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La rentabilité de l'énergie hydrolienne

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2016
  • N° : 71 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 13/10/2016
    • de WAROUX Véronique
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Dans le cadre de la diversification des activités énergétiques, l’intercommunale IDETA vient d’annoncer qu’elle avait investi 1,8 million d’euros dans un projet d’hydroliennes au large des îles Shetland, en Écosse.

    Si les informations transmises par IDETA sont exactes, l’investissement total, en ce compris celui des autres partenaires, est de 4,5 millions d’euros, pour l’installation de trois unités de 100 kW. Un système d’hydrolienne (SeaGen), installé dès 2008, a prouvé qu’avec 1,2 MW installés, la production annuelle était de 6 GWh par an, ce qui correspond à la production annuelle d’une éolienne de 2,4 MW.

    À ce stade, j’ai tenté un rapide calcul :
    - coût moyen d’installation d’une éolienne terrestre : 1,2 million d’euros / MW;
    - coût moyen d’installation d’une éolienne offshore : 3 millions d’euros / MW;
    - coût moyen d’installation des hydroliennes, ici : 15 millions d’euros / MW

    Certes, le facteur de charge est le plus élevé pour les hydroliennes, mais, hors coûts d’entretien, le coût au GWh sur 10 ans me semble étonnamment élevé :
    - une éolienne terrestre de 2,4 MW (facteur de charge 25 %) génèrera 52 GWh (soit la consommation de 1.450 ménages), donc 55.000 euros / GWh produit ;
    - une éolienne offshore de 2,4 MW (facteur de charge 35 %) génèrera 73 GWh (soit la consommation de 2000 ménages), donc 98.000 euros par GWh produit ;
    - et dans le cas qui nous occupe, 3 hydroliennes de 100 KW (facteur de charge 57 %) devraient générer 15 GWh (soit la consommation de 400 ménages), et donc un coût au GWh produit de 300.000 euros !

    Comme l’intercommunale IDETA, dont le président vante “l’expertise internationalement reconnue en matière d’énergies renouvelables”, la Wallonie a-t-elle l’intention d’investir dans ce type d’hydroliennes en mer (en Écosse ou ailleurs) ?

    Dans un autre registre, les hydroliennes fluviales sont-elles une voie d’avenir prise en compte par les conseillers de Monsieur le Ministre ?

    Le coût actuel de ce type d’équipement de production, a fortiori à petite échelle, permet-il de l’envisager légitimement comme une solution viable aux côtés des autres sources d’énergie renouvelable ?

    Monsieur le Ministre a-t-il déjà reçu des éléments attestant de la fiabilité à moyen et long termes de ces systèmes et de leurs coûts d’exploitation et de maintenance ou qui permettent d’accréditer l’hypothèse d’un retour sur investissement de 8 à 13 % comme évoqué par les dirigeants d’IDETA ?

    Je crois savoir que la Ville de Thuin a également investi tout récemment dans une hydrolienne, sorte de moulin à eau modernisé, placé sur le bief de l’un ou l’autre des cours d’eau de cette entité. Mais à 30.000 euros, voilà un investissement qui semble beaucoup plus raisonnable que celui qui m’amène à questionner Monsieur le Ministre.
  • Réponse du 12/12/2016
    • de FURLAN Paul

    En effet, les turbines placées dans l'eau génèrent de l'électricité grâce aux courants marins. Elsa (filiale Energie de IDETA) peut se reposer, au travers de son partenariat, sur une forte expertise de Nova Innovation, leader du développement technique dans le domaine de l’énergie marémotrice. Deux des trois machines du projet, d’une puissance de 100 kW chacune, ont déjà été plongées dans la mer du Nord, à 30 m de profondeur.

    Il s’agit d’une technologie en plein développement. La prédictibilité de la production est un atout fort de cette technologie, ainsi que ses faibles coûts de maintenance. Le coût total du projet novateur est de 4,5 millions d’euros. Elsa a investi à hauteur de 1,8 million d’euros. Le Gouvernement écossais soutient actuellement fortement le développement de la technologie pour exploiter le potentiel existant.

    Elsa, estime que ce projet devrait rapporter des dividendes aux communes affiliées à Ideta entre 8 et 12 % de retour sur investissement par an.

    En ce qui concerne la comparaison avec le grand éolien, il est à noter que la CWaPE (communication sur les coefficients économiques kECO applicables pour les différentes filières de production d’électricité verte à partir du 1er janvier 2015) considère, pour le grand éolien, un investissement de 1500euros par kW installé, soit 1,5 million par MW et non 1,2 million comme affirmé. De plus, on estime généralement les coûts d’investissement de l’éolien offshore à 3,75 millions par MW.

    Le principe de l’hydrolienne fluviale est de n’exploiter que la vitesse de l’eau (et non la hauteur de chute). Les machines sont ancrées directement sur le fonds du cours d’eau avec des filins en acier. Les machines (matériel canadien) fonctionnent sur des plages de vitesse de cours d’eau entre 1 et 2,5 m/s, à partir d’une profondeur d’eau de 60 cm. Elles présentent un encombrement faible dans le cours d’eau. Plusieurs machines peuvent être couplées en série si le site le permet (elles devront alors être écartées de 5 m dans le sens du courant). Elles développent une puissance de 100 à 500 W et produisent donc annuellement entre 900 kWh et 4200 kWh suivant la vitesse du cours d’eau (entre 1 et 2,5 m/s).

    Bien que la machine présente des avantages comme une production constante, un impact probablement faible sur la faune piscicole, un caractère mobile, etc…, cette technologie ne semble pas très adaptée aux cours d’eau wallons qui présenteraient pour l’essentiel des vitesses trop faibles (inférieures à 2 m/s qui serait un minimum pour obtenir une production intéressante avec ce type de machines).

    Enfin, des questions subsistent par rapport au comportement de la machine en cas de crues et notamment sa résistance aux embâcles qui sont charriés par les cours d’eau. En termes de coûts, on se situe donc au-delà des 20 000 euros/kW identifiés dans les paramètres technicoéconomiques de la CWaPE pour la classe de puissance ]0– 5 kW] (communication sur les coefficients économiques kECO applicables pour les différentes filières de production d’électricité verte à partir du 1er janvier 2015) et avec une rentabilité qui pose question, même avec des aides à l’investissement et un soutien par les certificats verts.