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La consommation de chicha

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 1198 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 23/06/2016
    • de POTIGNY Patricia
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Fumer la chicha ou le narguilé est de plus en plus « tendance ».
    Or, selon diverses sources, la chicha est aussi néfaste que la cigarette. Contenant environ 25 % de tabac mélangé à de l’eau et à divers arômes, les consommateurs ont la sensation erronée que le produit contient moins de produits toxiques que les cigarettes.

    Tout comme la cigarette, la nocivité de la chicha touche les fumeurs actifs ou passifs provoquant entre autres cancers, bronchites chroniques et problèmes cardio-vasculaires.

    Il apparaîtrait qu’aspirer une cinquantaine de fois de la chicha sur une durée d’une heure environ équivaudrait à 2 paquets de cigarettes ; le monoxyde de carbone présent serait 7 fois supérieur à celui présent dans la fumée de cigarette ! Se pose aussi la question de l’hygiène et des conséquences qui peuvent en découler. Les tuyaux sont rarement nettoyés et peu utilisent des embouts personnels.

    Depuis plusieurs années, on se focalise sur la cigarette et plus récemment sur la cigarette électronique. Mais qu’en est-il du narguilé ? Bars à chicha et tabamels séduisent de plus en plus de jeunes alors que la dangerosité du produit, méconnue du consommateur, est réelle. Des experts de l’OMS se sont penchés sur la question et leur rapport est sans appel, la chicha est tout sauf inoffensive et ne peut être considérée comme une alternative au tabagisme.

    Au niveau de la Région wallonne, que savons-nous sur ce type de consommation ?

    Des études existent-elles ?
    Dans le cas contraire, il serait peut-être intéressant d’avoir des statistiques pour contrer cette autre forme de tabagisme et d’avertir le public des dangers liés à sa consommation comme pour la cigarette.
    Qu’en pense Monsieur le Ministre ?
    Sait-il si le Ministère fédéral de la Santé prévoit des actions à ce sujet ?
  • Réponse du 12/07/2016
    • de PREVOT Maxime

    Cette question faisant écho à la question écrite (840) du 13 avril 2016 de Mme Carine LECOMTE intitulée « L’utilisation de la chicha en Région wallonne », je me permets, par souci de cohérence, de reprendre en grande partie mes propos.

    Comme le rappelle l'honorable membre, la chicha s’est popularisée ces dernières années en Occident et est devenue « tendance ». La chicha plaît surtout aux jeunes, car elle permet, entre autres, de répondre à ce besoin d’identification au groupe (si important à cet âge). En effet, la consommation de la chicha comporte un aspect convivial. Concrètement, cela s’est illustré par l’ouverture de nombreux bars à chicha partout en Europe. Cette popularisation est préoccupante et ce, d’autant plus que les jeunes qui utilisent la chicha sont souvent mal informés, notamment par rapport aux risques de santé. Cette désinformation fait le jeu des industriels du tabac, qui peuvent cibler une population jeune, source potentielle de revenus futurs. Ce qui rejoint, comme le rappelle l'honorable membre, les préconisations de l’Organisation mondiale de la santé qui considère que la chicha « constitue un risque sanitaire sérieux » et qu’elle « peut constituer une porte d’entrée dans le tabagisme pour un certain nombre de personnes, particulièrement les jeunes, qui sans cela n’auraient jamais commencé à fumer - 16e Conférence mondiale sur le tabac et la santé, OMS, mars 2015 ».

    Il est indiscutable que la chicha implique un risque pour la santé des consommateurs puisqu’elle produit, souvent en quantité plus grande, les mêmes substances toxiques et cancérigènes que la cigarette, dont les méfaits sont bien connus.

    Étonnamment, les consommateurs paraissent peu ou mal informés au sujet des effets de la chicha sur la santé.

    L’eau de la chicha retient une partie de la nicotine et des goudrons sans pour autant piéger le monoxyde de carbone (CO) très toxique et cancérigène. La combustion de la chicha est plus douce que pour une cigarette, ce qui génère un plus grand dégagement de CO. En outre, on inhale fortement lorsqu’on fume la chicha. Ainsi, la fumée arrive très profondément dans les poumons.

