, via le CSS, se rallie à l’avis général de l’OMS. Il est important de reconnaître et d'identifier la souffrance du patient, afin de pouvoir lui proposer une prise en charge adaptée. Les symptômes décrits par les patients ont une réalité certaine et peuvent être de gravité très variable. Quelle qu'en soit la cause, l’intolérance électromagnétique peut être un problème handicapant pour l'individu touché.

    En ce qui concerne la possibilité de mesurer le niveau d’exposition aux CEM à son domicile et sur son lieu de travail comme cela est possible en France, il n’existe pas d’équivalent en Wallonie. Via l’ISSeP, il est possible de faire réaliser, sous certaines conditions, un test à son domicile en relation avec la présence d’un pylône porteur d’antennes-relais GSM. Dans ce cas, une norme précise existe à laquelle les exploitants de réseaux GSM sont tenus de se conformer. Au regard de ce qui précède, seule une approche pluridisciplinaire impliquant entre autres l’évaluation des facteurs de risque au domicile ou au travail peut être préconisée. Dans chaque province wallonne, si le médecin le juge nécessaire et sur une demande écrite de sa part, le Service d’Analyse des Milieux Intérieur (SAMI/LPI) provincial est ainsi en mesure évaluer (tous) les facteurs de risque.

    Pour ce qui concerne les personnes souhaitant obtenir des informations sur le sujet, la Cellule permanente environnement santé (CPES) de la Wallonie a mis en place un site d’information générale. Les informations, qui y sont mises en ligne, ont été validées par des experts scientifiques du SPW et d’institutions scientifiques indépendantes ; elles se veulent précises et adaptées au grand public en général. Par contre, si la personne désire des informations personnalisées, adaptées à sa propre situation, elle doit alors se tourner en premier lieu vers son médecin traitant.

    Concernant la mise en place d’une politique d’information et de communication axée sur les dangers de telles ondes et les possibilités de s’en prémunir, il existe donc déjà des informations disponibles sur le Portail environnement santé de la Wallonie. Dans un avenir proche, une information à destination spécifiquement des médecins devrait pouvoir compléter celles-ci. Il est important de préciser qu’une information concernant un risque « incertain » pour la santé en lien avec des facteurs environnementaux peut de manière indésirable générer de la peur et de l’inquiétude dans la population ; c’est en particulier le cas si l’information ne contribue qu’à entretenir l’incertitude sans qu’il existe pour autant de possibilité de diminuer davantage l’exposition.

    Pour ce qui est de la prévention, la réduction drastique des niveaux acceptables ne semble pas justifiée étant donné que bon nombre des individus manifestant ce syndrome réagissent de manière aspécifique à leur environnement.

    La prise en charge individuelle, si elle est correctement mise en œuvre par une équipe compétente, semble être une meilleure piste ; les meilleurs résultats étant obtenus à la suite de prise en charge la plus précoce possible des individus.



    (1) Publication du Conseil Supérieur de la Santé N°8356 « Intolérance ou hypersensibilité aux facteurs environnementaux physiques et chimiques » - juillet 2010.
    http://www.health.fgov.be/internet2Prd/groups/public/@public/@shc/documents/ie2divers/19063175.pdf
    (2) OMS. Aide mémoire N°296. Décembre 2005. Champs électromagnétiques et santé publique : hypersensibilité électromagnétique. http://www.who.int/peh-emf/publications/facts/EHS_Factsheet_296_French.pdf
    (3) Cela comprends les ordinateurs, lampes fluorescentes, lignes à haute tension, appareils électriques ménagers divers, TV, GSM, antennes GSM…
    (4) L’IEI (Idiopathic Environmental Intolerance) a été définie par l’OMS lors d’un atelier convoqué par le Programme international sur la sécurité des substances chimiques (IPCS) à Berlin en 1996. Celle-ci correspond à une maladie subjective marquée par des symptômes récurrents et non spécifiques qui sont attribués à une exposition à de faibles niveaux d'agents physiques, chimiques ou biologiques. Ces symptômes se manifestent en l'absence de constatations physiques compatibles ou des tests en laboratoire permettant de définir clairement une maladie. Ce concept dérive de celui de sensibilités chimiques multiples (SCM).