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Les nouveaux chiffres du chômage

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2016
  • N° : 68 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 07/12/2016
    • de PUGET André-Pierre
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de l'Emploi et de la Formation

    L’IWEPS vient de sortir des chiffres alarmants qui ne font, finalement, que confirmer ce que l’on sait, ce que l’on pressent, ce que l’on observe : en 23 ans, le chômage n’a pas baissé en Wallonie.

    Et si l’on compare avec la Flandre, ce qu’aime faire Paul Magnette, on constate que le chômage a été divisé par deux dans le nord du pays.

    Ce taux de chômage était de 12 % en 2015, ce qui est évidemment, beaucoup. Mais, surtout, ce sont les jeunes qui sont particulièrement impactés, car ils présentent un risque trois fois plus élevé d’être au chômage que les adultes. Sans surprise, les personnes peu diplômées ont entre trois et quatre fois plus de chances d’être sans emploi.

    L’IWEPS est allée plus loin dans son analyse puisqu’il a fait une enquête afin de savoir quels étaient les freins à l’emploi : 11,5 % citent le manque de solutions pour la garde d’enfants ; 20,5 % pensent que l’origine étrangère est un problème ; 24,9 % citent les difficultés de déplacements ; 32,8 % invoquent la faible qualité d’emplois ; 39,4 % parlent de formations insuffisantes ; 39,8 % citent le manque d’action du monde politique ; 68 % dénoncent la trop grande exigence des employeurs ; 79,7 % jugent la situation économique mauvaise.

    Madame la Ministre constatera que les citoyens pointent l’action politique dans les causes du chômage de masse en Wallonie.

    Comment analyse-t-elle ces chiffres ? Et surtout, n’est-ce pas là la preuve de la déficience des politiques de gauche menées depuis plusieurs décennies en Wallonie ? N’est-il pas temps de mieux communiquer ?
  • Réponse du 05/01/2017
    • de TILLIEUX Eliane

    La publication de l’IWEPS qui, au-delà de l’article introductif, reprend d’anciens articles déjà parus, propose une analyse de données longitudinales (sur une longue période) au départ des enquêtes sur les forces de travail (EFT).

    Rappelons que différentes sources permettent de mesurer le chômage, l’enquête sur les forces de travail en est une parmi d’autres. Si elle présente l’avantage de permettre des comparaisons entre pays (puisque les mêmes questions sont posées partout), elle reste néanmoins une enquête basée sur un échantillon de ménages. Comme toute enquête, elle est donc soumise à des effets d’échantillonnage et les résultats à une marge d’erreurs statistiques.

    L’IWEPS a décidé d’étudier la période comprise entre 1983 et 2015 et la manière dont les régions ont réagi au second choc pétrolier.

    On constate ainsi que c’est entre 1983 et 1989 que l’écart en matière de taux de chômage se creuse entre la Flandre et la Wallonie, soit avant la régionalisation des services publics de l’emploi de 1989.

    Pour mesurer le taux de chômage, le FOREm se base sur des données administratives. Celles-ci permettent de calculer un taux de chômage jusqu’à un niveau de détail fin (par commune, genre, tranche d’âge, etc.). Les données utilisées sont en outre exhaustives et ne présentent donc pas les biais de sélection d’un sondage.
    Elles sont néanmoins soumises aux ruptures statistiques que peuvent entraîner certaines évolutions réglementaires par exemple la fin du pointage ou les fins de droits.

    Le constat réalisé par la presse au départ de l’article de l’IWEPS demande donc à être nuancé. En effet, fin octobre 2016, le taux de chômage administratif est, en Wallonie, de 14,7 %. Dix ans auparavant, en octobre 2006, il était de 18,4 %, ce qui témoigne d’une diminution de 3,7 %. Cette diminution, observée en Flandre sur la même période, est de 0,2 % puisque le taux de chômage administratif est passé de 7,5 % à 7,2 %.

    Ainsi, à la fin octobre 2016, la Wallonie dénombre 232.154 demandeurs d’emploi inoccupés (DEI) contre 220.920 en Flandre et 98.014 à Bruxelles. En termes d’évolution, le nombre de DEI a diminué dans les trois régions du pays. L’ampleur de ce recul varie toutefois d’une région à l’autre. Par rapport à 2014, l’année 2015 a vu le nombre de DEI diminuer de 4,6 % en Wallonie, de 6,5 % à Bruxelles et de 0,2 % en Flandre.

    Avec un peu plus de recul et comparativement à 2008, les écarts sont encore plus marqués. La Wallonie est ainsi la seule région où le niveau de la demande d’emploi est revenu à la situation observée en 2008, soit avant le début de la crise. À Bruxelles, les DEI sont 12 %, et en Flandre, 38 % plus nombreux qu’en 2008.

