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La dégradation de la santé au travail

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2015
  • N° : 265 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 25/11/2015
    • de MARTIN Nicolas
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Récemment, plusieurs indices concordants amènent à envisager une sérieuse dégradation de la santé au travail et, notamment, de la santé mentale. 

    Ainsi, le baromètre SECUREX met en évidence plusieurs chiffres interpellants comme le pessimisme de plus de 40 % des Belges à pouvoir assumer leur travail jusqu’à l’âge de la pension, face à une charge physique trop importante. Cette donnée représente une hausse notable de 10 % par rapport à 2013. 

    Par ailleurs, concernant les travaux physiques, 46 % des personnes sondées seraient confrontées à une affection constatée par un médecin et liée à leur travail. En parallèle à ce baromètre, l’INAMI constate sur le terrain une hausse persistante des cas d’absence au travail de longue durée. 

    Enfin, au niveau de la santé mentale, seuls 49 % des sondés affirment évoluer dans un environnement de travail qualifié de « bon ». En outre, la dépression est un phénomène en forte progression, mais surtout, en progression constante ces dernières années. 

    Si le récent recul de l’âge légal de la retraite est clairement un facteur pouvant en partie expliquer l’évolution spectaculaire de ces chiffres sur une courte période, le Gouvernement peut agir sur d’autres composantes de cette dégradation des conditions de travail.

    Ainsi, dispose-t-on de chiffres détaillés au sujet de la santé au travail concernant la Wallonie ? Quelles sont les actions de prévention prévues afin de remédier à cette situation ? Face à l’augmentation de la longévité au travail, la question de l’aménagement des emplois présentant une pénibilité particulière sera-t-elle portée au comité de concertation ?
  • Réponse du 16/12/2015 | Annexe [PDF]
    • de PREVOT Maxime

    La santé des travailleurs ne relève pas de la compétence régionale, mais bien de la compétence fédérale.
    Lors de la dernière réforme de l’État et suite à l’accord intra-francophone, la Wallonie est devenue compétente pour gérer la partie administrative de l’agrément des services médicaux du travail (services internes et externes de prévention et de protection au travail [SIPPT et SEPPT], depuis le 1er juillet 2014 et les décisions d’agrément sont du ressort du Ministre wallon de la Santé. La mission consiste donc à agréer la section « surveillance médicale » francophone ; cet agrément partiel permet ensuite aux services externes de prévention et de protection d’être agréés dans leur globalité, y-compris, la section de gestion des risques, par le SPF Emploi.

    Dès lors, et pour information, voici quelques données intéressantes :

    1) Les chiffres de la santé du travail en Wallonie

    D’une façon générale le Profil National Belge Pour La Sécurité Et La Sante Au Travail daté du 20 février 2015 présente des chiffres généraux de la Belgique ([http://www.beswic.be/fr/systems/ProfilNational_FR_20150220.pdf] [Rapport 2014 du fonds des accidents du travail est disponible sur le site http://www.fat.fgov.be/sites/default/files/assets/FR/Rapports_annuels/rapport_annuel_2014.pdf])

    * Accidents de travail

    Dans le tableau statistique de ce profil (présenté en page 74), les constats d’accidents de travail suivants, pour la Belgique et pour le secteur privé, concernent les années 2008 à 2013 :
    - Le nombre annuel d’accidents mortels est qualifié de stable (de 114 à 170)
    - Le nombre d’accidents de travail (occasionnant plus de 3 jours d’absence) des accidents de travail majeurs (incapacité de plus de 30 jours) et d’accidents de travail indemnisés est décroissant
    - Le nombre d’accidents sur le trajet du travail est qualifié de stable


    * Maladies professionnelles (http://www.fmp-fbz.fgov.be/web/content.php?lang=fr&target=workers#/documentations-publications)

    En 2014, le Fonds des maladies professionnelles (FMP) a reçu 10 542 premières demandes. Il s’agit ici des demandes pour obtenir une indemnisation pour une incapacité temporaire, une incapacité permanente ou des soins de santé.

    Bien que le nombre de demandes ait diminué par rapport à 2013, cela reste un chiffre très important. Il faut remonter à la fin des années 70 pour retrouver un chiffre supérieur à 10.000 demandes. Il faut savoir qu’à l’époque, ce nombre de demandes était normal étant donné les nombreuses demandes en matière de silicose. Depuis le milieu des années 90, le nombre de demandes est resté stable jusqu’en 2013 où l’on a vu le nombre de demandes augmenter de près de 63 %.
    L’augmentation constatée en 2013 est en relation directe avec l’inclusion de la tendinopathie sur la liste des maladies professionnelles fin 2012. Nous constatons que depuis lors, le nombre de demandes pour cette maladie a fortement augmenté. En 2014 également, la majorité des demandes est liée à la tendinopathie (3528), bien qu’il y ait une nette diminution du nombre de demandes par rapport à 2013 (4722 demandes). Le nombre de demandes pour le syndrome du canal carpien a fortement augmenté (de 929 demandes en 2012 à 1684 en 2014), tandis que le nombre de demandes pour d’autres pathologies est demeuré relativement stable par rapport à 2012 et 2013. Viennent ensuite les demandes relatives aux affections lombaires (1369). Suivent les demandes concernant les pathologies osseuses, articulaires et discales (1081), le système respiratoire (1025), l’hypoacousie ou la surdité (630), les dermatoses (588), et les maladies ostéo-articulaires des membres supérieurs (340).
    Lorsqu’on répartit les demandes pour obtenir une indemnisation pour une incapacité temporaire, une incapacité permanente ou des soins de santé, par province, on constate que les habitants du Hainaut (22,4 %) et de la province de Liège (20,9 %) sont de loin ceux qui introduisent le plus de demandes. Viennent derrière les provinces flamandes (à savoir la Flandre occidentale [9,3 %], la province d’Anvers [8,7 %], la Flandre orientale [8,6 %], le Limbourg [7,9 %] et le Brabant flamand [5 %]. Seuls 3,8 % des demandes proviennent de la région de Bruxelles.

