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Le rôle des communes dans la mise en oeuvre du Plan de lutte contre la pauvreté

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2015
  • N° : 24 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 01/10/2015
    • de LENZINI Mauro
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Le nouveau Plan wallon de lutte contre la pauvreté (PLCP) vise à intégrer la lutte contre la pauvreté de manière transversale dans l'ensemble des politiques.

    Les différents axes thématiques visent toute personne vivant ou susceptible de vivre dans un état de pauvreté.

    Le Gouvernement wallon a décidé de ne plus cibler les revenus, mais les capacités de dépenses.
    L'indicateur de « déprivation matérielle », utilisé sur la base des recommandations de l'IWEPS, permet de dire si une personne se trouve dans cette situation.

    Si elle ne peut pas couvrir trois des neufs postes suivants, elle se trouve en situation de déprivation matérielle : faire face à des dépenses imprévues, manger tous les deux jours un repas contenant des protéines, chauffer correctement son logement, partir une semaine en vacances par an, éviter les arriérés de crédit, de loyer et de paiement, disposer d'une voiture, d'une télévision, d'un téléphone et d'une machine à laver.

    Comme le montrent différentes études, la précarité est inégalement répartie sur le territoire wallon ; les communes historiquement moins bien loties doivent faire face à un grand nombre de dépenses grevant le budget communal et empêchant une allocation de ressources destinées à des projets communaux.

    Dans le cadre de la mise en place du plan, pouvons-nous avoir des précisions sur les mesures mises en place commune par commune ? De quelle manière et sur quelle base seront répartis les efforts à fournir par les communes ?
  • Réponse du 20/10/2015
    • de FURLAN Paul

    Compte tenu de l’importance que revêt aujourd’hui la lutte contre la pauvreté en Wallonie, c’est mon collège Paul Magnette, Ministre-Président, qui est chargé d’assurer la coordination de la politique.

    En effet, un working paper de l’IWEPS (« Regards sur la pauvreté et les inégalités en Wallonie » – septembre 2013) stipule qu’avec un taux de 7,4 sur 10, la situation de la Wallonie est considérée comme sévère, sachant que le taux moyen de la Belgique s’élève à 5,7 sur 10. On parle de privation matérielle grave lorsqu'une personne n’est pas en mesure de faire face à au moins 4 des 9 situations suivantes :
    1. payer un loyer ou des factures courantes ;
    2. chauffer correctement son domicile ;
    3. faire face à des dépenses imprévues ;
    4. consommer de la viande, du poisson ou un équivalent de protéines tous les deux jours ;
    5. s’offrir une semaine de vacances en dehors du domicile ;
    6. posséder une voiture personnelle ;
    7. posséder un lave-linge ;
    8. posséder un téléviseur couleur ;
    9. posséder un téléphone.

    Les résultats de cette étude démontrent combien il est important de soutenir l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action global de lutte contre la pauvreté qui doit comporter toute une série de mesures et disposer d’un outil statistique adapté.

    De manière générale, on sait que la pauvreté en Wallonie se concentre le plus souvent dans le Hainaut, les arrondissements de Liège et de Verviers et le sud namurois dans l’arrondissement de Philippeville. Par contre on ne sait globalement pas démontrer que les communes à population pauvre dépensent davantage d’argent dans des politiques sociales. L’analyse des budgets communaux 2015 montre que les communes à population pauvre et celles à population riche consacrent environ 14 % de leur budget ordinaire à l’exercice propre au financement de politiques sociales et liées à l’emploi.

    Plusieurs mécanismes de financement des communes tiennent déjà compte du niveau de pauvreté de la population :
    - Le fonds des communes avec la tranche IPP de la dotation de péréquation fiscale ;
    - Le fonds régional d’investissements communaux avec le revenu moyen par habitant ;
    - Le futur mécanisme de financement du PCS.

    Par ailleurs, la Région wallonne a décidé de lier l’octroi de primes aux particuliers en tenant compte des revenus de ceux-ci afin de davantage centrer les aides sur les personnes les plus démunies.

    Pour ce qui concerne mes compétences, une des mesures évoquées dans le Plan wallon de lutte contre la pauvreté et citées ci-dessus est la réforme des Plans de cohésion sociale des Villes et Communes de Wallonie, démarche menée à l’échelon local pour lutter contre la pauvreté.

    Il s’agit là du principal ancrage local du Plan, mais il y en a d’autres que je citerai plus loin.

    Après une première programmation 2009-2013, le Gouvernement wallon a décidé de reconduire le PCS pour la période 2014-2019. 181 communes (170 communes porteuses puisque certaines se sont regroupées) se voient octroyer ainsi une subvention annuelle totale de 21 millions d’euros.

