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La prévention du cancer en Wallonie

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 547 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 09/02/2016
    • de GONZALEZ MOYANO Virginie
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    À l'occasion de la journée mondiale du cancer, je souhaiterais faire le point avec Monsieur le Ministre concernant ce mal qui continue de tuer chaque année. Certes, le taux de survie du cancer du sein est, aujourd'hui, de 9 sur 10, le taux de survie inhérent au cancer du poumon a, lui aussi, augmenté. Reste que de très nombreuses personnes sont encore touchées par la maladie.

    Aussi, j'aimerais connaître le bilan de Monsieur le Ministre sur la prévention du cancer en Wallonie. Envisage-t-il de mettre sur pied de nouvelles campagnes de sensibilisation ? Celles établies auparavant ont-elles porté leurs fruits ? Quel est l'état actuel concernant la prévention et le dépistage en Wallonie ?
  • Réponse du 23/02/2016
    • de PREVOT Maxime

    Je me réjouis avec l'honorable membre de l’allongement progressif de la survie des femmes atteintes du cancer du sein. Le Registre du Cancer que j’ai eu l’occasion de féliciter lors du colloque mis sur pied pour fêter, fin 2015 ses dix ans, met en évidence cette amélioration de la survie. En dix ans, de 2003 à 2013, la survie à cinq ans des femmes atteintes d’un cancer du sein est passée de 84 % à 90 %.

    Cette amélioration est due à plusieurs facteurs : les centres d’excellence hospitaliers et la consultation multidisciplinaire en oncologie, les progrès de la recherche et des nouvelles médications, l’amélioration de la qualité des soins, et une sensibilisation au dépistage précoce avec la mise sur pied d’un dépistage organisé avec double lecture et contrôle de qualité.

    Nous savons aussi que le nombre total de femmes atteintes est en augmentation à cause de l’augmentation de la population et de l’espérance de vie.

    En ce qui concerne la prévention primaire, il s’agit principalement de lutter contre le tabagisme et la pollution environnementale.

    Les dépistages qui nous sont recommandés par les autorités scientifiques européennes sont au nombre de trois : le cancer du sein, le cancer colorectal et le cancer du col de l’utérus.


    * Le dépistage du cancer du sein est proposé tous les deux ans à toutes les femmes de 50 ans à 69 ans inclus, par une invitation reçue à domicile.

    Le taux de participation en Wallonie stagne aux environs de 8 % dans le programme que nous organisons, malgré l’avantage de la gratuité pour la patiente, et la garantie d’une double lecture de la mammographie par deux radiologues lecteurs indépendants.

    Par ailleurs, il faut rappeler qu’environ 47 % des femmes sont dépistées hors programme, c’est-à-dire sur demande individuelle pour des tests qui reviennent plus chers (puisque le plus souvent doublé d’examens dont l’utilité n’est pas prouvée et lue par un seul lecteur).

    Au total, environ 55 % des femmes de 50 ans à 69 ans sont dépistées tous les deux ans. Ces chiffres sont fort stables dans le temps et identiques durant ces dix dernières années.

    Des études ont été menées pour identifier les freins au dépistage. Elles mettent en évidence que c’est le médecin traitant qui est le meilleur agent de sensibilisation.

    L’augmentation du taux de participation au programme dépendra également des dispositions prises dans le cadre d’un changement de la nomenclature fédérale. En effet, la Ministre fédérale pourrait diminuer le remboursement de certains examens qui ne rentrent pas dans le cadre d’un protocole de prévention ou de diagnostic.



    * En ce qui concerne le dépistage du cancer colorectal,

    Le programme est réalisé et évalué suivant les « European guidelines for quality assurance in colorectal cancer screening and diagnosis » et conformément à la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel.

    Le programme de dépistage s’adresse aux hommes et aux femmes de 50 ans à 74 ans de la Wallonie.

    Le programme est mené de manière opérationnelle par le Centre Communautaire de Référence (CCR) pour le dépistage des Cancers.

    Il s’articule autour de 2 filières : la filière FOBT (Faecal Occult Blood Test) versus la filière coloscopie d’emblée pour les personnes qui ont des antécédents familiaux ou des risques accrus.

    Le test utilisé dans la filière FOBT depuis 2009 était le test Hemoccult®, test de type gaïac (gFOBT). Nous utilisons maintenant un test plus simple, le test immunologique, qui ne nécessite plus qu’un seul prélèvement de selles.

    Le médecin généraliste est au centre du processus et oriente les sujets vers une filière spécifique en fonction du niveau de risque. Le médecin remet le test à son patient.

    Le médecin commandait les tests au CCR par téléphone, e-mail, fax ou plateforme web. Ils lui sont maintenant envoyés directement quand il en a utilisé un certain nombre. De plus, ces tests permettent de détecter des saignements plus faibles que ceux détectables avec un test au gaïac.

    Le taux de participation est de 7,5 % si l’on tient compte de toute la population éligible, à savoir les femmes et les hommes de 50 à 74 ans.

    Toutefois la participation avoisine 20 % si l’on inclut les personnes de la même tranche d’âge qui bénéficient de coloscopies ou de tests de recherche de sang dans les selles en dehors du programme.

    Plus de 5.800 médecins généralistes sont actifs dans le cadre de ce programme de dépistage. Parmi les tests reçus pour la tranche d’âge ciblée, 3,3 % étaient positifs.

    Les taux de détection sont de 1,9 ‰ pour les cancers, de 4,6 ‰ pour les adénomes avancés et de 5,1 ‰ pour les adénomes non avancés.

    En chiffres absolus, 7.696 tests ont été positifs, ils ont donné lieu à 5.810 coloscopies parmi lesquelles :
    * 3.026 négatives,
    * 73 de résultat inconnu malgré deux rappels,
    * 1.201 avec un adénome,
    * 1.071 avec un adénome avancé (de plus d’un centimètre, ou contingent villeux ou dysplasique de haut grade),
    * 439 cancers.

    Nous pouvons donc dire que plus de 1.500 adénomes avancés ou cancers ont ainsi pu être dépistés et traités avant le moindre signe clinique.

    Des mesures ont été prises pour augmenter la fidélisation au programme après qu’elles aient montré leur efficacité dans des projets pilotes : les personnes qui ont déjà participé au programme deux ans avant et dont le résultat était négatif recevront directement le test à domicile, sans attendre de revoir leur médecin traitant. Les patientes ne doivent donc plus obligatoirement passer par le médecin traitant que pour la première participation. Cette mesure va permettre également de réduire les stocks « dormants » chez les médecins généralistes et donc de réduire les coûts.

    Une modification du système d’invitation de la population éligible est en cours afin de mieux cibler la population à inviter grâce à la définition de « listes d’exclusions ». Ceci permettra de réduire les invitations « inutiles » (personnes déjà suivies par coloscopie, personnes ayant un cancer colorectal dans ses antécédents,…) et donc de réduire les coûts postaux.



    * En ce qui concerne le dépistage du cancer du col de l’utérus, nous allons continuer les campagnes de sensibilisation qui avaient déjà été lancées par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ces campagnes étaient à la fois préventive (vaccination HPV gratuite chez les jeunes filles de 12 ans à 14 ans, utilisation du préservatif lors des premiers rapports) et de promotion du dépistage tous les deux à trois ans chez le généraliste ou le gynécologue. Nous allons également analyser la pertinence en termes de santé publique et le coût d’organiser, en Wallonie, un tel programme pour ce cancer.

    Enfin, lors de la réforme de la promotion et de la prévention de la santé, nous aurons l’occasion d’évaluer les dépistages organisés en Wallonie et d’y apporter les améliorations nécessaires.