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La prostitution dans le cadre du plan 2015-2019 de lutte contre les violences sexistes et intra-familiales

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 729 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 17/07/2015
    • de RYCKMANS Hélène
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Le Gouvernement wallon vient d'adopter, en concertation avec le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles et celui de la Commission communautaire française (COCOF), le plan 2015-2019 de lutte contre les violences sexistes et intrafamiliales.

    Ce plan se présente en cohérence avec le Plan national de lutte contre les violences basées sur le genre. Il intègre aussi les exigences de la Convention d’Istanbul, signée par la Belgique en 2012, sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Mais le plan 2015-2019 renforce et étend son champ d’action à la lutte contre les violences de genre et les violences sexuelles. Il intègre notamment la prostitution comme une violence faite aux femmes.

    Monsieur le Ministre pense-t-il présenter ce Plan au Parlement wallon ? Pourrait-il me préciser ce que le Plan intrafrancophone a fixé comme position et comme objectifs à réaliser en matière de lutte contre la prostitution ?

    Dans ce contexte, j'aimerais l'entendre concernant l'Eros center de Seraing, déjà précédemment évoqué ici.

    La Région wallonne a en effet été interpellée sur ce projet par notamment le Conseil des femmes francophones de Belgique.

    Monsieur le Ministre a certainement été informé du fait que des associations ont écrit au bourgmestre de Seraing, mais également au ministre-président et sont prêtes à agir en justice contre ce projet. Elles estiment en effet qu'il est, en soi, une violence à l’égard des personnes prostituées et un obstacle à l’égalité femmes-hommes. Un Eros center contrevient également à la législation comme elles l’ont démontré dans leur argumentation.

    J'aimerais connaître la position du Gouvernement wallon sur ce dossier. Quelle est-elle ?

    Le cas échéant, quelles sont les mesures que le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre pour empêcher la mise en place de tels Eros center et ainsi réduire, ou à tout le moins ne pas renforcer, l'exploitation de la prostitution ?
  • Réponse du 03/08/2015
    • de PREVOT Maxime

    J’accuse bonne réception de votre question et vous en remercie.

    Elle me donne l’occasion d’aborder les principales mesures wallonnes qui sont et seront mises en œuvre, durant la législature, en matière de lutte contre les violences sexuelles, dans le cadre du nouveau Plan intrafrancophone de lutte contre les violences sexistes et intrafamiliales 2015-2019, passé, le 2 juillet dernier, au Gouvernement wallon.

    La Wallonie, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Cocof ont uni leurs efforts pour présenter, moins d’un an après l’installation des gouvernements et avant le Gouvernement fédéral, un nouveau Plan montrant ainsi l’importance que nous accordons à cette thématique.

    Ce Plan comporte 176 mesures dont 74 impliquent la Wallonie, en partenariat avec d’autres entités fédérées pour 44 d’entre elles. Un grand nombre concerne aussi bien les violences sexuelles que les autres types de violences physiques ou psychologiques : je pense, par exemple, aux Services ambulatoires, que nous finançons et pour lesquels je veux rédiger un Décret, les maisons d’hébergement, la ligne d’Écoute violences conjugales 0800 30 030, etc.

    En matière de violence sexuelle stricte, voici les principales mesures wallonnes qui seront mises en œuvre :

     proposition de formations adaptées et complètes en matière de violences sexuelles destinées aux médecins généralistes (notamment basées sur les Protocoles de prise en charge des victimes de violences sexuelles mis au point par la Commission Violences du Conseil des femmes francophones de Belgique) ;
     sensibilisation des victimes de violences sexuelles afin qu’elles fassent une déposition à la police le plus rapidement possible après les faits ;
     amélioration de l’accessibilité de certains groupes (d’origine étrangère, déficience mentale, problèmes psychiatriques) aux programmes d’aide aux auteurs de violences sexuelles ;
     soutien aux initiatives des ONG internationales, belges et locales qui se concentrent sur la protection des femmes et qui luttent contre les violences sexuelles ;etc.

    En ce qui concerne plus spécifiquement la lutte contre la prostitution (forcée), il s’agit, d’abord, de protéger et de soutenir les victimes (article 22 du Plan) et, ensuite, de mettre à disposition des victimes un nombre d'hébergements suffisants et adéquats (article 23).
    Pour ce faire, le PAN prévoit la mise en œuvre du décret wallon du 27 mars 2014 créant des services d'aide et de soins aux personnes prostituées, via l'adoption d'un arrêté du gouvernement wallon.

    Le décret du 27 mars 2014 vise à mettre en œuvre une politique de protection de ces personnes, à aider celles et ceux qui souhaitent quitter un réseau de prostitution, à améliorer leurs conditions de vie et leur sécurité en agréant et en subventionnant les services et les structures qui répondent et contribuent à la réalisation de ces objectifs.

    En Wallonie, des associations travaillent de manière ambulatoire avec les personnes qui se prostituent, en assurant une aide et un accompagnement psycho social par le biais de l’information et d’actions préventives.

    Le décret établit les critères et les objectifs justifiant l’octroi d’agrément et de subventionnement des centres.

    Aux termes de ces dispositions, sept services sont potentiellement susceptibles d’être agréés et subventionnés : un service par province de moins de 400.000 habitants, un service par province comptant entre 400.000 et un million d’habitants, deux services par province de plus d’un million d’habitants.

    Actuellement, trois services sont subventionnés en Wallonie : Icar Wallonie, Espace P et Entre 2 Wallonie.

    En ce qui concerne la mise à disposition d’hébergements suffisants et adéquats pour les victimes de violences, le Plan intrafrancophone prévoit la poursuite du financement de l'ASBL Sürya pour l'accueil, l'accompagnement et l'hébergement de personnes victimes de la traite des êtres humains, y compris l'exploitation sexuelle.

    Quant au projet relatif à l’Eros center de Seraing que vous évoquez, il a été conçu à l’initiative de l’ASBL Isatis. La Région wallonne n’est pas intervenue dans ce dossier.

    Personnellement, je tiens à préciser que je n’ai pas été interpellé à ce sujet par le Conseil des femmes francophones de Belgique. Le ministre-président m’a bien transmis la lettre des associations prêtes à agir en justice contre ce projet, qui a retenu toute mon attention. J’étudie la question et je serai aussi très attentif aux résultats de l’étude qualitative que la Fédération Wallonie Bruxelles entend mener sur la prostitution dans le cadre du plan de Lutte contre les violences sexistes.

    Mon cabinet qui participe activement à la rédaction du prochain Plan fédéral de lutte contre les violences, actuellement en cours d’élaboration, a aussi appris, le 15 juillet dernier lors d’une réunion préparatoire, qu’il y avait aussi un projet d’enquête davantage quantitative sur la prostitution au niveau de la Secrétaire fédérale de l’Égalité des chances.

    Comme l'honorable membre le voit, un important travail va être réalisé dans ce domaine, sous cette législature, qui donnera au Gouvernement wallon les éléments pour prendre position et, plus important encore, pour prendre les mesures efficaces qui s’imposent.

    D’ici là, je me tiens évidemment à votre disposition si le Parlement wallon souhaite davantage d’informations sur le Plan intrafrancophone de lutte contre les violences sexistes et intrafamiliales : je pourrais, par exemple, le présenter davantage dans le détail, lors d’une réunion du Comité d’avis pour l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, s’il juge utile de m’y inviter.