Les taxes sur les outils d'information et de communication

• Session : 2016-2017
• Année : 2016
• N° : 124 (2016-2017) 1

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• Question écrite du 23/12/2016

  • de STOFFELS Edmund
  • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, de l'Industrie, de l'Innovation et du Numérique
  
  Pour ce qui concerne la télévision, on se croirait vivre dans un autre monde. Pour la télévision, on promet la suppression de la redevance pour plus tard, dans le cadre d’une grande réforme fiscale au niveau wallon.
  
  La facture Coditel, donc uniquement pour la télévision analogique, passe d’une dizaine d’euros à plusieurs dizaines d’euros par mois, la location du décodeur et les droits d’auteur obligent cela.
  
  Il convient toutefois de remettre en perspective : si le courant ou l’eau sont de la même nature qu’il y a dix ans, le service télévision est, lui, totalement différent : HD, retours en arrière, nombre de chaînes accru, guide télévision, …
  
  Quid pour internet ? Il y a cinq ans seulement, la ligne téléphonique fixe et l’accès ADSL étaient confiés à Belgacom. Pour le service ADSL Go, on payait 40 euros par mois, 12 Go de volume et une vitesse de surf de 4 Mbps en download… Aujourd’hui, on surfe, via son triple-play à 75 euros par mois, à une vitesse "promise" de 100 Mbps ("plutôt 20 à 30, en fait"), pour un volume illimité. Doit-on se poser la question de savoir si l’accès à l’internet est un luxe dont on peut se passer dans une société d’information et de communication ?
  
  Si je peux entendre et comprendre le raisonnement du Gouvernement wallon en matière de redevance télévision, je dois attirer l’attention sur le fait que – faisant partie du concept de l’accès aux informations – cette redevance s’additionne à d’autres dépenses qui, cumulées, rendent l’accès à l’information (condition élémentaire en termes de liberté d’opinion et d’expression) de plus en plus chère – ce qui pose un défi en termes démocratique. Ne doit-on pas globaliser ladite redevance avec l’ensemble des coûts qui font exploser le coût de la vie ?

• Réponse du 24/02/2017

  • de MARCOURT Jean-Claude
  
  Les éléments relatifs à la redevance télévision ne sont pas abordés dans la Stratégie numérique Digital Wallonia. Néanmoins, il convient d’être attentif aux évolutions technologiques qui bouleversent le paysage des médias numériques et des télécommunications dans la perspective d’accès à ces services pour les citoyens wallons.
  
  La convergence de l’audiovisuel et des télécommunications, tout d’abord, a considérablement effacé les frontières entre des secteurs qui étaient à l’origine régulés de façon distincte. Ensuite, nous sommes entrés aujourd’hui dans une nouvelle séquence de cette convergence avec l’apparition des acteurs de plateformes de contenus numériques, encore appelés, acteur Over The Top (OTT). Ces entreprises disposent aujourd’hui d’une capacité de distribution de leurs contenus qui s’affranchit totalement des régulations existantes. Leur capacité à offrir leurs contenus sur la base d’applications mobiles ou de type « Box » introduit une nouvelle dimension dans l’accès pour le citoyen wallon. Le consommateur dispose en effet d’un choix quasiment illimité de contenus numériques légaux quant aux droits de propriété intellectuels, mais en pouvant s’exonérer des formules classiques d’abonnement de type câble et/ou télécoms. Les Anglo-saxons qualifient déjà ces nouveaux comportements sous le vocable de « Cord Cutters ».
  
  En se détournant des modèles territoriaux imposés par les offres des acteurs télécoms et/ou câble et des contraintes techniques que ceux-ci imposent historiquement au consommateur, comme l’obligation de disposer d’un décodeur propriétaire ou encore l’obligation de s’abonner à de coûteuses offres packagées sans possibilité de dégrouper celles-ci, les consommateurs wallons ont principalement besoin d’une connexion fixe et/ou mobile garantissant techniquement une performance suffisante pour accéder à ces services.
  
  Dès lors, la question première qui se pose est précisément celle de garantir à l’ensemble de nos citoyens cet accès au très haut débit dans des conditions qui permettent une bonne expérience utilisateur des plateformes OTT. C’est précisément à cet objectif que répond l’ensemble des actions engagées vis-à-vis du THD dans le cadre de la Stratégie Digital Wallonia.
  
  Toutefois, au-delà de cet objectif de couverture territoriale au bénéfice de l’ensemble de nos concitoyens, nous devrons demeurer particulièrement vigilants quant au maintien de conditions d’accès satisfaisantes de ces réseaux THD vis-à-vis des différents opérateurs qui souhaiteraient imposer des conditions différenciées aux acteurs OTT. C’est ici la question centrale de la neutralité du Net dont il s’agit. Selon la définition communément admise, la neutralité des réseaux qualifie « un réseau dans lequel aucune gestion différenciée des flux de données n’est pratiquée par les FAI que cela soit :
  - En fonction de l’origine de ces flux (ex. You Tube, iTunes, etc.) ;
  - En fonction de la destination de ces flux (identité du client) ;
  - En fonction du type de flux (VoIP, P2P…) ».
  
  Une telle situation pourrait, en effet, être extrêmement préjudiciable, à la fois pour le consommateur final en particulier, mais également pour l’innovation en général. Elle pourrait conduire à prioriser, dégrader, voire bloquer certains flux. À l’heure actuelle, la législation européenne est plutôt favorable au principe de Neutralité du Net puisqu’elle n’autorise des pratiques affectant la gestion du trafic que si celles-ci s’inscrivent dans les conditions suivantes :
  - Risque avéré de congestion de trafic ;
  - Absence d’effets anticoncurrentiels ;
  - Caractère non discriminatoire des mesures.
  
  À la lumière de ces quelques considérations, on mesure donc l’importance de garantir à l’avenir dans un environnement ouvert des médias numériques pluralistes, un accès transparent et raisonnable, c’est-à-dire respectueux des obligations légales tenant à la protection de la création, des consommateurs wallons aux contenus Internet. Ces enjeux dépassent de loin, la seule dimension de la redevance.
  
  Informations complémentaires et suivi en ligne : https://www.digitalwallonia.be