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Les chartes de qualité en maisons de repos

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 925 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 25/04/2016
    • de GERADON Déborah
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Un arrêté du Gouvernement wallon d’octobre 2009 prévoit la mise en place d’un label de qualité pour les maisons de repos.

    Le label prévoit d’évaluer des critères tels que le respect de la personne, le bien-être et l’accueil.

    Six ans après la mise en place de cet arrêté, il semblerait qu’aucune maison de repos n’a reçu ce label de qualité. Comment expliquer cela ?

    Ce label ne correspondrait pas réellement aux besoins des organismes d’accueil des personnes âgées qui envisagent plutôt leur métier autour d’un projet de vie de l’institution.

    Monsieur le Ministre pense-t-il dès lors qu’il soit nécessaire de modifier l’arrêté en question pour l’adapter aux réalités du terrain ?
  • Réponse du 12/05/2016
    • de PREVOT Maxime

    Le label « qualité », effectivement repris au sein de l’annexe 118 du Code réglementaire wallon de l’Action sociale et de la Santé, n’est pas d’application.

    Le processus visé aux articles 338 du CWASS, 1406 et suivants du CRWASS et à l’annexe 118 précitée s’écarte du cadre classique et reconnu de la labellisation en qualité des produits et des services, tant au niveau national qu’international. En effet, un tel processus suppose de passer par différentes étapes dans un ordre précis :

    * L’appel à candidatures : se réalise sur base d’un cahier de charges préalable qui expose les objectifs à atteindre et les indicateurs permettant d’évaluer l’état d’avancement de ces objectifs. En plus de ce cahier de charges, l’autorité qui octroie le label arrête une grille de sélection, c’est-à-dire une grille de lecture des projets rentrés par rapport à l’objectif poursuivi.
    * Le dossier de candidature : l’établissement qui souhaite rentrer dans le processus de labellisation rentre un dossier dont la conformité avec le cahier de charges doit être vérifiée.
    * L’instruction du dossier : à ce stade, l’autorité analyse la recevabilité du dossier par rapport au cahier de charges. L’instruction débouche sur la remise d’un avis [favorable, favorable sous réserve de parfaire certains points ou défavorable]. L’avis est donné par l’autorité qui délivre le label à la lecture du dossier et de sa conformité au cahier de charges.
    * La Labellisation : intervient à la suite d’un contrôle pour vérifier la véracité des engagements pris dans le dossier de candidature. Elle débouche sur la délivrance soit d’un label de qualité, soit de recommandations avec délai complémentaire, soit d’un refus.

    Une politique de qualité aura pour objet de déterminer, d’organiser et d’améliorer, de manière systématique et continue, la qualité des soins et des services ainsi que son fonctionnement pour tendre progressivement vers l’excellence.

    Cette méthode permet une réflexion quant à la manière dont on traite les points visés, plus particulièrement l’utilité, l’importance, la priorité et le traitement méthodique en vue d’atteindre efficacement des objectifs ambitieux et réalistes (spécifiques, mesurables, améliorables, réalistes et temporels).

    La responsabilisation et l’appropriation sont une nécessité pour le maintien et l’évolution du système qualité parce que chacun doit avoir une visibilité de son rôle et de son apport dans la mise en œuvre de la vision de l’organisme.

    Le label de qualité s’obtient donc à la fin ou en cours de l’effort (plusieurs niveaux peuvent être envisagés), mais certainement pas avant que toute démarche concrète ait été envisagée.

