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Le modèle suédois des maisons de repos

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2016
  • N° : 215 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 14/11/2016
    • de BONNI Véronique
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    La Fondation Roi Baudouin veut favoriser le développement d'expériences pilotes basées sur une nouvelle gestion des maisons de repos, tel qu'elles existent en Suède.

    Là-bas, des structures plus petites, qui ressemblent parfaitement à une maison classique, s'y développent. Le personnel ne porte pas de blouse blanche et tous les intervenants sont habillés "en civil". Les résidents participent activement à la vie de la maison de repos comme, par exemple, l'élaboration du menu qui a même fait l'objet d'un livre de cuisine avec les recettes favorites des résidents. Ainsi, tout n'est pas connoté par le prisme des soins comme c'est trop souvent le cas chez nous.

    Stéphane Adam, psychologue à l'ULg, tire les leçons de la visite de la maison de repos de Tjörn. « Ce qui m’a le plus frappé, c’est que je pourrais justifier 90 % du contenu du modèle suédois sur la base de la littérature scientifique. [...] Ce qu’ils mettent en place correspond pour une large part à ce que la littérature dit qu’il serait bon de faire pour la qualité de vie et le bien-être des personnes âgées en milieu institutionnel ». Et de préciser également que les structures devraient s'adapter aux souhaits des résidents et non l'inverse.

    L'humain et les relations sociales sont au coeur du projet et de la maison de repos.
    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de cette initiative de la Fondation Roi Baudouin ?
    Si oui comment peut-elle s'inscrire dans notre cadre réglementaire ?

    Ce type de projet avec une gestion partagée pourrait-il être inséré dans la réforme du secteur qu'il prépare ?
  • Réponse du 28/11/2016
    • de PREVOT Maxime

    La Fondation Roi Baudouin a effectivement été sensibilisée à un modèle particulier de gestion mis en place dans les maisons de repos de la commune de Tjörn en Suède.

    La Fondation a, dans le cadre de ce projet, organisé deux voyages dans cette commune, au mois de mars 2016 et plus récemment, ces 19 et 20 octobre. Cette initiative est connue de l’AViQ, car un membre de la Direction des Aînés, chargée de projets pour la mise en place de la démarche d’amélioration continue au sein des maisons de repos était du voyage.

    Avant de répondre sur la possibilité d’intégrer cette initiative dans notre cadre réglementaire, j’aimerais expliquer très brièvement la philosophie de modèle mis en place dans cette commune.

    Tjörn a développé un modèle organisationnel unique en son genre où les soins sont prodigués dans un environnement qui ressemble davantage au domicile des seniors.

    Les principes du modèle d'organisation et de gestion sont les suivants :

    une place centrale est dévolue à l'usager. Il existe des groupes de travail thématiques : tous les membres du personnel siègent dans l'un des groupes de travail où les activités sont réglées et, en principe, un ou deux résidents y participent également. De plus, les résidents sont impliqués (de manière limitée) dans les activités et tâches quotidiennes ;
    un intraprenad contract. Le Directeur de la maison de repos et de soins est un intrapreneur qui bénéficie d'un haut degré d'autonomie et joue un rôle de coach plutôt que de patron auprès du personnel ;
    l'autonomie dans le domaine des décisions et budgets : il s'agit d'une entité autonome qui reçoit des budgets sur une base triennale. Dans un cadre donné, l'intrapreneur et le personnel décident en toute liberté de l'affectation des ressources.

    L’organisation traditionnelle où les opérations sont gérées par la Direction de haut en bas est supprimée en faveur d’une organisation gérée du bas vers le haut, avec des groupes autonomes et où le personnel a des responsabilités. Dans ce type d’organisation, les changements proviennent de tous les niveaux, c’est-à-dire des individus, des groupes et de la direction centrale.

    Il est important de préciser que cette manière de travailler s’inscrit dans les valeurs fondamentales suédoises, valeurs traduites en mots et en actions pour une meilleure qualité de vie des résidents.

    Pour faire le lien avec nos maisons de repos, j’aimerais rappeler l’importance dans nos normes actuelles du projet de vie institutionnel. Car comme déjà mentionné dans plusieurs réponses parlementaires, le projet de vie de l’établissement est certes une norme obligatoire à laquelle chaque établissement doit répondre pour obtenir un titre de fonctionnement, mais plus fondamentalement la réglementation envisage sa mise en œuvre en réponse aux besoins des résidents afin de leur assurer un bien-être optimal et maintenir leur autonomie. Les valeurs devant être rédigées, mais surtout mises en place dans la vie quotidienne des maisons de repos via ce projet de vie institutionnel rejoignent les valeurs suédoises venant d’être énoncées.

    Malheureusement, et comme également relaté dans plusieurs réponses parlementaires, le projet de vie institutionnel reste souvent un « papier » uniquement nécessaire à l’octroi d’un titre de fonctionnement, souvent copier-coller de modèles types trouvés sur internet. Pourtant, il est essentiel et permet de fixer les grandes orientations de la maison de repos, de définir les spécificités qui la distinguent des autres maisons. Il est nécessaire, comme pour le modèle suédois, de déterminer les valeurs phares de la Direction et des équipes d’encadrement donnant ainsi un sens aux pratiques des membres du personnel quels que soient leur qualification et leur champ d’actions. Et enfin et surtout, les concepts, les instruments de référence, les objectifs, les actions qui y sont développés sont indispensables à la bonne gestion au jour le jour : ils servent au développement permanent d’une politique cohérente au sein de la maison et facilitent le dialogue, la communication instaurée entre les différents partenaires.

    Ce constat met en évidence la différence sur le terrain avec le modèle de la maison de soins intrapreneuriale de Tubberödshus où les visions et objectifs sont les moteurs de la vie institutionnelle.

    Dans de précédentes réponses aux questions parlementaires, je mentionnais également que le projet de vie élaboré à partir des particularités de chaque établissement doit également être considéré comme le support à une auto-évaluation que les structures devraient toutes réaliser. Une démarche d’évaluation interne contribue à une démarche autonome d’appréciation de la qualité en vue d’éclairer les décisions de la structure ; cette démarche d’auto-évaluation étant centrée sur la pertinence et les conditions de mise en œuvre des activités pour les résidents.

    Nous aurons l’occasion à travers nos débats parlementaires sur ma future note d’orientation de revenir sur ce modèle suédois.