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L'accès aux documents pour les administrateurs des sociétés de logement de service public (SLSP)

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 249 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 08/01/2016
    • de HAZEE Stéphane
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Les administrateurs des sociétés de logement de service public (SLSP) accomplissent une mission importante au sein de ces sociétés, dans le cadre du Code wallon du logement et de l'habitat durable.

    Dans le cadre de cette mission, ils peuvent accéder à tout document. Ils peuvent aussi s'en faire remettre copie.

    Il semble toutefois que certaines sociétés entravent cet accès aux documents et ce droit de copie.

    Monsieur le Ministre peut-il m'indiquer le cadre décrétal applicable en la matière ?

    Le règlement d'ordre intérieur peut-il limiter ces prérogatives ? Selon quelles modalités ?

    À défaut de disposition contraire dans le règlement d'ordre intérieur, peut-il confirmer le droit de l'administrateur à accéder à tout document et à en recevoir copie ?
  • Réponse du 10/02/2016
    • de FURLAN Paul

    En principe, il ressort du Code des Sociétés, des statuts de la SLSP et du ROI que l’administrateur peut se prévaloir de son droit à l’information.

    Les SLSP étant des sociétés coopératives à responsabilité limitée, les règles applicables à ce type de société s’appliquent, telles qu’elles sont prévues aux articles 350 à 436 du Code des sociétés.

    Le Code des sociétés n’est cependant pas très détaillé quant aux règles relatives aux droits et obligations des administrateurs au sein des sociétés coopératives. La plupart des principes en la matière ont été dégagés par la doctrine et la jurisprudence.

    Bien qu’aucune disposition légale ne le prévoie expressément, il est unanimement admis que chaque administrateur agissant isolément dispose d’un droit d’investigation individuelle(1). Ce droit est traditionnellement déduit du principe de collégialité qui préside aux délibérations du conseil d’administration: seul le conseil d’administration dispose du pouvoir de prendre des décisions engageant la société, mais chaque administrateur a le droit, et même le devoir, "(…) de ne participer aux délibérations qu’en connaissance de cause, c’est-à-dire après avoir pris fut-ce individuellement toutes les informations utiles sur les affaires intéressant l’administration de la société"(2).

    Par ailleurs, le Code d’éthique et de déontologie, en son article 7, rappelle également le droit à l’information de tout administrateur signataire.

    Le droit d’investigation individuelle de l’administrateur est également le corollaire nécessaire de la responsabilité solidaire que la loi met à charge des administrateurs, tant à l’égard de la société qu’à l’égard des tiers.

    Limitations au Droit à l’information.

    a. Le droit à l’information et à l’investigation est cependant limité.

    L’accomplissement de son mandat est la seule finalité que peut poursuivre l’administrateur en revendiquant et en exerçant son droit d’investigation individuelle.
    Le principe de la limitation par l’accomplissement du mandat est du reste rappelé par le Règlement d’ordre intérieur du CA des SLSP(3).
    Par conséquent, l’administrateur ne peut consulter les livres et documents de la société que dans le but d’exécuter au mieux les tâches qui lui incombent en vertu de son mandat, notamment "pour contrôler les informations qui lui sont données par le conseil d’administration, pour délibérer en connaissance de cause sur les points portés à l’ordre du jour d’une réunion du conseil ou pour dénoncer à l’assemblée générale des irrégularités qui lui semblent avoir été commises"(4).
    Le droit d’investigation s’exerce avec le maximum d’efficacité, l’administrateur doit pouvoir consulter personnellement et directement les différents documents de la société.
    L’administrateur peut prendre des copies des documents qu’il consulte. En effet, le droit de prendre des copies est un corollaire normal du droit d’en prendre connaissance(5).

    b. Le droit à l’information est également limité par le devoir de confidentialité, de discrétion et de réserve de l’administrateur qui est inscrit dans le Code d’éthique et de déontologie(6). Dans ce cadre, il peut recevoir toute information, mais à l’exclusion d’une information légalement confidentielle(7).

    c. Enfin, le droit à l’information est également limité comme souligné ci-dessus par les règles applicables en matière de protection de la vie privée(8).