    Or, en l’espèce, la démarche wallonne est la suivante :

    * L’adhésion : étape unique pour obtenir le label de qualité – « tout établissement pour ainés qui adhère à la charte relative à la qualité telle qu’elle figure à l’annexe 118 reçoit un label de qualité » ;
    L’article 1409 CRWASS confirme la démarche en évoquant le « logo à utiliser par les établissements pour aînés qui ont adhéré à la charte relative à la qualité et qui ont reçu le label de qualité ». Il n’y a donc aucun doute sur la manière de procéder : l’adhésion implique l’obtention du label de qualité.
    Il en va de même de l’article 338 du CWASS lorsqu’il mentionne que « les établissements pour aînés qui adhèrent à cette charte sont repris dans une liste publiée selon les modalités fixées par le Gouvernement. Ils en informent leurs résidents. Ils reçoivent un label de qualité ».
    * Le label de qualité : la conséquence immédiate et automatique de l’adhésion de l’établissement à la Charte relative à la qualité ;
    * La déclaration sur l’honneur : le mécanisme par lequel l’établissement matérialise son adhésion – elle est adressée à l’administration ; la déclaration sur l’honneur est le document « par lequel l’établissement s’engage à respecter la charte relative à la qualité » ;
    * La publicité : la liste des établissements qui bénéficient du label de qualité est publiée sur le site Internet de l’administration. Les établissements informent leurs résidents de l’obtention du label de qualité.

    Vient ensuite la description de la procédure de retrait du label de qualité :
    * Le retrait : à tout moment - par le Ministre - sur proposition de l’administration et après avis de la Commission - en cas de non-respect de la charte relative à la qualité.

    Il apparait clairement que la délivrance du label de qualité tel qu’envisagé dans la législation wallonne ne rencontre pas le processus de labellisation communément reconnu.

    Par ailleurs, l'honorable membre mentionne très justement dans question que ce label ne correspond pas aux besoins des organismes d’accueil des personnes âgées qui envisagent plutôt leur métier autour d’un projet de vie de l’institution. En effet, le projet de vie de l’établissement est une norme obligatoire à laquelle chaque établissement doit répondre pour pouvoir obtenir le titre de fonctionnement que je leur délivre. Le point 10 de l’article 359 du CWASS mentionne l’obligation d’un projet de vie de l'établissement et de sa mise en œuvre en réponse aux besoins des résidents afin de leur assurer un bien-être optimal et maintenir leur autonomie. Ce projet de vie doit comprendre des dispositions relatives à l'accueil des résidents, à leur séjour leur permettant de retrouver un cadre de vie aussi proche que possible de leur cadre familial, à l'organisation des soins et des services d'hôtellerie, à l’organisation du travail en équipe, mais également à la participation des résidents à la vie de la maison de repos, chacun selon ses aptitudes, en vue de favoriser le dialogue, d'accueillir les suggestions, d'évaluer en équipe la réalisation des objectifs contenus dans le projet de vie institutionnel et d'offrir des activités rencontrant les attentes de chacun.

    Cependant, force est de constater que dans certaines institutions, le projet de vie institutionnel reste un « papier » uniquement nécessaire à l’octroi d’un titre de fonctionnement, souvent copier-coller de modèles types trouvés sur le net. Pourtant, ce dernier est essentiel et permet de fixer les grandes orientations de la maison de repos et de définir les spécificités qui marquent sa différence d’avec d’autres maisons. Il est nécessaire à déterminer les valeurs phares de la direction et des équipes d’encadrement donnant ainsi un sens aux pratiques des membres du personnel quels que soient leur qualification et leur champ d’action. Et enfin et surtout, les concepts, les instruments de référence, les objectifs, les actions, … qui y sont développés sont indispensables à la bonne gestion au jour le jour : ils servent au développement permanent d’une politique cohérente au sein de la maison et facilitent le dialogue, la communication instaurée entre les différents acteurs partenaires.

    Ce projet de vie élaboré à partir des particularités de chaque établissement doit également être considéré comme le support à une auto-évaluation que les structures devraient toutes réaliser. Une démarche d’évaluation interne contribue à une démarche autonome d’appréciation de la qualité en vue d’éclairer les décisions de la structure ; cette démarche d’auto-évaluation étant centrée sur la pertinence et les conditions de mise en œuvre des activités pour les résidents.

    Concernant le questionnement relatif aux modifications législatives, l’annexe relative à la charte qualité ne devrait plus apparaitre comme telle. La réglementation actuelle prévoit déjà un certain nombre d’outils utiles et adaptés pour la mise en place d’une démarche qualité.

