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La gestion in situ de pollutions de sites grâce aux phytotechnologies

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2015
  • N° : 241 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 25/11/2015
    • de TROTTA Graziana
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire, de la Mobilité et des Transports, des Aéroports et du Bien-être animal

    Il y a plusieurs mois j'interrogeais Monsieur le Ministre au sujet des phytotechnologies comme technique de dépollution des sols, autrement dit la dépollution par le biais d'espèces végétales possédant des capacités particulières pour assainir le sol.

    Dans sa réponse, il relatait une expérience fructueuse d'assainissement par phytoremédiation menée sur le site d'un ancien dépôt pétrolier à Saint-Ghislain par la société anonyme Total Belgium en collaboration avec l'Université catholique de Louvain, où les terres polluées en hydrocarbures ont été assainies sur deux ans et la réhabilitation du site a été approuvée par l'administration.

    Au moment de me répondre, Monsieur le Ministre organisait des rencontres entre son cabinet et un consortium d’universitaires experts en phytoremédiation « afin de réaliser un état des lieux complet des techniques disponibles pour une gestion in situ de pollutions légères et plutôt superficielles, sur des terrains ne devant pas faire l’objet d’un projet de développement à court ou moyen terme ».

    Par conséquent peut-il m'indiquer où en est le travail en la matière ? L'état des lieux a-t-il été élaboré et dans l'affirmative, peut-il me faire part des techniques qu'il juge les plus intéressantes pour la gestion in situ de pollutions ? Quelles initiatives compte-t-il prendre sur cette base ? D'autres expériences vont-elles être menées avec le soutien de la Région wallonne et, si oui, peut-il me communiquer des détails ?
  • Réponse du 14/12/2015
    • de DI ANTONIO Carlo

    La phytoremédiation consiste principalement en deux types de techniques :
    1. Phytostabilisation : principe selon lequel les polluants présents dans le sol sont stabilisés par le système racinaire d’une espèce végétale tolérante à de fortes concertations en polluants. Les polluants sont « immobilisés » par le système racinaire et leur biodisponibilité, ainsi que leur mobilité dans le sol sont réduites. La phytostabilisation permet de confiner les polluants dans la rhizosphère (zone racinaire) et donc de limiter leur lessivage ou le transport aérien par érosion des particules de sol chargées en polluants.
    2. Phytoextraction : principe selon lequel les polluants du sol sont prélevés par les racines, et ensuite transférés dans les parties aériennes de la plante (feuilles, tiges) où ils sont stockés. Certaines espèces végétales, dites hyperaccumulatrices peuvent stocker jusqu’à mille fois plus de métaux lourds que d’autres végétaux. L’avantage de la phytoextraction est de pouvoir extraire les polluants du sol en les transférant vers la biomasse.

    Ainsi, dans le cadre de la gestion in situ de terrains pour lesquels la dépollution n’est pas urgente, le groupe d’experts rencontré dans mon cabinet est unanime quant au choix des techniques de phytostabilisation. Le recours à cette dernière se fera dans le but de confiner une pollution, et donc de limiter les risques de pollution de terrains alentour. En outre, le peu de gestion nécessaire de la biomasse (inévitable en phytoextraction) devrait représenter un gain de temps et d’argent considérable pour le porteur de projet. Il faut toutefois rappeler que le recours à la phytostabilisation n’assurera pas l’assainissement total du site (à moins de pollution très superficielle – 0/30cm), mais permettra de commencer à l’assainir et à confiner la pollution, dans l’attente d’un traitement plus lourd et en profondeur, s’il y a lieu. Les scientifiques soulignent que l’apparition d’une végétation foisonnante recouvrant les terrains pollués représente un atout paysager évident. Les chercheurs rencontrés ont cependant souligné que les connaissances sur les espèces accumulatrices de polluants sont limitées et qu’une mise en œuvre à grande échelle par des bureaux d’étude, par exemple, n’est pas envisageable pour l’instant. Des projets exploratoires seraient donc à encourager par rapport à une mise en œuvre « industrielle » des techniques.

    Jeudi 10 décembre dernier, je me suis rendu dans l’agglomération de Creil, au nord de Paris, où depuis 2013, une ancienne usine est mise à la disposition de chercheurs de l’Institut National de l'Environnement Industriel et des Risques (Inéris) pour conduire des recherches en phytoremédiation. Des saules des vanniers et des arabettes de Haller y sont testés pour leur capacité à accumuler du zinc et du cadmium. Les résultats des deux premières années sont encourageants. La gestion de la biomasse imprégnée reste cependant un défi de taille. La phytoremédiation semble plus appropriée à de petites surfaces, faiblement ou moyennement polluées. Cette technique pourrait également être utilisée pour le traitement des boues issues du dragage des cours d’eau. Elle doit donc être considérée comme une solution parmi d’autres.