    En effet, les administrateurs des SLSP ne peuvent être considérés comme des officiers publics (comme un notaire ou un huissier(9) de justice par exemple qui accomplissent une mission légale) au sens de l’art.4 § 4 de la loi du 15 janvier 1990 relative à l’Institution d’une Banque-carrefour(10).

    Les administrateurs des SLSP n’ont donc pas accès d’office à tout document et sont assimilés à un citoyen quand il s’agit d’un document contenant des données à caractère privé.

    En effet, toute personne physique à droit à la protection de ses libertés et droits fondamentaux, notamment à la protection de sa vie privée(11).

    Pour rappel succinct, les données à caractère personnel doivent être traitées par la SLSP

    -de façon loyale et licite ;
    -être collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes ;
    -être adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont obtenues ;
    -être exactes, et si nécessaire, mises à jour ;
    -conservées sous une forme permettant l’identification des personnes concernées pendant une durée n’excédant pas celle nécessaire à la réalisation des finalités pour lesquelles elles sont obtenues ;
    -si le traitement de ces données est nécessaire au respect d’une obligation à laquelle la SLSP est tenue légalement ou nécessaire à l’exécution de sa mission d’intérêt public ou d’un intérêt légitime.

    L’administrateur, dans le traitement des données auxquelles il a accès de par son droit à l’information, est évidemment soumis à ces restrictions en tant qu’organe de la SLSP.

    _______________________________
    (1) Mons, 28 juin 1999, D.A.O.R., 1999, p. 52.
    (2) F. HELLEMANS "De Algemene vergadering-een onderzoek naar haar grondslagen, haar bestaanredenen en de geldigheid van haar besluiten", Kalmthout, Biblio 2000, pp. 514 et ss.
    (3) Article 21. Droit d'investignation.
    Complémentairement au droit à 'information, l'administrateur, s'il ne dispose pas de toute l'information nécessaire, peut mener l'investigation nécessaire pour l'obtenir.
    Ce droit doit néanmoins être utilisé avec diligence, de manière ponctuelle, dans le respect des dispositions du Code d'éthique et de déontologie.
    En effet, ce droit ne peut avoir pour conséquence d'entraver, de manière inutile, la gestion de la société. Ainsi, il convient que l'adminsitrateur, avant de prendre contact avec le Directeur-gérant et/ou le Président, en réfère au Conseil d'administration.
    (4) J. VAN RYN, "Principes de Droit commercial", Bruylant, Bruxelles, 19545, T.I. p. 467.
    (5) Gand, 18 avril 2002, R.D.C., 2002, p. 730 et Comm. Ypres, 17 mai 1999, T.V.R. 1999, p. 534.
    (6) Art. 4 et 7 à 20 du Code d'éthique et de déontologie.
    (7) Art. 17 in fine du Code d'éthique et de déontologie-voir aussi infra : les données à caractère personnel.
    (8)Loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'gard des traitements de données à caractère personnel.
    (9) Art. 509 §1er C. jud.
    (10) § 4. Sans préjudice de l'article 15, ont accès aux données d'identification des registres Banque-Carrefour ou en obtiennent la communication :
    1° les institutions de sécurité sociale pour autant qu'elles aient besoin de ces données pour l'application de la sécurité sociale;
    2° les instances d'octroi visées à l'article 11bis pour autant qu'elles aient besoin de ces données pour l'octroi d'un droit supplémentaire visé à l'article 11bis;
    3° les autorités publiques pour autant qu'elles aient besoin des données d'identification pour l'exécution des missions qui leur sont accordées par ou en vertu d'une loi, d'un décret ou d'une ordonnance;
    4° les personnes physiques ou les organismes publics ou privés pour autant qu'ils aient besoin des données d'identification pour l'accomplissement des tâches d'intérêt général qui leur sont confiées par ou en vertu d'une loi, d'un décret ou d'une ordonnance;
    5° les personnes qui agissent en tant que sous-traitant des autorités publiques, personnes physiques et organismes publics ou privés visés aux 1°, 2°, 3° et 4°.
    (11) Art. 2 de la loi du 8 décembre 1992 précitée.