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La valorisation agricole des boues de stations d'épuration

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 1265 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 20/07/2016
    • de TROTTA Graziana
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire, de la Mobilité et des Transports et du Bien-être animal

    Selon le professeur de toxicologie à l'UCL Alfred Bernard cité par La Libre Belgique du 13 juillet dernier, les boues de stations d'épuration des eaux usées, dont une proportion importante est valorisée en agriculture, concentrent de nombreux polluants persistants quotidiennement déversés dans les égouts, tels que des détergents, des médicaments, des biocides, des cosmétiques, des hydrocarbures aromatiques polycycliques, des hydrocarbures perfluorés, des plastifiants, etc. D'après lui, la charge polluante de ces boues répandues sur les terres agricoles wallonnes serait donc très importante.

    Selon des chiffres communiqués par Monsieur le Ministre, en 2013 la production de boues d'épuration en Wallonie s'élevait à 43.500 tonnes de matières sèches, dont 46 % ont été répandues en agriculture. En 2014, elle s'élevait à 49.010 tonnes de matières sèches dont 53 % répandues en agriculture. Quels sont les chiffres pour 2015 ?

    La valorisation en agriculture, encouragée par l'Union européenne, doit respecter certains critères et fait l'objet d'un certificat d'utilisation délivré par l'administration préalablement à l'épandage sur des terres agricoles. Monsieur le Ministre peut-il me préciser le processus d'attribution de ce certificat ? Est-il attribué a posteriori après contrôle aléatoire de la qualité des boues ou s'agit-il d'une certification d'entreprises ? Quelles sont les teneurs maximales à respecter pour les différents polluants susmentionnés ?

    L'étude VALBOU financée par la SPGE et la Région et menée au niveau wallon, est-elle finalisée ? Dans l'affirmative, quels sont ses principaux résultats en matière de polluants ? Monsieur le Ministre va-t-il réviser la législation suite à cette étude et, si oui, dans quel sens ?

    Enfin, il me revient que d'autres études sont en cours relativement à d'autres procédés de valorisation des boues de stations d'épuration. De quels procédés s'agit-il ? Quels sont les plus intéressants pour la Région ?
  • Réponse du 05/08/2016
    • de DI ANTONIO Carlo

    L’analyse des données relatives à la production de boues d’épuration en Wallonie en 2015 n’est pas encore finalisée. Le bilan sera disponible pour la fin de l’année.

    L’épandage agricole n’est pas une pratique nouvelle. Il est encadré par l’arrêté du Gouvernement wallon du 12 janvier 1995 transposant la directive 86/278/CEE. Ce cadre assure un suivi de la qualité des boues et des parcelles épandues sur le long terme. D’une part, les boues qui respectent les critères de qualité font l’objet d’un certificat d’utilisation délivré par l’administration préalablement à leur épandage. D’autre part, les Organismes d’assainissement agréés sont soumis à plusieurs obligations en matière notamment de fréquence d’analyses de paramètres agronomiques et d’indicateurs de pollution (notamment bactériologiques), de suivi des épandages, et de rapportage.

    Par ailleurs, à travers le décret du 10 mai 2012 transposant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, une hiérarchisation des filières est donnée : la valorisation est prioritaire sur l’élimination, et parmi les valorisations possibles, le recyclage (dont l’épandage agricole) se situe en amont de la valorisation énergétique. Aussi, au vu de l’intérêt agronomique et financier de la filière agricole, mais aussi de sa parfaite intégration dans le concept de l’économie circulaire, la SPGE et l’administration espèrent pouvoir valoriser, à terme, en agriculture, entre 70 et 80 % de la production de boues.

    Il faut souligner par ailleurs que de nombreux éléments d’ordre scientifique viennent conforter cette approche. Ainsi, plusieurs analyses de cycle de vie permettent d’identifier le moindre impact de la filière de valorisation agricole (par rapport à l’incinération) sur la préservation des ressources et sur les émissions de gaz à effet de serre. Plus particulièrement au niveau wallon, l’étude VALBOU a analysé très précisément les contraintes liées à l’épandage agricole des boues. Bien que la législation actuelle assure déjà un encadrement efficace de l’épandage agricole des boues urbaines, les bases d’une révision de la législation y sont développées. Nous sommes occupés à analyser l’opportunité d’adapter certaines prescriptions et de faire évoluer la gestion administrative de ces matières.

    Même s’il est vrai que les micropolluants organiques présents dans les boues font l’objet d’une préoccupation croissante, des études récentes ont mis en évidence le caractère peu significatif des contaminations potentielles des sols. Cela s’explique, d’une part, par le caractère hydrophile et volatile, ainsi que par la dégradation de nombreux polluants organiques au sein même du processus épuratoire. Ainsi, le pouvoir autoépurateur du sol ne doit pas être négligé. Il est démontré qu’un sol riche en matières organiques (présentes en grande quantité dans les boues) est capable de dégrader à peu près toutes les substances polluantes. D’autre part, de nombreuses autres sources peuvent également avoir pour effet de contaminer les sols (dépôts atmosphériques, etc.). Enfin, il faut aussi rappeler que certains composés présents dans les boues sont indispensables à la vie, il en est ainsi notamment du Cobalt.

    Dès lors, au vu de la législation, la valorisation agricole devrait continuer à constituer une part importante des filières de traitement. Néanmoins, la législation actuelle prévoit la possibilité de déroger à la hiérarchisation. Aussi, d’autres types de valorisation pourraient, en fonction du contexte local, voir le jour. C’est ainsi que des serres solaires et géothermiques, ne consommant pas d’énergie primaire, sont en cours de construction à Wasmuel. Celles-ci pourront traiter de l’ordre de 20.000 tonnes de boues dès fin 2016. L’étude de l’intérêt d’utiliser les boues séchées de mauvaise qualité comme combustible dans une unité de cogénération est en cours, de même que la transposition du projet de Wasmuel en région liégeoise.