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La pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur de la boucherie

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 232 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 23/06/2015
    • de COURARD Philippe
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de l'Emploi et de la Formation

    En Province de Luxembourg, on peut observer un phénomène grandissant et pour le moins interpellant. Le secteur de la boucherie connaît un déclin progressif, faute de candidats attirés par le métier de boucher-charcutier et des bouchers indépendants de moins en moins nombreux rencontrant des difficultés à faire face à la conjoncture actuelle.

    Selon Philippe Bouillon, président provincial de la Fédération des bouchers, la Province connaît une diminution de 20 % des bouchers sur une période de dix ans. En cause, une image peu valorisante des métiers de bouche, un secteur en perte de vitesse, qui n’attire guère, a fortiori aux yeux des jeunes d’aujourd’hui.

    Ces indicateurs cumulés à un manque de compétitivité, une réglementation de l’AFSCA relativement stricte, des capacités d’adaptation difficiles aux normes européennes et une concurrence ardue avec les boucheries dites « halal » et celles des supermarchés.

    Ce manque cruel de candidats, de main-d’œuvre démontre à quel point il y a un besoin nécessaire de valorisation de ces métiers et de spécialisation au gré de l’évolution des demandes et habitudes des clients.

    Comment Madame la Ministre envisage-t-elle de faire face à cette pénurie de main-d’œuvre ? Quelles sont les pistes probantes pour redonner un coup de jeune à ces professions ?

    Un autre problème d’envergure se pose, il s’agit de l’absence de distinction entre le boucher industriel et l’artisan. Or, les techniques de travail, les processus de confection et de transformation de la viande sont sensiblement différents.

    N’y aurait-il pas lieu de mener une large réflexion sur une éventuelle scission à opérer entre les deux titres/professions, et d’attribuer une protection au métier d’artisan-boucher, dont la façon de travailler la viande est plus respectueuse des traditions d’antan et des normes de qualité ?
  • Réponse du 16/07/2015
    • de TILLIEUX Eliane

    La diminution du nombre de bouchers n'est pas un phénomène spécifique à la Province de Luxembourg. La substitution des petits commerçants par l'industrie alimentaire et la grande distribution est une réalité qui touche de nombreux métiers. Les causes de cette substitution sont nombreuses : la modification des modes de consommation, le coût des normes et contraintes (AFSCA, normes européennes) plus difficile à amortir sur des points de vente plus petits, etc.

    Par ailleurs, l’automatisation des processus de production en général modifie le secteur de l’industrie alimentaire en profondeur depuis des années déjà. Elle tend ainsi à faire diminuer la proportion d’emplois peu qualifiés dans le secteur, au bénéfice de fonctions demandant plus de responsabilités et de connaissances techniques.

    Comme le manque de diversité et la reproduction de gestes identiques caractérisent ce métier, les employeurs veillent généralement à accroître la polyvalence des bouchers. Une formation complémentaire orientée vers les normes d’hygiène, de qualité et de sécurité apparaît comme atout pour les bouchers « traditionnels ». Par ailleurs, les métiers de boucher et charcutier se différencient de plus en plus, les seconds étant de moins en moins présents dans l’industrie alimentaire en général.

    L'ensemble des éléments de contexte explique la diminution du nombre de boucheries « artisanales ».

    C’est pourquoi le Centre de compétence Epicuris, dédié notamment aux métiers de la viande, a déposé deux projets d’importance : le projet du Pôle de Compétitivité WagrAlim « Walmeat2u ! » ainsi qu’un projet, soutenu par les fonds européens, et visant le soutien au développement du secteur.
    Conscient des difficultés rencontrées par le secteur de la boucherie, le centre Epicuris et ses partenaires artisans, industriels et de formation (1) ont reçu la labellisation, par le Gouvernement wallon, d’un projet nommé Walmeat2U.

    Ce projet a l’objectif d’assurer la formation dans les métiers de la filière viande grâce à une offre modularisée et intégrée depuis l’abattage jusqu’au portionnage. Afin de répondre aux besoins des entreprises disséminées sur tout le territoire wallon et lever le frein de la mobilité des (futurs) travailleurs, un atelier de découpe mobile d’ongulés domestiques sera créé. Ainsi, la formation ira aux travailleurs et non plus le travailleur à la formation.

    L’offre de formation sera structurelle, elle permettra donc d’apporter une réponse rapide, souple et flexible aux employeurs confrontés à la pénurie de main-d’œuvre dans les métiers de la viande de la filière industrielle.

    Poursuivant le même objectif d’augmentation du nombre de personnes formées dans le secteur de la boucherie, le projet soutenu par le Fonds social européen et porté par Epicuris vise à décentraliser des formations dans le domaine de la viande. Ainsi, chaque année, plusieurs actions pourront se dérouler dans les régions où le besoin de main-d’œuvre est le plus criant !

    Par ailleurs, en ce qui concerne les référentiels métier, les métiers « industriels » et « artisanaux » sont bien distingués dans les référentiels utilisés par le service public. Tenant compte de toutes ces évolutions, suite à l'analyse du métier réalisée par le FOREM dans le cadre du projet Job Focus, le métier de boucher a été soumis au traitement du Service Francophone des Métiers et Qualifications (SFMQ).

    Enfin, la publication du Forem « métiers d’avenir pour la Wallonie » pointe deux métiers en lien avec la boucherie et présentant un potentiel de croissance de l’emploi : l’opérateur de fabrication alimentaire et le métier de découpeur-désosseur.

    L’opérateur de fabrication alimentaire travaille directement sur la ligne de production. Il garantit la qualité et la conformité du produit en contrôlant une série de paramètres comme la recette, la formulation, le goût et l’aspect visuel.
    Une offre de formation répond actuellement, en partie, à ce métier qui nécessiterait un niveau de qualification moyen (secondaire supérieur technique ou professionnel). Des formations spécifiques orientées sur le produit, la formulation et la recette seraient toutefois nécessaires selon les avis collectés dans le cadre de cette étude.

    Le découpeur-désosseur procède aux opérations de désossage et de découpe des viandes. Il dépièce, dégraisse, dénerve, classifie et conditionne les morceaux de viande, mais assure aussi l’entretien et le nettoyage du poste de travail.

    Les formations pour le métier de découpeur sur ligne de production n’existent pas, actuellement, en Belgique. Seuls des apprentissages en alternance ou des contrats d’apprentissage industriel en collaboration avec l’IFP sont envisageables.



    (1) Soutien de la fédération belge des bouchers, charcutiers et traiteurs, Lovenfosse, GHL Group, porcs Qualité Ardennes, Véviba en ce compris de la fédération belge de la viande, l’Initiative de Formation Professionnelle de l’industrie alimentaire (IFP)