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Les pertes d'emplois dans le secteur de la construction

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 181 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 16/03/2016
    • de STOFFELS Edmund
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de l'Emploi et de la Formation

    En 4 ans, le nombre de travailleurs détachés dans la construction est passé de 157.000 à 394.000, ce qui équivaut à une augmentation de 150 %.

    D’après Robert de Mûelenaere, administrateur délégué de la Confédération Construction, nous assistons bel et bien à une crise de l’emploi dans le secteur de la construction. 19.000 emplois perdus en moins de 5 ans, ça fait une baisse de 9 %, si ça continue à ce rythme-là, d’ici 2019 ce sera 26.000 emplois supplémentaires qui auront disparu.

    Le bureau du plan prévoit une tendance inverse, une hausse de 14.000 unités entre 2016-2019.

    L’administrateur délégué de la Confédération construction se dit très surpris par ces estimations et pense que le bureau du plan a travaillé sur des coefficients d’emploi datant d’avant 2011.

    Car l’année 2011 a été un véritable tournant dans le secteur de la construction. Avant 2011, le volume de l’activité et le volume de l’emploi étaient liés, mais après 2011 les deux courbes se sont peu à peu éloignées.

    L’activité a augmenté de 4,3 % depuis fin 2011 et de 1,6 % rien que pour 2015.

    La bonne conjoncture économique est peut-être une des causes de la hausse de l’activité, mais cette hausse est également et surtout due au recours de plus en plus fréquent à de la main-d’œuvre étrangère, qui travaille 20 à 30 % moins cher et tout à fait légalement !

    Le nombre de déclarations « Limosa » (déclaration électronique que le patron étranger (de l'Union européenne) doit remplir lorsque ses travailleurs viennent travailler en Belgique) est passé de 157.000 à 394.000, ce qui équivaut à une augmentation de 150 %. Peut-on voir dans les chiffres de la Confédération construction ?

    Chaque emploi perdu dans le secteur représente 33.000 euros de recettes en moins pour le budget de l’Etat.

    40.000 emplois, c’est l’écart entre les deux prévisions, d’une part la Confédération Construction (- 26.000 emplois) et le bureau du plan (+ 14.000 emplois).

    Il fallait s’y attendre : l’introduction de l’euro, sans aucune stratégie européenne de convergence sociale et tarifaire a pour effet que la compétitivité se joue davantage dans le domaine des politiques sociales et de l’emploi.

    Le mot-clef : la directive concernant le détachement des travailleurs, qui est insuffisante, présentant une série de défauts comme l’illustrent les propos de la construction.

    La stratégie wallonne : réfléchir à une stratégie de cahier des charges incluant des clauses sociales visant à protéger l’emploi et le système tarifaire négocié entre partenaires sociaux.

    Où en est le Gouvernement wallon quant à l’interprétation desdites clauses sociales pour les travaux publics de Wallonie (et pour les travaux subsidiés par la Wallonie) ?
  • Réponse du 11/04/2016
    • de TILLIEUX Eliane

    Une concurrence équitable et le principe « à travail égal, droits égaux » doivent être deux piliers centraux de notre économie. Il est crucial de protéger non seulement les travailleurs, mais aussi les petites et moyennes entreprises, principal moteur de la création d’emploi et de la relance économique wallonne.

    Néanmoins, les politiques régionales de l’emploi et de la formation ne vont pas permettre de résoudre, à elles seules, toute la problématique du dumping social qui doit d’abord être prise en compte au niveau européen.

    Toutefois, le Gouvernement wallon a pris ses responsabilités quant à la solution à apporter à cette pratique. Ainsi, en date du 28 novembre 2013, le Gouvernement wallon a adopté une circulaire relative à la mise en place d’une politique d’achat durable en Région wallonne afin d’encourager les services publics à adopter des clauses sociales, environnementales et éthiques dans les cahiers des charges des marchés publics de travaux, de fournitures et de services.

    Ces dispositions pourraient avoir indirectement un effet limitatif sur les cas de dumping social et constituent, en effet, un moyen de protéger le modèle social et d’éviter la concurrence déloyale. Il devient ainsi tout à fait légal de demander que, pour faciliter le suivi d’un chantier, les échanges puissent se faire en français. On peut également imposer des partenariats avec des sociétés d’économie sociale ou contraindre les entreprises à des obligations de formation des travailleurs.

    La mise en œuvre de cette circulaire constitue un élément essentiel afin, d’une part, de garantir une qualité d’emploi dans l’espace européen et, d’autre part, de pouvoir assurer la survie des entreprises situées dans les pays où les conditions de travail et la protection des travailleurs sont les plus élevées, comme c’est le cas en Belgique.

    Cette initiative régionale anticipe une réforme profonde et très importante des directives européennes en matière de marchés publics. Ainsi la directive 2004/18/CE relative aux passations de marchés publics de travaux, de fournitures et de services a été adoptée par le Parlement européen en janvier 2014 et devra être, transposée en droit belge. Les dispositions déjà prises par la Région wallonne font donc figure de pionnières en matière de clauses sociales et environnementales dans les marchés publics.

    Les marchés publics sont un moyen puissant pour faire évoluer l’Europe et ses Etats-Membres vers une Europe plus sociale. Il s’agit d’assurer un meilleur respect des travailleurs avec un salaire juste et des conditions de travail décentes, un meilleur accès aux marchés publics pour nos PME en mettant fin à la concurrence déloyale et en favorisant l’emploi pour les PME qui jouent le jeu, et un meilleur respect de l’environnement. La législation européenne constitue désormais un outil important de lutte contre le dumping social. Il faudra veiller à sa bonne application à tous les niveaux de pouvoir, depuis l’UE, jusqu’aux pouvoirs locaux qui concentrent, rappelons-le, la moitié des investissements de notre pays.