    En 2014, le FMP a pris 3608 décisions positives, contre 7012 décisions négatives suite à une première demande.

    La tendinopathie a bien entendu été la cause du plus grand nombre de décisions. De manière générale, pour l’ensemble des décisions [toutes pathologies confondues], le nombre de rejets est supérieur au nombre de décisions positives. Il y a bien sûr le nombre élevé de décisions négatives pour les tendinopathies, mais aussi les décisions concernant les affections lombaires, et celles pour les pathologies osseuses, articulaires et discales.

    Les maladies professionnelles se déclarent surtout à un âge avancé. Le groupe des 40-49 ans [30,7 %] et le groupe des 50-59 ans [35,7 %] se taillent la part du lion. Les plus de 60 ans représentent encore 13,2 % des décisions positives envoyées par le FMP.

    La deuxième mission importante du FMP, après l’indemnisation des victimes, est la prévention des maladies professionnelles. Elle concerne la vaccination et la prévention des maux de dos. Une enquête d’exposition avec avis préventif peut aussi être menée.

    Enfin, et pour mémoire, le FMP a dépensé en 2014 environ 300 millions d’Euros essentiellement en indemnisations diverses, principalement pour des incapacités de travail permanente [ITP].



    2) Actions de prévention

    La loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail est la loi de base dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail. Le code sur le bien-être au travail comprend les mesures d'exécution qui ont été promulguées depuis 1993. Pour ce faire, une structure a tout d'abord été fixée, qui a été progressivement complétée. Le chapitre V de ce code est relatif à la prévention des risques psychosociaux et comporte différentes mesures (Arrêté royal du 10 avril 2014 relatif à la prévention des risques psychosociaux au travail [M.B. 28.4.2014]) . Une stratégie nationale en matière de bien-être au travail 2008-2012 présentée le 27 novembre 2008, par la ministre de l’Emploi, Joëlle Milquet, avait pour objectif principal de réduire le nombre des accidents du travail, mais aussi de mettre l’accent sur les problèmes de bien-être nouveaux (stress, drogue, alcool, nouvelles technologies, …).
    Différentes actions sont menées localement, par exemple, la stratégie SOBANE de gestion des risques professionnels a été développée pour aider à mettre en place une gestion dynamique et efficace des risques. Elle comporte quatre niveaux d'intervention : Dépistage (Screening), Observation, Analyse et Expertise.



    3) La question de l’aménagement des emplois portée au comité de concertation

    Pour information, conformément à la Convention n° 81 de l’OIT et la Loi bien-être au travail, le gouvernement est tenu de faire contrôler l’état des connaissances en matière de SST et a en concertation avec les employeurs et les travailleurs, dans ses responsabilités, de déterminer, de suggérer et parfois de réévaluer la politique SST et d’encourager l’harmonisation de toutes les lois pertinentes en vue de promouvoir la SST. Dans cet objectif, le gouvernement belge a créé un organe bipartite, le Conseil supérieur pour la Prévention et la Protection au Travail dont les membres ayant un vote délibératif sont des représentants des organisations représentatives des employeurs et des syndicats, d’autres membres relèvent des institutions publiques ou représentent d’autres organismes actifs dans le domaine SST.

    Le bien-être au travail est de la responsabilité politique du ministre de l’Emploi et partiellement pour ce qui concerne la mise sur le marché de produits, de substances et de services du Ministre de l’Économie et du Ministre de la Santé publique. Conformément à la Loi bien-être au travail, le ministre de l’Emploi est responsable de l’élaboration des réglementations relatives à la SST, du contrôle de la SST dans la pratique, de la formulation de mesures et d’activités d’encouragement en vue de promouvoir la SST.

    Le Conseil supérieur pour la Prévention et la Protection au Travail a remplacé en 1999 le Conseil supérieur pour la sécurité, la santé et l'embellissement des lieux de travail. Le Conseil supérieur PPT a été réformé en 2006 de sorte que le Conseil comprend maintenant aussi toutes les commissions d’agréments qui sont comprises dans la réglementation sur le bien-être au travail et au sein desquelles les partenaires sociaux sont représentés.

    Le Conseil supérieur a avant tout la mission de donner un avis sur demande concernant les mesures relatives aux domaines décrits dans la Loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail. Cependant, le Conseil supérieur peut également discuter de son propre chef de problèmes à ce sujet et remettre un avis. Le site Internet est : http://www.emploi.belgique.be/defaultTab.aspx?id=577