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Le phénomène de binge drinking

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 926 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 25/04/2016
    • de GERADON Déborah
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Qu’est-ce que le « binge drinking » ? C’est un phénomène qui se développe de plus en plus chez les jeunes et qui implique une grande consommation d’alcool en très peu de temps, à savoir 4 verres en 2 heures pour les filles et 6 pour les garçons.

    La Wallonie serait plus touchée par cette problématique selon l’Agence intermutualiste (AIM).

    Très inquiète par cette nouvelle façon de consommer de l’alcool et par les dommages que cela peut entraîner sur la santé des jeunes, l’AIM recommande d’ailleurs de porter à 18 ans, au lieu de 16 ans, l’âge minimal pour acheter de l’alcool.

    La Wallonie s’est-elle doté des outils nécessaire pour lutter contre la recrudescence de cette pratique dangereuse ? Des campagnes de sensibilisation sont-elles menées envers les jeunes publics ?
  • Réponse du 18/05/2016
    • de PREVOT Maxime

    Plusieurs questions parlementaires sur cette thématique ont été posées très récemment par les confrères de l'honorable membre. Ma réponse d’aujourd’hui sera donc semblable à celle donnée précédemment.

    L’enquête sur ce sujet réalisée par l'Agence Inter-mutualiste à laquelle elle fait référence met en lumière ce phénomène inquiétant. Celui-ci connaît aujourd'hui, et il faut le regretter, une popularité certaine. Toutefois, son importance reste encore difficile à mesurer objectivement.

    Cette étude a répertorié le nombre d'assurés de 12 à 17 ans qui ont été accueillis durant l'année aux urgences ou hospitalisés une nuit et pour lesquels la concentration d'alcool dans le sang a été analysée. L'enquête révèle que 2.376 jeunes en état d'intoxication alcoolique présumée se sont retrouvés à l'hôpital en 2013. En comparaison, leur nombre s'élevait à 2.209 en 2008. Une variation légèrement à la hausse, mais qui n'est pas très significative. Je sais que ce ne sont là que des chiffres indicatifs, dans la mesure où des causes méthodologiques empêchent un comptage plus précis et exhaustif. Malgré cette précision, je ne souhaite pas négliger ce problème. La problématique de la consommation excessive d'alcool chez les jeunes est singulièrement préoccupante. On le voit d'ailleurs bien autour de nous.

    En ce qui concerne les actions prises au niveau de la Région wallonne, je rappelle au préalable que la législation en matière de vente et de distribution d’alcool demeure une compétence du pouvoir fédéral.

    En matière d’usage et de mésusage de boissons alcoolisées, les réponses appropriées réclament une approche multisectorielle. Dans le domaine de la santé, les actions à mener se conçoivent souvent à partir des trois piliers que sont la prévention, le traitement et la réduction des risques, d’où la nécessité d’établir des concertations entre les différentes autorités de santé.

    La promotion et la prévention de la santé, sous forme d'information régulière et directe, sont l'un des meilleurs leviers à pouvoir activer et sont des enjeux particulièrement importants. Actuellement, la population en général et les jeunes en particulier banalisent et sous-estiment les effets de l’alcool. Le message qui leur est destiné doit s’appuyer sur ce fait afin qu’ils prennent conscience des dangers liés à ces comportements.

    « C’est pourquoi la promotion de l’alimentation et de l’activité physique à des fins de santé développera un axe lié à la consommation d’alcool puisque le terme même de l’alimentation comprend les boissons dont l’alcool. »

    Sur le plan de la prévention, l'honorable membre sait sans doute que la Région wallonne subventionne l'ASBL Modus Vivendi ainsi que différents services qui bénéficient du soutien logistique de cette association, notamment dans le cadre des Quality Nights. Il s'agit d'un projet qui vise à améliorer le bien-être des personnes qui sortent dans les lieux de fête notamment en Wallonie.
    On y trouve divers services préventifs : distribution d'eau gratuite pour limiter les consommations de bière ou d'alcool, préservatifs et bouchons d'oreilles à prix modique, brochures d'informations sur la santé, alertes rapides en cas de circulation de drogue à haut risque, personnel sensibilisé à la réduction des risques et aux premiers secours, etc.

