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La discrimination sur base de la fortune en matière de logement

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 401 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 20/05/2015
    • de COLLIGNON Christophe
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Je souhaiterais revenir sur cette problématique en matière de discrimination dans le domaine du logement. J'avais déjà questionné Monsieur le Ministre sur le sujet le 10 mars dernier.

    Ainsi, récemment, un propriétaire a été condamné pour discrimination sur la base de la fortune : le tribunal de première instance de Namur a en effet estimé qu'une discrimination sur la base de la fortune était établie dans le chef de l'inculpé, celui-ci ayant exclu a priori certains candidats-locataires sur la base de l'existence ou non d'un contrat de travail à durée indéterminée.

    Le tribunal reconnaît qu'il est légitime pour un bailleur de s'assurer de la solvabilité d'un candidat locataire, mais tient à rappeler que la loi antidiscrimination ne lui permet pas d'exclure a priori les catégories de candidats aux revenus dits non professionnels, soit les personnes vivant d'allocations.

    Comme l'a souligné le Centre interfédéral pour l'égalité des chances qui parle d'une première en Belgique dans le secteur du logement, cette décision est très encourageante, car elle constitue une avancée importante dans la mise en oeuvre effective du droit au logement consacré par l'article 23 de la Constitution.

    Je souhaiterais entendre Monsieur le Ministre sur cette problématique. Nous en avions déjà discuté, mais je souhaiterais de nouveau rappeler que le transfert de la matière des baux d'habitation aux Régions donne à celles-ci de nouvelles opportunités pour développer une réflexion sur la nécessité d'apporter des adaptations à la législation actuelle.

    Tout en sachant que Monsieur le Ministre s'apprête à déposer une note d'orientation sur le logement, pourrait-il nous préciser les initiatives qu'il envisage ? Quels outils compte-t-il mettre en place pour lutter le plus efficacement possible contre les discriminations en matière de logement de manière générale ?
  • Réponse du 28/05/2015
    • de FURLAN Paul

    Je confirme que la Déclaration de politique régionale 2014-2019 prévoit de mettre en place un plan d’action de lutte contre les discriminations, en collaboration avec le Centre interfédéral pour l’Égalité des chances, les syndicats des propriétaires et des locataires et les Sociétés de logement de service public.

    Une rencontre a d’ailleurs déjà eu lieu avec le Centre afin de baliser les pistes proposées et d’en faire mention dans la Réforme du logement privé que je présenterai prochainement au Gouvernement.

    2 pistes sont à mettre en évidence :

    1) Intensifier les actions de sensibilisation contre la discrimination

    Le Centre interfédéral pour l’égalité des chances souligne que la sensibilisation et la peur d’être pris en défaut donnent des résultats.

    On constate ainsi que les types de discriminations qui sont fréquemment abordés par les médias ou qui sont sanctionnés par les tribunaux (telle que la discrimination sur l’origine, par exemple) font l’objet d’une plus grande attention de la part des bailleurs et des agents immobiliers que les formes de discriminations dont on parle moins (telle que la discrimination basée sur le type de revenus).

    Il est donc nécessaire de développer la sensibilisation à la discrimination sur la base de la fortune auprès des bailleurs et des agents immobiliers.

    Différents moyens de sensibilisation peuvent être mobilisés :
    * Cette sensibilisation passe d’abord par la sanction en cas de discrimination, mais surtout par la publicité autour de cette sanction. La décision du tribunal de première instance de Namur du 10 mars dernier qu'a mentionné l'honorable membre dans sa question constitue effectivement une avancée dans la reconnaissance et l’application du droit au logement en Belgique. Cependant, elle ne peut réellement entraîner un changement dans les pratiques des bailleurs que si ceux-ci connaissent cette décision et redoutent d’être pris eux-mêmes en défaut.
    * Nous envisageons de mettre en place des « tests de situation » afin d’effectuer un « contrôle » sur les bailleurs et augmenter la probabilité que ceux qui discriminent soient pris en défaut.
    * Enfin, la sensibilisation doit se faire par le biais de l’information et le développement de codes déontologiques en collaboration avec les associations professionnelles (agents immobiliers, syndicat des propriétaires…).



    2) Réformer le marché immobilier

    Le manque de logements abordables sur le marché augmente les risques de discrimination sur base de la fortune. En effet, la demande de logements dépassant l’offre, les propriétaires sont en mesure de se montrer plus exigeants sur les candidats locataires et notamment refuser ceux qui, à leurs yeux, sont les plus susceptibles de ne pas payer leur loyer régulièrement (allocataires sociaux, familles monoparentales, personnes travaillant en CDD ou en intérim…).

    Pour limiter cette discrimination, il est donc nécessaire de rétablir l’équilibre du marché en augmentant l’offre de logements à prix abordables.

    Les solutions pour ce faire sont :
    * Augmenter le nombre de logements sociaux disponibles.
    * Favoriser la remise sur le marché de logements privés vides.
    * Soutenir et développer l’action des Agences Immobilières Sociales (AIS) qui répondent non seulement aux besoins des locataires (prix abordables, qualité, sécurité du logement), mais réduisent aussi le risque pour les bailleurs (les locataires bénéficient d’un encadrement social, les revenus locatifs sont garantis ainsi que l’entretien du bien).
    * La création d’un fonds régional des garanties locatives devrait également permettre de limiter la discrimination vis-à-vis des personnes les moins fortunées. Ce fonds se portera garant auprès du propriétaire du versement de la garantie complète même si elle n’est pas encore totalement constituée par le locataire auprès du fonds et dans ce cadre, permettre la portabilité de la garantie locative.
    * Enfin, l’élaboration d’une grille indicative de références des loyers en fonction des réalités foncières locales sera utilisée afin d’inciter les propriétaires à fixer un loyer raisonnable.