    Des campagnes de sensibilisation ont été menées auprès des professionnels de la santé et du social ainsi qu’auprès des jeunes (car c’est surtout ce groupe-cible qui semble le plus visé par les vendeurs de cigarettes). Elles couvrent la Région wallonne, mais pas uniquement.

    En effet, dès 2009, une campagne de sensibilisation afin d’aborder l’usage de la chicha et du tabac à rouler en termes d’évolution des consommations a été menée dans le cadre du Fonds Assuétudes. Cette action initiée par la Coalition Nationale contre le Tabac couvrait les 3 Communautés linguistiques de notre pays. Un communiqué de presse y a fait écho dans le contexte de la Journée Mondiale sans Tabac. Dans ce cadre, un mini-dépliant a été réalisé - Mini-dépliant « Le tabac sous la loupe,…Un consommateur averti en vaut deux », Coalition Nationale contre le Tabac - Il visait à rappeler que tous les produits du tabac (y compris la chicha) sont nocifs.

    Le but n’était pas de stigmatiser les consommateurs, mais bien de fournir une information neutre à propos des nouvelles tendances, des nouveaux usages (face à la crise, face à l’effet de mode, ...), du sens de la loi (avertissement sanitaire, protection face au tabagisme passif) et des informations trompeuses en l’absence de contrôle et d’uniformisation des lois face aux nouveaux usages et produits mis sur le marché. Ce document a été diffusé auprès des écoles, des fédérations et clubs sportifs y compris les Centres ADEPS de même qu’auprès des services d’aide à la jeunesse, des maisons de jeunes, des maisons de quartier ainsi que des échevinats des sports, de l’enseignement et de la jeunesse tant à Bruxelles qu’en Wallonie.

    Grâce au soutien de la Région wallonne, le FARES développe (depuis 2010), des modules de formation et a édité à 1.000 exemplaires une brochure intitulée « La chicha… Comment en parler avec les jeunes ? » (Brochure « La chicha… Comment en parler avec les jeunes ?’, FARES, 2010). Cette brochure est destinée aux professionnels de la santé, de l’éducation et du social afin de leur permettre de mieux connaître les usages et les représentations associés à la chicha, ainsi que de faciliter l’abord de ce thème avec les jeunes consommateurs. Cet outil est encore actuellement largement diffusé auprès des mutualités, des maisons de jeunes, des services AMO, des PMS et PSE, des internats, etc. Il est également proposé en ligne sur le site du FARES. De même, un folder destiné au grand public (jeunes, parents adultes, etc.) intitulé « La chicha, mieux s’informer … » (Folder « La chicha, mieux s’informer… », FARES, réalisé en 2011 et réédité en 2015) a été élaboré.

    Concernant les indicateurs de la consommation de la chicha, on dispose de quelques chiffres sur cet usage en Région wallonne. En Belgique, une enquête menée en 2009 auprès de 1.049 élèves âgés de 17 à 18 ans a montré que 54 % des 17-18 ans ont déjà fumé la chicha (enquête sur la chicha auprès des jeunes, FARES, 2011).

    Concernant les fumeurs quotidiens, les taux sont heureusement bien plus faibles. D’après l’Enquête Nationale de Santé de 2013, 0,3 % des fumeurs quotidiens (de 15 ans et plus) seraient des fumeurs de chicha (1,6 % chez les fumeurs quotidiens de 25 à 34 ans) tandis qu’en Flandre et à Bruxelles aucun fumeur quotidien n’est fumeur de chicha.

    Enfin, l’enquête de la Fondation contre le Cancer de 2015 permet de mettre en évidence les tendances récentes de consommation du tabac. La consommation des cigarettes ordinaires reste majoritaire (77 % en 2015, 72 % en 2014 et 75 % en 2013). Concernant la consommation du tabac via la chicha, cette enquête révèle une légère augmentation (6 % en 2015, 1 % en 2014 et 2 % en 2013- Échantillons respectifs de fumeurs : n=546 en 2015, n=1006 en 2014, n=1024 en 2013). Malgré cette légère augmentation constatée, ce type de consommation reste encore marginal.

    Je reste attentif à l’évolution de ce mode de consommation du tabac et reste à l’écoute des éventuelles alertes des professionnels du secteur. Je ne manquerai pas, le cas échéant, de prendre de nouvelles mesures supplémentaires si celles-ci s’avéraient nécessaires.