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La prévention du "binge eating"

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 850 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 14/04/2016
    • de WAHL Jean-Paul
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    En Belgique, les personnes souffrant de troubles du comportement alimentaire augmentent d’année en année.

    Parmi ces troubles, il existe le phénomène d’hyperphagie boulimique, également appelé « binge eating », qui consiste à avaler une grande quantité de nourriture en peu de temps.

    Contrairement à la boulimie, le binge eater garde ses aliments en lui et répète alors ce comportement plusieurs fois par semaine, voire même plusieurs fois par jour.

    Actuellement, la Belgique ne dispose pas de chiffres sur la problématique mais selon les estimations, 20 à 50 % des personnes en surpoids souffriraient d’hyperphagie boulimique.

    La solution pour guérir les personnes qui souffrent de ce trouble ne se situe pas dans la pose d’un anneau gastrique, comme cela est préconisé pour certains cas d’obésité morbide, mais bien dans un suivi psychologique adapté car le binge eater mange par compensation émotionnelle.

    Face à ce phénomène qui constitue un enjeu de santé publique vu la hausse des cas d’obésité en Wallonie, quelles sont les mesures que Monsieur le Ministre compte prendre à titre préventif tout en informant le public sur cette maladie encore trop peu connue et médiatisée ?
  • Réponse du 03/05/2016
    • de PREVOT Maxime

    L'honorable membre me questionne à propos de ce trouble alimentaire très spécifique appelé « binge eating » (en français, hyperphagie boulimique).

    L’hyperphagie boulimique se différencie de la boulimie par le fait que les crises d’hyperphagie boulimique (prise alimentaire) durent très peu de temps (moins de 2 heures). Dans cette forme de trouble alimentaire, il n’y a pas de vomissement ni de prise de laxatif ou autres techniques de compensation et il y a absence de pratique sportive excessive.

    En général, les personnes souffrant d’hyperphagie boulimique éprouvent de la honte quant à leurs problèmes alimentaires et tentent de dissimuler leurs symptômes. Les crises surviennent habituellement en secret. Elles font le plus souvent suite à des affects négatifs. D’autres éléments déclenchants comprennent les tensions interpersonnelles, les régimes restrictifs, les pensées négatives ayant trait au poids, à l’apparence corporelle et à la nourriture, et l’ennui. Les accès peuvent atténuer ou réduire les facteurs déclenchants à court terme, mais une autodépréciation et une humeur dépressive peuvent en être les conséquences à moyen et long terme (DSM-5, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, p.414, APA American Psychiatric Association, 2015.).

    Les accès hyperphagiques s’accompagnent de retentissements fonctionnels variés, y compris de problèmes d’adaptation sociale, d’une altération de la qualité de vie et de la satisfaction en rapport avec la santé. Ils peuvent également, comme le dit l'honorable membre, constituer un facteur de risque de prise de poids et de développement de l’obésité.

    L’hyperphagie boulimique se distingue de la boulimie sur plusieurs points. Parmi ces différences, la réponse au traitement est meilleure chez les hyperphagiques que chez les boulimiques. Les taux d’amélioration sont constamment meilleurs chez les individus souffrant d’hyperphagie boulimique que chez ceux souffrant de boulimie. Ce constat, l'honorable membre le conviendra, est encourageant.

    Les estimations avancées de « 20 % à 50 % des personnes en surpoids qui souffriraient d’hyperphagie boulimique » me paraissent excessives. En effet, une grande majorité des personnes recourent à des niveaux divers à la nourriture pour compenser un stress, une situation difficile ou même une contrariété. La grande majorité de ces personnes n’est heureusement pas en excès de poids ou obèse.

    Pour être efficace, le combat doit bien entendu être livré dans le secteur de la prévention, mais également sur d’autres fronts. L’hyperphagie boulimique comme la boulimie est bien un trouble psychologique. Le traitement doit avant tout traiter la cause psychologique par un suivi psychologique adapté avant d’entamer un travail nutritionnel.

    Il existe en Wallonie des unités spécialisées situées au sein d’hôpitaux psychiatriques ou d’hôpitaux généraux disposant de service de psychiatrie ou de pédopsychiatrie. La principale étant le Domaine, à Braine-l’Alleud. On citera également, le CHU de Liège (centre) ; les Cliniques universitaires de Mont-Godinne, sans être exhaustif.

    Si le recours à l’hospitalisation constitue une solution indispensable pour les situations les plus graves, il faut bien insister sur le fait qu’il est judicieux d’entamer les prises en charge en ambulatoire dans la majorité des cas, avant que les troubles ne s’aggravent.

    Le trouble alimentaire auquel fait référence l'honorable membre doit être considéré comme prémonitoire et annonciateur de problèmes ultérieurs majeurs. À ce stade précoce, le recours à des professionnels généralistes permet d’agir sur certains facteurs pré-disposants voire sur certains facteurs déclenchants, dont les situations de stress ou d’agression. Dans ce cadre, les médecins généralistes, les centres de planning familial,…ont bien sûr un rôle à jouer.

    En fonction de la gravité et de la complexité de la situation clinique, il y aura lieu d’envisager l’organisation d’une aide multidisciplinaire, avec intervention de psychothérapeutes, de nutritionnistes, et de recourir à une approche familiale, une approche groupale, etc. Tout cela peut se conduire en ambulatoire. En plus des services hospitaliers, ces compétences se retrouvent dans certains centres de planning, mais aussi et surtout dans les Services de Santé mentale. Ici aussi, le travail en réseau est fondamental.

    J’ajoute également que le recours à des associations d’entraide et d’information ou d’orientation est une ressource à ne pas négliger. On peut citer l’association MIATA (pour Maison d’Information et d’Accueil des Troubles de l’Alimentation).

    Enfin, je me permets de terminer en rappelant que les services dépendants de la Fédération Wallonie-Bruxelles, tels ceux de l’ONE ou les PMS, sont également actifs dans cette problématique des troubles des conduites alimentaires.