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La privatisation des maisons de repos et de soins (MRS)

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 886 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 20/04/2016
    • de WARNIER Ruddy
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    « Bien vieillir » ne devrait pas être un luxe. C'est une des conclusions du rapport sur la privatisation des maisons de repos publié sur le site de l'observatoire belge des inégalités. Si cette phrase me semblait couler de source, la lecture de ce rapport est édifiante : le secteur privé des maisons de repos et de soins considère nos ainés comme de véritables vaches à lait.

    Ce rapport rappelle que la recherche du profit à tout prix dans un secteur qui semble relever clairement du service public a des conséquences : tarifs prohibitifs, mal-logement, mauvais traitements... Pourtant, en Wallonie, 50 % des lits sont privés. En Belgique, le coût moyen du séjour en maison de repos, en 2015, est estimé à 1250 euros/mois. Or la moitié des hommes et 75 % des femmes belges de plus de 65 ans perçoivent une pension inférieure à ce montant. Selon Test-Achats, le coût de la maison de repos est supérieur au revenu mensuel – et parfois largement – pour 60 % des résidents.

    La conclusion du rapport est donc sans appel : la pénurie de places, la mauvaise qualité de l’accueil dans les maisons de repos et les prix trop élevés mettent de nombreux seniors et de nombreuses familles en situation de détresse.

    Solidaris tire également la sonnette d'alarme et met en avant les recommandations suivantes :
    - l’existence d’un outil de monitoring précis et permanent du prix d’hébergement et des suppléments facturés en maison de repos ;
    - un meilleur encadrement du prix d’hébergement dans les maisons de repos ;
    - un renforcement de la sécurité tarifaire pour le résident (que le prix de base couvre obligatoirement tous les frais indispensables à la vie quotidienne en société) ;
    - le maintien du mécanisme de programmation des lits en Wallonie.

    Mes questions sont les suivantes :
    - comment Monsieur le Ministre va-t-il plafonner l'ensemble des frais de MRS au montant de la pension ;
    - compte-t-il suivre les recommandations de Solidaris ;
    - quels objectifs de construction de nouvelles MRS compte-t-il mettre en place pour que l'offre publique puisse répondre à la demande grandissante tout en garantissant aux aînés des conditions de vie décentes et accessibles ?
  • Réponse du 03/05/2016
    • de PREVOT Maxime

    Le prix journalier d’hébergement dans le secteur public en Province de Namur en 2009 était supérieur à celui pratiqué par le secteur public dans les autres provinces et il semble donc qu’un ajustement aux prix du secteur public ait été réalisé.

    Il faut mentionner que l’utilisation de la moyenne comme outil de comparaison n’est pas particulièrement pertinente dans l’étude des prix d’hébergement, car, en effet, ces moyennes sont très sensibles au fait que quelques maisons de repos pratiquent des prix très élevés, notamment dans le Brabant wallon, où les prix peuvent aller jusque 4.700 euros par mois, ce qui « tire » artificiellement la moyenne vers le haut.

    Un meilleur outil de comparaison serait la médiane qui partage en deux les échantillons. Par exemple, la médiane des prix pour la Province de Namur est de 1 207 euros, ce qui signifie que dans la moitié des maisons de repos le prix d’hébergement est inférieur à 1 207 euros par mois et dans l’autre moitié, supérieur à 1 207 euros par mois. Signalons en outre qu’entre 4 % (secteur commercial) et 7 % (secteur public) des résidents de maison de repos bénéficient de l’aide du CPAS.

    En ce qui concerne le contrôle des prix, j’ai à maintes reprises précisé l’ensemble de l’arsenal réglementaire dont nous disposons : la majoration de ce prix ne peut pas, sur une année civile, dépasser 5 % au-delà de l’indexation des prix à la consommation survenue depuis la dernière augmentation de prix. D’autre part, tout nouveau prix doit être notifié au résident ou à son représentant au moins un mois avant son entrée en vigueur.

    Nous sommes la seule région à avoir cet arsenal juridique afin de contenir les augmentations dans les maisons de repos.

    Mon Cabinet vient de terminer les concertations avec le secteur pour le volet « prix en maisons de repos » afin d’élaborer une réforme en phase avec la Déclaration gouvernementale.

