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La pénurie de médecins en Brabant wallon

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 1061 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 26/05/2016
    • de DE BUE Valérie
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    La pénurie des médecins généralistes est un constat qui ne cesse de s’aggraver. Il y a un peu plus de cinq ans, une partie des médecins officiants en Brabant wallon avait lancé un véritable cri d’alarme : la pénurie de généralistes dans la jeune Province se faisait particulièrement ressentir.

    Le constat est toujours le même cinq ans plus tard. On ne compte réellement que huit médecins généralistes de plus qu’il y a cinq ans. Soit une hausse de 1,2 % alors que, dans le même temps, la population du Brabant wallon a grossi de 13.770 âmes. Soit de 3,5 %. Selon les chiffres parus dans la presse, les disparités sont fortes selon les communes : alors que l’on compte 339 patients par médecin du côté d’Ottignies/Louvain-la-Neuve (qui peut aussi se réjouir d’abriter un hôpital sur son territoire), ce chiffre passe à 1.460 pour Orp-Jauche, 1.130 à Ittre et 1.128 à Hélécine.

    Si rien n’est fait, les prévisions tablent sur pire pour l’avenir.

    Plusieurs explications sont avancées pour comprendre cette situation difficile à gérer sur le terrain, mais les solutions ne sont pas évidentes à trouver.

    Les dispositifs Assisteo et Impulseo ont été mis en place afin de soutenir les médecins généralistes en zones rurales. Le projet Assisteo est actuellement à l’analyse au sein de du cabinet de Monsieur le Ministre et des réunions ont lieu avec le secteur.

    Monsieur le Ministre peut-il expliquer les actions envisagées afin de développer la médecine générale en zone rurale ? Quel est le résultat des rencontres avec le secteur ?

    Le Gouvernement wallon a-t-il pris langue avec le Fédéral afin, notamment, de restimuler les médecins à la pratique généraliste?
  • Réponse du 14/06/2016
    • de PREVOT Maxime

    Les titres accrocheurs et effets stylistiques journalistiques couramment utilisés doivent nous amener à être prudents.

    Certes les chiffres alarmistes diffusés par la presse doivent parfois retenir notre attention. Dans ce cas, les données que relaie l'honorable membre doivent être nuancées. En effet, la situation rencontrée en Brabant wallon est loin d’être la plus catastrophique.

    Les chiffres fiables de l’INAMI pour l’année 2014 (année disponible la plus récente) à ma disposition montrent qu’il y a des communes avec moins de 1 médecin pour 1.800 habitants dans toutes les provinces à l’exception du Brabant wallon. Dix communes en Province de Liège, 5 dans le Luxembourg, 3 dans le Hainaut et 1 en Province de Namur. Il y a même à Liège et dans le Hainaut des communes avec 1 seul médecin généraliste pour plus de 3.000 habitants.

    Le problème de pénurie de médecins dans les régions rurales est global et dépasse très largement les frontières de la Wallonie et de notre pays. Nos voisins européens sont nombreux à être confrontés à une situation similaire. La France a notamment développé le concept de « médecin-roi » qui consiste, face aux difficultés rencontrées, à faire du « clé sur porte » pour les médecins, les attirer dans les zones les moins bien desservies en leur offrant le logement, un emploi pour le conjoint, l'inscription en crèche pour les enfants, l'inscription en école pour les autres, etc. En Norvège, dès qu’un étudiant termine ses études de médecine, il a l'obligation de prester pendant cinq ans dans les zones les moins densément peuplées en tant que généraliste avant d'avoir l'autorisation, le cas échéant, de gagner la capitale pour ouvrir son Cabinet. Ce faisant et pour information, il est bon de savoir qu’environ la moitié des médecins restent dans ces zones rurales.

    Pour pouvoir remédier à cette pénurie chez nous, la première chose à faire est d’avoir une idée précise de la situation. C’est pourquoi l’Observatoire wallon de la santé a été chargé d’établir un cadastre wallon des médecins généralistes. Ce travail est actuellement en cours.

    La deuxième action sera de revoir le mode de calcul qui définit les communes en pénurie, car pour l’instant, ce calcul est réalisé en tenant compte de la densité de médecins pour l’ensemble des communes d’un cercle de médecins généralistes. Cette façon de calculer pénalise en fait les petites communes qui font partie d’un cercle de médecins généralistes où se situe par exemple une grande ville qui a beaucoup de médecins. À terme, le nouveau mode de calcul devrait permettre une plus juste attribution des primes à l’installation (Impulseo I) aux communes qui en ont le plus besoin.

    En outre, des actions supplémentaires sont développées par la Wallonie pour lutter contre ce phénomène :
    - le Programme wallon de Développement rural (PWDR), soutenu par le Fonds européen FEADER, propose de soutenir les investissements (construction et/ou équipements) visant au développement d’Associations de Santé intégrée en milieu rural ;
    - par ailleurs, un soutien financier spécifique est également octroyé aux ASI qui se voient octroyer une subvention complémentaire lorsque le siège d’activité de l’association est localisé dans une zone rurale qui compte moins de cent cinquante habitants par km². Les cercles de médecins généralistes peuvent également bénéficier d’une subvention complémentaire s’ils se situent dans une zone à faible densité de population ;
    - enfin, je ne peux terminer sans parler du dispositif Impulséo financé par la Région wallonne depuis le 1er juillet 2014. Pour rappel, une prime (20.000 euros) du Fonds d'impulsion (Impulséo I) vise à encourager l'installation de médecins généralistes dans des zones en pénurie nécessitant la présence de médecins généralistes supplémentaires. Je ne vais pas remettre en question cette prime d’installation, mais je souhaite la conditionner à une installation de minimum 5 ans dans les zones en pénurie.

    J’attire l'attention sur le dispositif Impulséo II, qui offre une intervention dans les charges salariales de l’employé(e) qui assiste un regroupement de médecins généralistes dans l’accueil et la gestion de la pratique. Concernant Impulséo III, et pour information, il vise à soutenir dans l'accueil et la gestion de la pratique les médecins travaillant seuls.

    Il y a matière à réfléchir sur cette question, d'autant que l'on se rend compte que concernant Impulséo, s'il a pu être un élément positif, on constate que, malgré tout, ce n'est pas suffisant. L'attrait financier, à lui seul, n'est pas suffisant pour encourager une série de médecins à s'installer dans les zones rurales. C'est souvent la charge liée à l'exercice des gardes et la volonté concomitante d'avoir une certaine qualité de vie qui sont pointées du doigt pour ne pas aller dans les zones où l'on risque d'être sollicité en permanence (puisque le médecin généraliste est quasi le seul à des kilomètres à la ronde).

    Si je suis parfaitement conscient de l’importance de prendre en compte la question de la pénurie de généralistes, l'honorable membre comprendra aisément que les enjeux sont nombreux. Hormis ceux que je viens de citer, il y a la volonté d’inciter à une réorganisation des systèmes de gardes pour que celles-ci soient moins lourdes (mais l’organisation de la garde reste une prérogative du Gouvernement fédéral) ou encore encourager les pratiques médicales groupées.

    Enfin, je ne peux que me réjouir de la mise en place de la « plateforme wallonne de la première ligne de soins » qui rassemble les différents acteurs et avec qui mon Cabinet travaille en concertation et dont certaines réflexions ont été intégrées dans la nouvelle mouture de la note-cadre concernant la réorganisation de la première ligne de soins. Celle-ci sera présentée au Gouvernement mi-juillet.