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La directive européenne 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 358 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 01/08/2016
    • de STOFFELS Edmund
    • à LACROIX Christophe, Ministre du Budget, de la Fonction publique et de la Simplification administrative

    La directive concernant les travailleurs détachés et qui favorise le dumping social va être révisée.

    En effet cette directive favorise, aux yeux des organisations des travailleurs, un dumping social à l’échelle continentale.

    La Commissaire européenne avait déjà entrepris de la réviser, mais 11 États membres ont, en mai dernier, bloqué la procédure estimant que la Commission sortait de ses attributions.

    Au sein de l’Union européenne (UE), à l’heure actuelle, un employeur est tenu d’accorder le salaire minimum en vigueur dans le pays d’accueil à un travailleur venu d’un autre État membre. Malheureusement, cette directive a provoqué un appel d’air, dans plusieurs secteurs (construction, transport, etc.). Bien entendu, des travailleurs, principalement des pays de l’Est, acceptent ce salaire minimum qui est supérieur à ce qu’ils touchent dans leur pays d’origine. Ce qui provoque une concurrence déloyale payée de plein fouet par les travailleurs des différents pays d’accueil.

    La directive revisitée devrait permettre aux travailleurs détachés de recevoir les primes et les indemnités accordées aux travailleurs nationaux. Et si les conditions de travail sont réglementées par la loi ou par conventions collectives, elles devront également s’appliquer aux travailleurs détachés.

    Voilà ce que l’on apprend par voie de presse.

    Monsieur le Ministre a-t-il de plus amples informations en la matière ? Est-il en contact direct avec le cabinet de la Commissaire européenne ? Ou les contacts ont-ils lieu par l’intermédiaire du Fédéral ?

    Monsieur le Ministre peut-il donner des informations plus précises par rapport au projet de réforme ?
  • Réponse du 24/08/2016
    • de LACROIX Christophe

    Il y a lieu de préciser que le dumping social dont fait état l’honorable membre relève de la problématique du détachement régulier, c'est-à-dire le détachement de travailleurs opéré dans le cadre de la directive 96/71/CE, transposée en droit belge par la loi du 5 mars 2002, et du règlement 883/200/CE qui imposent notamment le respect du salaire minimum du pays dans lequel s’exécutent les prestations, lorsqu’un tel salaire existe, ce qui est le cas de la Belgique.

    Les charges sociales sont quant à elles déterminées suivant le taux de cotisation du pays d’origine et y sont payées.

    La Cour de Justice européenne a confirmé à plusieurs reprises ce principe.

    Il est bien évident que le système actuel ne prémunit aucunement d’une concurrence entre travailleurs qui s’avère défavorable aux pays ayant un niveau de charges sociales et donc de protection sociale plus important.

    Au niveau de la Commission européenne, des initiatives existent pour réviser la directive « détachement » et notamment par l’entremise de la Commissaire européenne à l’Emploi et aux Affaires sociales, Madame Thyssen.

    Le projet législatif modificatif de la directive a été présenté en mars dernier par Madame Thyssen et a été appuyé par la Belgique, l’Allemagne, l’Autriche, le Luxembourg, la Suède et les Pays-Bas.

    Par contre, onze États membres de l’UE, principalement issus de l’Europe de l’Est, sont opposés au projet de révision proposé par la Commissaire. Ils bénéficient en effet largement des retombées économiques de ces détachements.

    Ce projet vise notamment à étendre la notion de salaire minimum.

    La révision de la directive sera discutée au Parlement européen et au sein du Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » (EPSCO). La Belgique est représentée au sein de cette formation du Conseil par le Vice-Premier ministre et ministre de l'Emploi, de l'Économie et des Consommateurs, chargé du Commerce extérieur, M. Kris Peeters, s’agissant d’une compétence avant tout fédérale.

    Au niveau national, en date du 4 mai 2016, le Conseil national du Travail (CNT) a rendu l’avis n°1982, suite au dépôt d’un avant-projet de loi par M. Peeters, ministre de l’Emploi et par M. Tommelein, Secrétaire d’État à la lutte contre la fraude sociale. Cet avant-projet de loi porte sur diverses dispositions concernant le détachement des travailleurs.

    L’avant-projet vise à transposer en droit belge la directive 2014/67/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services.

    Dans le cadre de l’appréciation de cet avant-projet, le CNT a noué des contacts étroits avec les représentants des secteurs de la construction et du transport.

    Pour l'information de l'honorable membre, les points essentiels de cet avant-projet sont repris ci-dessous.

    Concernant la notion de détachement:

    - Dans le secteur du transport routier : le texte de l’article 8.2 du règlement 593/2008 devrait être repris dans la réglementation belge. Celui-ci dispose que dans tous les cas, « le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel, ou à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail. Le pays dans lequel le travail est habituellement accompli n’est pas réputé changer lorsque le travailleur accomplit son travail de façon temporaire dans un autre pays ».

    - Qu’un délai maximal de détachement au sens du droit du travail soit fixé ; dans le secteur de la construction, ce délai devrait être de 6 mois avec la possibilité d’être prolongé après appréciation du pays d’accueil.

    - De procéder à une évaluation globale, portant sur une période prolongée, de tous les éléments de fait caractérisant les activités exercées par l’entreprise dans l’État membre dans lequel elle est établie afin d’apprécier si l’entreprise employeur exerce bien des activités substantielles dans le pays d’origine du travailleur détaché.

    - L’absence du formulaire de détachement A1pourrait être un élément indiquant que la situation ne devrait pas être considérée comme étant un détachement. De plus, le CNT souhaite exprimer sa préoccupation quant aux problèmes qui se posent quant à la délivrance de ces formulaires. Il attire l’attention sur le fait que la délivrance de ces formulaires doit se faire sur base de documents authentiques.

    - De favoriser de façon claire et transparente l’accès aux informations portant sur le salaire minimum, ses éléments constitutifs et la méthode de calcul utilisée aux prestataires de services et travailleurs détachés.

    - De faciliter les contrôles sociaux par l’introduction de diverses mesures telles que l’introduction d’une obligation d’établir un relevé d’heures de prestations indiquant le début et la fin des prestations journalières si le droit national prévoit un tel document, le renforcement du contrôle du paiement du salaire minimum dans tous ses aspects par la consultation des documents sociaux traduits en anglais si nécessaire, l’obligation de suivre les procédures nationales quant à une demande de dérogation à la durée normale de travail et spécialement lors de l’élaboration des documents sociaux, l’obligation de disposer des services d’une personne de liaison en Belgique qui soit désignée préalablement à l’occupation de travailleurs détachés en Belgique.

    Par ailleurs, l’avant-projet de loi propose de renforcer la responsabilité solidaire en matière de dettes salariales dans le secteur de la construction en créant un régime particulier par lequel la responsabilité solidaire salariale porterait exclusivement sur le cocontractant direct.

    Ainsi donc, il y a clairement une volonté d’encadrement et de contrôle plus strict du détachement et il est évident que la Région wallonne souscrit à toute mesure susceptible d’enrayer la pratique du dumping social via la concurrence déloyale entre travailleurs.