    Pour rappel, la DPR prévoit que le Gouvernement devra veiller :
    - à renforcer le contrôle du prix des établissements d’accueil des aînés et notamment celui demandé aux résidents d’une nouvelle maison de repos ou d’une maison de repos rénovée, en demandant des justificatifs pertinents en fonction des investissements réalisés et des éventuels subsides obtenus ;
    - à intégrer un certain nombre de suppléments dans le prix de journée d’hébergement.

    Je dois avouer que cette concertation a été très appréciée par le secteur et les échanges ont été très constructifs.

    Je déposerai d’ici les prochains congés parlementaires auprès de mes collègues du Gouvernement de nouveaux textes réglementaires. Ces propositions respecteront la déclaration gouvernementale (bien sûr) et permettront non seulement une plus grande transparence, mais une plus grande régulation également.

    Le nombre de places dans des établissements pour ainés n’a en effet pas suivi l’évolution du nombre de personnes âgées dans toutes les provinces. Si en Province de Liège et dans le Luxembourg le nombre de places pour 10.000 habitants de 60 ans et plus est resté assez stable, on constate une tout autre situation notamment dans le Brabant wallon avec un nombre moyen de places bien inférieur à la moyenne wallonne.

    Pour ce qui est des perspectives, des alternatives, soutenues par la Région wallonne, existent. Il s’agit bien sûr du maintien à domicile des personnes âgées notamment via le secteur des services d’aide aux familles et aux ainés (SAFA), mais aussi de l’ouverture de places en centre d’accueil de jour, le développement des soins palliatifs à domicile, mais aussi la diversification de l’offre d’hébergement via les résidences-services dont le nombre est en considérable augmentation (210 % d’augmentation entre 2005 et 2015 pour l’ensemble de la Wallonie).

    Il faut cependant ne pas oublier que le coût du logement en résidence-services n’est pas forcément partout plus abordable qu’en maison de repos.

    Je confirme aussi la volonté du Gouvernement de mettre sur pied une véritable « couverture autonomie » au profit de tous en Wallonie. Le Gouvernement s’est engagé à veiller à ce que progressivement cette couverture autonomie bénéficie à tous les Wallons, avec une attention particulière pour ceux qui en ont le plus besoin. C’est là une opportunité qu’offre la sixième réforme de l’État avec le transfert de l’allocation pour l’aide aux personnes âgées (APA).

    Enfin, le Gouvernement a jugé utile de renforcer les plans de cohésion sociale (PCS), et ce, afin de développer un ensemble d’initiatives en faveur d’une plus grande cohésion sociale sur le territoire communal de manière à garantir que chaque personne puisse y vivre dignement.

    Je terminerai ma réponse en abordant la privatisation des MRS en Wallonie. Privatisation que je ne souhaite pas.

    Durant les dix dernières années, l’autorité politique a cherché à équilibrer le nombre de lits disponibles en maison de repos et de soins et à maintenir le plus longtemps possible les personnes âgées à domicile, avec un développement accru des aides informelles (voir en particulier le statut de l’aidant proche).

    À l’heure actuelle, environ 125 000 personnes âgées de 65 ans et plus vivent en maison de repos en Belgique. Le modèle de projection estime qu’en 2025, 149 000 lits à 177 000 lits seront nécessaires, ce qui correspond à une augmentation annuelle de 1 600 lits à 3 500 lits.

    Dès lors, on peut estimer les besoins de lits supplémentaires nécessaires en Wallonie à l’horizon 2025 entre 6 000 unités et 9 000 unités. Toutefois, ce nombre dépend en grande partie des politiques alternatives résidentielles et d’aide et de soins à domicile.

    L'honorable membre aura bien compris que dans le contexte des réformes institutionnelles en cours, la Wallonie sera confrontée à un besoin de prise en charge des personnes âgées qui nécessite le déploiement d’une panoplie de soins et de services coordonnés. Ce besoin, conjugué avec le souhait d’un maintien à domicile et la limitation des budgets publics, révèle un véritable défi.

    L'honorable membre le sait, le financement des maisons de repos fait partie des compétences transférées aux entités fédérées dans le cadre de la sixième réforme de l’État. Si dans un premier temps (phase de transition), l’INAMI continue à contrôler les données fournies par les établissements et à assurer les paiements, il reviendra ensuite aux entités fédérées de décider des modalités de financement, d’attribution et de répartition de nouveaux lits.