    Lors de cette programmation 2014-2019, les projets rentrés ont été appréciés sur base des critères suivants :
    - L'appréciation de l'indicateur synthétique d’accès aux droits fondamentaux ;
    - L'appréciation du diagnostic de cohésion ;
    - La cohérence entre les actions proposées dans le plan, les indicateurs synthétiques d’accès aux droits fondamentaux et le diagnostic de cohésion ;
    - L'appréciation de la qualité des partenariats établis entre les communes et les institutions, services ou associations associés à la réalisation des actions du Plan.

    Face à ce constat de dégradation économique et de précarisation des populations les plus défavorisées, les PCS doivent continuer à améliorer la situation des personnes les plus touchées par ce phénomène, en tenant compte de leurs attentes et des types de problèmes qu’elles rencontrent : solitude, problèmes relationnels, manque de formation, difficultés d’accès au logement…

    Le Gouvernement a donc souhaité, via le Plan wallon de lutte contre la pauvreté, recentrer les actions du PCS et optimiser le dispositif afin de :
    - Diminuer la charge administrative pesant sur les communes et, dès lors, dégager des moyens humains et financiers qui pourront être affectés, dès 2016, soit à de nouvelles actions, soit au renforcement d’actions existantes ;
    - Veiller à ce que les différents axes du PCS intègrent une dimension relative à la lutte contre la pauvreté ;
    - Mettre en œuvre le principe d’un droit de tirage permettant aux communes de se voir octroyer un montant dédicacé au PCS, qui sera libéré en fonction des axes de travail proposé ;
    - Encourager le travail en commun de tous les acteurs locaux ;
    - Favoriser les actions en supra-communalité (pour les petites et moyennes communes).

    Au-delà du PCS, d’autres mesures en lien avec mes compétences sont développées au niveau local pour lutter contre la pauvreté :

    Le Fonds de réduction du coût global de l'énergie (FRCE). Il a pour mission de soutenir la réalisation d’investissements économiseurs d’énergie dans des habitations privées par l’octroi de prêts. Le FRCE n’octroie cependant pas d’aide directe aux particuliers. Celle-ci passe par le biais de structures baptisées « Entités locales », avec lesquelles le FRCE conclut un contrat de collaboration.

    Ce dispositif de soutien est désormais sous la tutelle de la Société wallonne du crédit social.
    En misant sur l'expérience des entités locales du FRCE, le Gouvernement entend, via le PLCP, leur confier de nouvelles missions, en vue de :
    - Préparer les dossiers de demandes de prêt afin de les introduire dans le dispositif Ecopack/Renopack. Les entités locales pourront se concentrer sur le volet « accompagnement social » des demandeurs, en amplifiant notamment les partenariats étroits avec les CPAS, conformément au mode de fonctionnement hérité du fédéral ;
    - Identifier l’ensemble des autres incitants et aides (fédéraux, provinciaux et communaux) permettant aux personnes les plus précarisées de financer des investissements économiseurs d’énergie ;
    - Inscrire davantage encore les entités locales dans une logique de bassin de vie lorsqu’elles définissent leur territoire d’action.

    Les actions menées par les pouvoirs locaux contre les marchands de sommeil. Ces derniers sont des propriétaires qui vendent ou donnent en location à des Belges ou étrangers, des chambres ou un local à des prix manifestement trop élevés ou dans un état très insalubres, sachant que ces personnes, le plus souvent en situation irrégulière, sont dans l’incapacité de faire valoir leurs droits.

    Dans le cadre du PLCP, le Gouvernement souhaite :
    - Encourager les pouvoirs locaux à établir des mesures préventives à l’égard des propriétaires, en favorisant la coordination interservices locale dans l’octroi des permis de location et en développant la recherche spontanée afin de repérer les marchands de sommeil ;
    - Les sensibiliser à la problématique, en collaboration avec les parquets, afin qu’ils adaptent leurs sanctions en la matière ;
    - Les encourager dans leur action, en favorisant une meilleure articulation avec la police locale et en appuyant l’inscription de cette thématique dans la Note-cadre de sécurité intégrale du Gouvernement fédéral.

    Au sein du PLCP, les CPAS et communes sont également ciblés dans d’autres mesures telles que :
    - Le soutien au développement des taxis collectifs ;
    - L’accompagnement des CPAS dans l’information des populations fragiles sur les possibilités de suivi médical ;
    - L’implication des Espaces Publics Numériques (EPN) dans l’e-inclusion des citoyens ;
    - L’achat de produits de seconde main dans les magasins d’économie sociale.

    L'honorable membre l’a constaté, la dimension locale du plan wallon de lutte contre la pauvreté est indéniable : des leviers existent au niveau local, il convient donc de les actionner.

    Je m’efforcerai en tant que Ministre des Pouvoirs locaux d’encourager les communes à y adhérer et surtout à concourir à la concrétisation des projets qui traduisent ses objectifs en actions.