    Comparons quelques-uns de ces outils avec la roue de Deming qui est la base de la norme ISO 9001 et qui symbolise l’amélioration continue des processus. Elle est divisée en quatre cadrans égaux qui sont :
    - Le « Plan » mentionnant les objectifs, les actions à mener. Et pour faire le lien avec les maisons de repos :
    + le projet de vie institutionnel avec les objectifs attendus pour les résidents ;
    + le projet de vie individuel avec les actions à mener pour chaque résident pris dans son individualité avec ses besoins et ses attentes et les objectifs à déterminer pour maintenir le plus longtemps possible son autonomie ;
    + le plan de soins au sein de son Dossier Individualisé de Soins ;
    + les registres d’escarres, de chutes, de contention, d’incontinence ;
    + les activités permettant la vie sociale au sein de l’institution.

    - Le « Do » signifiant la réalisation de ce qui a été planifié :
    + Mettre en place concrètement les actions attendues du projet de vie institutionnel et des projets individuels :
    + Le plan d’actions du Dossier Individualisé de Soins ;
    + Compléter les registres ;
    + Organiser des activités ciblées et adaptées.

    - Le « Check »  consistant à vérifier que les actions menées ont permis d’atteindre les objectifs :
    + les actions ont-elles répondu aux attentes que l’établissement avait en réfléchissant à son projet de vie institutionnel ?
    + les actions répondent-elles aux besoins spécifiques des résidents ?
    + les actions assurent-elles une prise en soins optimale et globale ?
    + quelles sont les données statistiques relatives aux chutes, aux contentions, aux escarres, à l’incontinence ?
    + Les activités prévues ont-elles été réalisées ? Quel retour pour les résidents ?

    - Le « Act » : si les objectifs ne sont pas atteints, il est nécessaire de réagir et de modifier les actions. Si ces derniers sont atteints, il reste important de trouver d’autres objectifs afin d’encore mieux répondre aux attentes des résidents.

    Ces quatre étapes sont essentielles pour une prise en charge optimale des aînés et pour garantir une amélioration continue et dès lors de qualité. En entrant dans une telle démarche, les gestionnaires des institutions d’hébergement pour aînés auront pour responsabilité de maintenir cette « assurance qualité ». Il est donc, pour ma part, inutile d’entrer dans une démarche de labellisation alors que des outils existent dans la réglementation actuelle et qu’il serait pertinent de mieux exploiter. Il est avant tout dans le chef des gestionnaires de considérer les normes actuelles comme des leviers et non uniquement comme des contraintes.

    Je fais également confiance à mon administration et plus particulièrement à la Direction des Aînés qui est dans cette dynamique et qui, au-delà de ses missions premières que sont l’agrément et le contrôle des structures d’accueil et d’hébergement pour aînés, accompagne sur le terrain les équipes vers une réflexion et une remise en question de leurs pratiques. Cette démarche qui se veut collaborative, mais qui reste aussi tributaire du nombre d’inspecteurs sur le terrain (8 pour plus de 800 établissements) doit permettre à chaque maison de repos d’optimiser ses pratiques en fonction de ses objectifs, de son projet de vie institutionnel.

    Au-delà de cette nouvelle forme d’accompagnement, j’encourage le projet en cours d’élaboration par cette Direction de créer un dossier informatique dématérialisé et partagé entre les maisons de repos et l’administration. Cet outil aura notamment pour objectif de responsabiliser les directeurs, gestionnaires à l’auto-évaluation de manière autonome et d'autre part, en disposant des données récoltées dans ces dossiers électroniques, de pouvoir pour l’administration en extraire des informations pour établir un tableau de bord du secteur (développement d'indicateurs pour affiner les inspections). Il appert cependant important de préciser que ce travail est conséquent et que plusieurs mois seront nécessaires pour le mettre en place et l’implémenter de manière pérenne.