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La taxe sur les jeux de hasard

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 257 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 07/06/2016
    • de STOFFELS Edmund
    • à LACROIX Christophe, Ministre du Budget, de la Fonction publique et de la Simplification administrative

    Un nouveau conflit entre les Régions et l'État fédéral est apparu : la TVA de 21 % que veut mettre en place la coalition suédoise sur les paris sportifs et les casinos.

    La Belgique et l'épaisse lasagne institutionnelle où s'additionnent les différents niveaux de pouvoir vont considérablement compliquer la tâche.

    En effet, ce plan de l'économie est déjà frappé par un impôt régional et les Régions ne voient pas d'un bon oeil cet impôt fédéral qui vient chercher l'argent sur leurs plates-bandes. Le Gouvernement wallon a d'ailleurs décidé de saisir le Comité de concertation.

    De plus, les acteurs du secteur ont pris la liberté de demander à un universitaire de l'UCL d'examiner si la TVA à 21 % imaginée par le Gouvernement fédéral est juridiquement fondée.

    Le droit belge n'interdit en aucune manière cette double taxation fédérale-régionale des jeux de hasard, même si cela a un impact sur les rentrées régionales.

    Dans les travaux préparatoires de la loi spéciale de financement de 1989, il est expressément indiqué que la référence à la compétence régionale de la taxe sur les jeux et paris, dans l'article 4 de la loi, vise à garantir aux Régions pour les impôts concernés que l'autorité nationale n'agira plus à l'avenir dans ces domaines pour lesquels les Régions sont compétentes en vertu du présent projet.

    Pour ce professeur de droit fiscal de l'UCL, l'État fédéral revient sur sa promesse initiale de ne pas se mêler fiscalement des jeux de hasard. Autrement dit, la coalition suédoise s'assied volontairement sur le sacro-saint principe de loyauté fédérale. Encore un argument de poids contre la TVA sur les paris et les jeux de hasard, cette taxe ayant un impact sur les finances des Régions, elle devrait être créée par une loi spéciale. Et l'universitaire de conclure que l'article 177 de la Constitution prévoit que seule une loi spéciale (majorité dans chaque groupe linguistique et majorité totale des deux tiers) peut modifier le système de financement des Régions.

    Avec ce dispositif, le projet de taxation du Fédéral ne ressemble-t-il pas à un projet mort-né ?

    Monsieur le Ministre a-t-il des contacts avec les autres Régions sur cette question ? Qu'en disent-elles ?

    Quels seraient les montants que la Région risquerait de perdre si jamais la taxe devait voir le jour ?
  • Réponse du 28/06/2016
    • de LACROIX Christophe

    Le projet de loi-programme du fédéral a été déposé à la Chambre, le 2 juin dernier.

    Lors du comité de concertation du 25 mai 2016, nous avons demandé de recevoir l’avis du Conseil d’État et le projet de loi-programme qui était actuellement discuté.

    L’avis du Conseil d’État ne m’a pas du tout surpris. Lors de la saisine du comité de concertation, j’avais déjà demandé à mes collaborateurs d’étudier anticipativement les différentes problématiques que pouvait soulever un tel texte sur les compétences de la Région. Nous avions déjà repéré que le projet de loi comportait des points problématiques concernant le principe de la proportionnalité, de la loyauté fédérale ainsi que des possibles problèmes relatifs au droit de la TVA qui peuvent avoir un impact sur la compétence et l’autonomie fiscales de la Région.

    Par ailleurs, il est à noter que la Région de Bruxelles-Capitale a adopté la même position que nous.

    Cependant, comme pour la DLU quater, et malgré les remarques de la section de législation du Conseil d’État, il est consternant de voir encore, le Gouvernement fédéral persiste dans sa volonté d’empêcher les régions d’exercer leurs compétences conformément à la Constitution et aux lois spéciales.

    Cela n’entrave cependant pas ma volonté de faire valoir les intérêts de la Région en invoquant le respect de ses compétences et son autonomie.

    Le projet de loi fédérale entrave les compétences fiscales de chaque Région. Il ne s’agit pas d’une problématique communautaire. Là encore, il est consternant de voir le Ministre fédéral des Finances vouloir sans cesse exercer ses compétences fiscales de manière à entraver celles des régions. Il s’appuie sur le silence de la Région Flamande pour asseoir qu’il n’y a pas de problème. Ce n’est pas le cas, la preuve en est que la Région de Bruxelles-Capitale suit le même raisonnement que le nôtre.

    Enfin, je comprends que le raisonnement du Conseil d’État. En effet, le rôle de la section de législation du Conseil d’État est d’opérer un contrôle « a priori » ou « in abstracto » de Constitutionnalité et de respect des règles répartitrices de compétences. Il lui appartient de soulever les potentiels problèmes juridiques qu’un « projet » de loi peut comporter. Le texte n’existe pas encore dans l’ordonnancement juridique. Seule la Cour Constitutionnelle est compétente pour trancher « in concreto » les problèmes relatifs aux normes au titre desquelles elle assure un contrôle. Dont notamment, le principe de proportionnalité et d’équilibre institutionnel ainsi que le principe de la loyauté fédérale.

    Le fait que la loi-programme ne vise que les jeux en ligne ne change pas ces problèmes juridiques, d’ailleurs, le projet soumis à avis du Conseil d’État est le projet qui a été déposé à la Chambre.

    À l’heure actuelle, une analyse chiffrée est difficile à cibler. Cependant, une analyse approfondie de l’impact de la mesure aura lieu afin de mesurer le « coût » estimé pour la Région Wallonne.

    Je resterai donc vigilant tout au long du processus pour faire valoir les droits de la Région Wallonne.