    Mon souhait est de poursuivre et de consolider le soutien aux associations qui se destinent à la prévention, au traitement et à la limitation des risques liés à la consommation abusive d'alcool.

    Par ailleurs, les associations de prévention en assuétudes offrent aux institutions qui en ont besoin – pensons aux écoles, aux maisons de quartier, etc. – des formations, des accompagnements de projets et des outils pour travailler la question des consommations avec les jeunes. La Wallonie en finance plusieurs dont l'ASBL Infor-Drogues, Citadelle, etc.

    En outre, la Wallonie soutient également le travail de l'ASBL Univers Santé qui déploie des activités spécifiquement en lien avec la consommation d'alcool par les jeunes. Cette ASBL réunit, au sein d'un réseau pilote appelé « Jeunes, Alcool et Société », 12 associations actives auprès des jeunes. Au sein de ce groupe se définissent des stratégies et des actions visant à faire connaître le problème du binge drinking et à proposer des solutions.

    J'ai bien conscience de la gravité du problème, mais aussi de sa complexité. Il me semble en effet évident qu'il y a lieu (en plus de se concerter à tous les niveaux de pouvoir) de se concerter également avec les acteurs professionnels. Car, c’est ce terreau associatif qui est le plus à même d'être en contact avec le groupe cible concerné. Cette démarche collaborative doit permettre de développer un travail de prévention le plus efficient possible, singulièrement pour ce qui concerne la consommation abusive d'alcool chez les jeunes.

    On me demande d’interpréter « la plus grande consommation d’alcool en Wallonie qu’ailleurs dans le pays ». L’Enquête nationale de Santé (ENS) 2013 (Enquête nationale de Santé par interview Belgique, 2013.) peut, à cet égard, nous servir de référence. Il y est dit qu’en Belgique, une personne sur dix âgée de 15 ans et plus (10,5 %) qui a consommé de l’alcool au cours de sa vie rapporte avoir connu des problèmes liés à sa consommation. L’ENS met également en évidence qu’en Flandre comme en Wallonie, les hommes ont une plus grande propension que les femmes à avoir (eu) une consommation alcoolique problématique (15 % contre 5 %). Enfin, les auteurs de l’ENS signalent que la prévalence de la consommation problématique d’alcool en Wallonie (10 %) est équivalente à celle obtenue en Flandre. Sur base de cette ENS de qualité (valide et reconnue par le monde scientifique), il ne m’est donc pas possible de confirmer une éventuelle différence entre la consommation problématique d’alcool des jeunes flamands et des jeunes wallons.

    Pour terminer, je rappelle les activités de la Cellule Générale Politique Drogues (implémentée à partir de la CIM Drogues, réunissant plus de 20 ministres). L’honorable membre doit ainsi savoir que, dans la lignée des conclusions rendues par le KCE dans son rapport sur la consommation d’alcool publié ce 4 janvier 2016, un groupe de travail a été mis sur pied, dans le cadre de la Cellule Générale de Politique Drogues, afin de réunir l’ensemble des entités fédérées et fédérales ayant des compétences en la matière, afin de commencer la construction, en 2016, d’un nouveau plan alcool au niveau national.

    Les réunions du plan alcool sont en cours et doivent être confirmées par la Conférence interministérielle Santé publique dans le courant du mois de juin.

    L'honorable membre comprend qu’il est prématuré d’en lister les objectifs prioritaires. Sachant que j’y participerai activement afin de m’assurer que des mesures concrètes de lutte contre les méfaits de l’alcool puissent être mises en place chez nous.