    En ce qui concerne le taux de chômage des jeunes, qui serait trois fois plus élevé que celui de l’ensemble de la population active, la comparaison est quelque peu « hasardeuse ». Il est effectivement utile de rappeler que le taux de chômage rapporte le nombre de personnes à la recherche d’un emploi à la population active. Parmi les tranches d’âges de plus de 25 ans (essentiellement 25-50 ans), la majorité des personnes sont dites actives sur le marché de l’emploi (c’est-à-dire à l’emploi ou à la recherche d’un emploi). Parmi les moins de 25 ans, seules 3 personnes sur 10 sont actives sur le marché de l’emploi, la grande majorité étant encore aux études (et donc reprise dans la population inactive). Les taux de chômage qui se rapportent aux actifs parmi les 15-24 ans et les 25-49 ans recouvrent donc des réalités très différentes qui biaisent la comparaison.
    Cette précision méthodologique étant faite, on observe qu’entre la sortie des études et l’accès à un emploi stable et correspondant à leurs attentes, les jeunes effectuent généralement un parcours jalonné d’emplois à durée déterminée, à temps partiel ou soutenu par des aides publiques, inévitablement alternés avec des épisodes de chômage. De plus, leur faible ancienneté sur le marché du travail en fait un public particulièrement fragile lors des fluctuations conjoncturelles : en période de récession, les actifs les plus récents, plus souvent sous contrat temporaire que leurs aînés et bénéficiant de moins d’expérience, sont ceux dont les employeurs se séparent le plus rapidement.

    La situation des jeunes par rapport à celle de leurs aînés doit toutefois être relativisée : quel que soit l’état de la conjoncture, les jeunes chômeurs accèdent plus rapidement à un emploi que leurs aînés. À titre d’exemple, selon les données de l’EFT pour la Belgique en 2015, 27 % des demandeurs d’emploi de 15-24 ans ont trouvé un emploi dans les trois mois, 48 % dans les six mois, et 64 % dans l’année ; les indicateurs correspondants pour la catégorie des 25-49 ans s’élèvent à 20 %, 34 % et 49 %. Ces résultats se situent dans la moyenne européenne (UE-28).

    Même chez les jeunes Wallons peu qualifiés, venus s’inscrire pour la première fois au FOREm (les primo-inscrits) en 2015, le pourcentage de ceux qui trouvent un emploi dans les 3 mois descend à 24 %, l’évolution du nombre de demandeurs d’emploi âgés de moins de 25 ans en Wallonie, témoigne, depuis 2013, d’une décrue de la demande d’emploi parmi ce public. Cette tendance baissière parmi les jeunes a débuté bien avant le recul global de la demande d’emploi observé depuis un peu plus de deux ans et avant la mise en œuvre des différentes mesures sur les fins de droits et l’accès aux allocations d’insertion de 2015.

    Cette diminution du taux de chômage des jeunes peut s’expliquer par les facteurs suivants :
    * Une embellie conjoncturelle, depuis 2013, qui est favorable à l’emploi jeune ;
    * la reprise de l’activité intérimaire observée en 2014 et 2015 et qui se poursuit en 2016 et stimule l’emploi des jeunes ;
    * l’arrivée plus tardive des jeunes de moins de 25 ans sur le marché de l’emploi, en raison de la prolongation des études ;
    * un public ciblé prioritairement : les jeunes bénéficient d’un accompagnement individualisé spécifique se traduisant notamment par une accroche rapide. Pointons également le dispositif de la « Garantie pour la jeunesse », le renforcement du plan Activa, depuis juillet 2013, au niveau fédéral ainsi que les différentes aides à l’emploi accordées spécifiquement à ce public.

    Enfin, afin d’apporter une réponse cohérente et adaptée à l’emploi des jeunes, l’offre de service structurelle du FOREm a été adaptée pour s’articuler autour de 5 volets, depuis des actions de prévention et de sensibilisation des jeunes aux métiers porteurs d’emploi jusqu’à la mise à l’emploi, en passant par la formation et les stages, avec l’accompagnement individualisé comme fil conducteur.

    Via le fonds d’urgence de l’Initiative Emploi jeunes et l’axe 4.2 du Fonds Social Européen, le Gouvernement wallon a soutenu deux portefeuilles de projets : le portefeuille « Garantie pour la Jeunesse » et le portefeuille « Initiative Emploi Jeunes » dont les objectifs sont la mise en place de pratiques d’accroche et de suivi des Neets pour rencontrer les objectifs de la Garantie Jeunesse : une reprise d’étude, une formation, un stage ou un emploi pour chaque jeune.

    Le FOREm s’est ainsi doté d’une nouvelle approche pédagogique des jeunes afin de travailler plus rapidement sur les compétences de base. Le projet « compétences clés » vise ainsi à identifier le potentiel du jeune portant sur l’apprentissage, le fonctionnement cognitif et l’émotionnel.

    Enfin, rappelons qu’afin de stimuler l’emploi en Wallonie, notamment auprès des jeunes, le Gouvernement wallon et les partenaires sociaux ont signé, à la fin juin 2016, le Pacte pour l'emploi et la formation en Wallonie.

    Les objectifs visés par ce Pacte sont d’augmenter le taux d’emploi, favoriser la croissance des entreprises, rapprocher l’offre et la demande d’emplois, soutenir les demandeurs d’emploi, mais aussi les travailleurs tout au long de leur vie et de leur carrière professionnelle.