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La discrimination au logement dans le cadre du marché locatif

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2015
  • N° : 182 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 07/12/2015
    • de MARTIN Nicolas
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Chaque année, plus de 150 dossiers sont ouverts par le Centre interfédéral pour l’égalité des chances pour des problèmes de discrimination liés au logement.

    En 2014, ce sont 156 dossiers nouveaux qui ont vu le jour. Différents points d’achoppement sont relevés par le Centre, comme l’utilisation de critères de fortune pour sélectionner les candidats locataires, de critères raciaux ou liés à un handicap. 

    Le marché semble donc connaître un problème de discrimination, qui peut en partie s’expliquer par la crise économique ou les mauvaises expériences parfois vécues et qui ne font que renforcer la frilosité des propriétaires, sans que celui-ci en devienne acceptable pour autant.

    Afin de participer à la résolution de ce problème, le Centre interfédéral pour l’égalité des chances vient de publier une brochure à destination des propriétaires visant à les informer le plus clairement possible de ce que la loi prévoit en matière de sélection des candidats locataires.

    Le Code du logement et de l'habitat durable étant à l’heure actuelle en pleine révision, ma question est simple : face à ce problème et à la méconnaissance des procédures légales en vigueur, Monsieur le Ministre envisage-t-il de mener des actions concrètes et, si oui, de quel ordre ?  
  • Réponse du 05/01/2016
    • de FURLAN Paul

    Le principe de la non-discrimination est consacré par divers instruments, et notamment par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination. L’article 4, 4° de cette loi établit une liste de critères protégés, sur base desquels un traitement différencié sera prohibé, parmi lesquels on trouve notamment la fortune.

    En réponse à sa question, je me permets tout d’abord de rappeler à l’honorable membre que la discrimination dans le secteur du marché locatif privé s’inscrit dans le contexte, d’une part, d’une offre qui est insuffisante pour répondre à la demande, et, d’autre part, des impayés et de l’irrégularité du paiement des loyers, auxquels peut être confronté le bailleur.

    Le fait pour le bailleur de s’assurer de la solvabilité de son futur locataire constitue un but légitime pouvant justifier des traitements différents en fonction du critère de la fortune par rapport au loyer demandé.

    La pratique consistant à demander aux candidats des preuves de revenus est également admise.

    À cet égard, le Centre interfédéral pour l’Égalité des Chances et la Lutte contre le Racisme, en collaboration avec l’Institut des Professionnels de l’Immobilier (IPI), a établi une fiche type reprenant les renseignements que peut réclamer un propriétaire ou un agent immobilier aux candidats locataires.

    Sur le plan civil, la discrimination a fait l’objet de l’attention du législateur fédéral qui, en 1997 et en 2007, a mis en place dans le cadre du droit du bail de résidence principale, deux dispositions pour tenter d’atténuer d’éventuelles pratiques discriminatoires, comme :
    * L’usage rendu obligatoire d’un formulaire standard et neutre lors de la constitution d’une garantie bancaire par l’intermédiaire du CPAS (art. 10).
    * La règle selon laquelle le loyer de base doit, sous certaines conditions rester identique en cas de conclusion de baux successifs de courte durée avec des preneurs différents (art. 7, §1bis).

    Par ailleurs, dans le droit commun du contrat de louage, toute publicité de mise en location doit indiquer le montant du loyer et des charges communes, sous peine d’une amende administrative d’un montant variant entre 50 et 200 euros (art. 1716 du Code civil).

    Toutefois, ces mesures manquent singulièrement d’effectivité :
    * La plupart des CPAS ont conservé des pratiques sui generis s’écartant de la pratique neutre qu’entendait instaurer le législateur au niveau de la constitution de la garantie locative. L’effet stigmatisant, qui peut résulter de l’intervention du CPAS, est maintenu par le fait que le bailleur est informé de l’aide apportée par le Centre.
    * Si un logement fait l’objet de baux successifs, conclus avec des preneurs différents pour une durée inférieure ou égale à 3 ans, auxquels le bailleur met fin moyennant un congé, le loyer de base ne peut, pendant 9 années successives, être supérieur au loyer de base exigible au début de cette période, éventuellement indexé, sauf si la valeur locative normale du bien loué a augmenté de 20 % au moins par le fait de circonstances nouvelles ou de 10 % au moins en raison de travaux effectués dans le bien loué. Les conditions financières, ainsi que les modalités de résiliation des contrats antérieurs ne sont pas nécessairement connues des candidats locataires, avec pour conséquence de réelles difficultés probatoires et d’efficience de la mesure.
    * Les communes doivent veiller au respect de l’obligation d’affichage du montant du loyer et des charges communes lors de toute mise en location, mais sans disposer de moyens supplémentaires pour assurer ce contrôle. Rares sont celles qui ont adopté un règlement communal permettant d’infliger des amendes administratives. En outre, le montant de loyer indiqué sur l’annonce ne lie pas le bailleur, qui peut ainsi écarter une frange de candidats, en fixant un loyer élevé pour consentir au preneur qu’il agrée une diminution de prix.

    La réforme du droit du bail d’habitation est l’occasion, non seulement d’évaluer, d’amender et de renforcer, le cas échéant, ces dispositifs, mais aussi d‘affirmer que la Wallonie mettra en oeuvre des mesures utiles pour tenter de garantir à chacun une égalité d‘accès au logement.

    Dans cette optique, constituer la garantie locative est le premier frein à l’accès à un logement pour nombre de candidats locataires.

    La garantie locative est pour le bailleur un marqueur de la capacité financière du futur preneur, lui permettant d’esquisser le profil des candidats et, le cas échéant, de solliciter d’autres sûretés, comme la caution.

    Le Fonds régional des garanties locatives que je compte mettre en place, s’appuiera sur deux principes : tout d’abord, un étalement du versement de la garantie locative, ensuite, sa portabilité.

    Le Fonds se portera garant auprès du bailleur du respect des obligations du preneur.

    Avec cet outil, le Gouvernement veillera ainsi à prévenir d’éventuels problèmes de solvabilité, de sélection et de stigmatisation des candidats-locataires.