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Les débordements d'agents communaux sur les réseaux sociaux et les sanctions éventuelles

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 254 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 17/01/2017
    • de KILIC Serdar
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie

    Par le biais de son Directeur général, la Ville de Charleroi a, dernièrement, sanctionné quelques agents communaux qui avaient ouvertement critiqué leurs employeurs, leurs supérieurs hiérarchiques ou leurs collègues sur les réseaux sociaux.

    Si la liberté d'expression est un droit inaliénable, il est clair que nuire à l'image de son employeur ou la ternir est un acte déloyal, susceptible d'être associé à une sanction. L'étalage au grand public est une circonstance aggravante.

    Monsieur le Ministre pourait-il nous rappeler la règle en cette matière ? Quelles sont les infractions et les sanctions qui y sont liées ? Qu'en est-il au niveau des autres villes et communes, ainsi qu'au niveau des Provinces ? La règle est-elle homogène ? Toutes ces entités peuvent-elles prendre leurs propres dispositions et leurs propres réglementations ?
  • Réponse du 24/01/2017
    • de FURLAN Paul

    La liberté d’expression est garantie par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et par l’article 19 de la Constitution.

    La jurisprudence admet trois types de limitations à la liberté d’expression :
    - L’obligation de loyauté ;
    - Le devoir de discrétion ;
    - L’obligation de réserve.

    L’obligation de loyauté « implique une promesse d’obéissance hiérarchique à l’égard du chef de l’administration et de respect de la légalité au sens large »

    Quant au devoir de discrétion, « il s’impose aux fonctionnaires lorsqu’ils sont les confidents volontaires – et non pas nécessaire – d’informations qui, dans l’intérêt de l’administration ou de tiers, ne peuvent être dévoilées. La violation de cette obligation outre le fait qu’elle peut justifier la mise en cause de la responsabilité civile du fonctionnaire, peut-être sanctionnée disciplinairement. (…) Les interdictions absolues ne sont, en principe, pas admissibles ».

    En vertu du devoir de réserve, « les fonctionnaires doivent éviter d’exprimer leurs opinions d’une manière qui risque de porter atteinte à la dignité de leur fonction et, ainsi, de mettre en péril la confiance des administrés dans le service public, notamment du point de vue de l’impartialité et de l’égalité des usagers que ce service doit garantir. S’ils bénéficient du droit de s’exprimer, ils ne peuvent abuser de ce droit portant atteinte à la confiance que le public doit avoir dans le service public (…) il ressort de la jurisprudence que l’agent manque à son obligation et peut donc être puni disciplinairement, lorsqu’il emploie, dans des lettres ayant reçu une certaine publicité, des expressions irrespectueuses, méprisantes ou injurieuses, lorsqu’il diffuse des écrits injurieux à l’encontre de l’administration ou encore lorsqu’il tient en public des propos injurieux et diffamants à l’égard des personnes en charge du service public. (…) ».

    Un agent peut donc être sanctionné disciplinairement par son employeur lorsqu’il porte atteinte aux obligations de loyauté, de discrétion et de réserve.
    Les informations publiées sur les réseaux sociaux tels que Facebook ou Twitter sont généralement considérées comme ne présentant pas un caractère privé et ce d’autant plus lorsque le profil est public ou lorsque le nombre d’« amis » est important. Selon la jurisprudence, cela dépendra essentiellement de la manière dont l’agent a paramétré l’accès à sa page.

    Quant aux sanctions qui peuvent être appliquées aux agents statutaires communaux, celles-ci sont prévues par le Code de la démocratie locale et de la décentralisation (cf. article L1215-3) à savoir, l’avertissement, la réprimande, la retenue de traitement, la suspension, la rétrogradation, la démission d’office et la révocation. Pour les agents contractuels, il convient de s’en référer au règlement de travail propre à chaque entité locale. La jurisprudence considère que des insultes et/ou calomnies dirigées contre l’employeur peuvent constituer un motif grave de licenciement.

    Quel que soit l’employeur, il convient de rechercher le juste équilibre entre, d’une part, la liberté du travailleur de s’exprimer et, d’autre part, ses obligations à l’égard de l’employeur. Toutefois, et pour répondre concrètement à votre question, la sanction appliquée dépendra de chaque cas d’espèce. En tout état de cause, il ne m’appartient pas de m’immiscer dans le pouvoir d’appréciation propre à chaque entité.

    Enfin, les Pouvoirs locaux peuvent mettre en place, à titre préventif, des règles relatives à l’utilisation d’internet et en particulier des réseaux sociaux.