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Les résultats de l'étude de l'IWEPS sur le chômage

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 110 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 19/01/2017
    • de LEFEBVRE Bruno
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de l'Emploi et de la Formation

    Ma question fait suite à une étude récemment publiée par l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique. Cette dernière met en évidence l’accentuation du taux de chômage entre les trois Régions belges.

    En l’espace de 23 ans, le taux de chômage flamand aurait été divisé en deux, passant de 10,7% en 1983 à 5.2% en 2015. Concernant la Wallonie, celui-ci serait resté à un niveau similaire. En effet, il était de 13,5% en 1983 et de 12% pour l’année 2015, ce qui reste un niveau assez élevé. Concernant Bruxelles, ce dernier aurait augmenté de 43%.

    L’IWEPS montre du doigt un fort chômage structurel pour ces deux régions qui est liés au niveau de salaire trop élevé, aux compétences des travailleurs ne répondant pas aux attentes des entreprises au manque de mobilité de la main-d’œuvre, au système d’indemnisation incitant peu au retour de l’emploi, etc.

    Selon l’étude, les principales victimes du chômage sont les jeunes wallons qui atteignent un risque de chômage de 30%, soit trois fois plus élevé que pour celui d’un adulte. Ce taux est 3 à 4 fois plus élevé pour les peu diplômés que pour les diplômés de l’enseignement supérieur.

    Finalement, l’enquête reprend également les causes qui expliquent les difficultés d’accès à l’emploi :
    - 11,5% trouvent que le manque de solution pour la garde d’enfant est problématique ;
    - 20,5% pensent que c’est lié à l’origine étrangère d’un demandeur d’emploi ;
    - 24,9% parlent de problèmes liés à la mobilité;
    - 32,8% accusent la faible qualité de l’emploi;
    - 39,4% seraient liées à une formation insuffisante;
    - 39,8 prennent en ligne de mire les actions du monde politique qu’ils jugent insuffisantes;
    - 68% parlent d’employeurs trop exigeants;
    - 79,7% mettent ça sur le dos de la situation économique

    Madame la Ministre a-t-elle eu connaissance de cette étude ? Dans l’affirmative, peut-elle nous faire de part de son analyse concernant celle-ci ? Apporte-t-elle une confirmation des chiffres cités dans l’étude? Correspondent-ils avec les statistiques élaborées par le FOREm et l’ONEM ?

    S’il existe une différence, il me plairait de connaitre les vrais chiffres du chômage et les chiffres de la création d’emplois en Région wallonne.
  • Réponse du 13/02/2017 | Annexe [PDF]
    • de TILLIEUX Eliane

    Les statistiques sociales et particulièrement celles relatives au chômage sont souvent l'objet de controverses récurrentes, en Belgique, en France comme ailleurs. On y discute fréquemment de l'ampleur de la diminution de la demande d’emploi et du rôle que peuvent jouer les dispositifs et les politiques de l'emploi, en oubliant parfois l’impact du contexte socio-économique.

    Ainsi, outre les différents changements législatifs intervenus depuis le début de l’année 2015, les outils de mesure évoluent également. Par exemple, la suppression du pointage à la fin 2005 conduit à une rupture dans les séries statistiques relatives à la demande d’emploi. Autre exemple, la série du chômage basée sur les Enquêtes sur les forces de travail (EFT) a enregistré plusieurs ruptures statistiques depuis 1999.

    En matière de chômage et de demande d'emploi, il est essentiel de comprendre que chaque série statistique envisagée ici (FOREm, ONEM, EFT) mesure des réalités différentes et est influencée, dans le temps et dans l’espace, par des changements conjoncturels de marché, par des politiques et des réglementations.

    Concernant l’étude de l’IWEPS sur le chômage, celle-ci se base sur la période comprise entre 1983 et 2015. Or, il faut rappeler que la régionalisation des services publics de l’emploi date de 1989 et que c’est précisément dans l’intervalle 1983-1989 que l’écart se creuse entre la Flandre et la Wallonie alors que la gestion de l’emploi se déroule au niveau belge.

    Ainsi, comme le montre le graphique de l’IWEPS en annexe, l’évolution du taux de chômage pour les deux régions, observée après 1989, présente une allure globalement parallèle bien qu’à des niveaux de chômage différents. Concernant la Wallonie, alors que le taux de chômage EFT dépassait 14 % dans les années nonante, il était de 12 % en 2015 et, au troisième semestre 2016 il est de 10,9 %.

    Comme l’indique l’IWEPS, en Wallonie, près de la moitié du chômage est structurel. Une grande différence avec la Flandre concerne les jeunes. En effet, si les jeunes connaissent des difficultés d'insertion, de manière générale, au regard de l'insertion des adultes aussi bien en Wallonie qu’en Flandre, le taux de chômage des jeunes est plus élevé en Wallonie. L'amélioration connue juste avant 2008 a été fortement affectée par la crise économique et financière. Toutefois, on observe que le nombre de demandeurs d’emploi inoccupés (DEI), âgés de moins de 25 ans, a sensiblement diminué en Wallonie depuis le 2e trimestre 2013. Cette période coïncide, par ailleurs, avec une reprise sur le marché de l’emploi wallon.

    En outre, le chômage structurel wallon est relativement stable, bien qu’une légère diminution soit enregistrée depuis 2007. Ce chômage structurel se manifeste notamment par l’éloignement prolongé de l’emploi comme l’indique la proportion relative de chômeurs de longue durée parmi les demandeurs d’emploi inoccupés (DEI).
    En 2016, près de quatre DEI sur dix présentent une durée d’inoccupation de deux ans et plus et sont considérés comme étant des chômeurs de très longue durée.

    Par ailleurs, expliquant pourquoi le chômage structurel demeure élevé, l’insertion à l’emploi dépend de l’acquisition d’aptitudes sociales de base, qu’il est difficile d’acquérir sans être inséré. De plus, bien que des opportunités d’emploi existent pour les personnes peu qualifiées, l’importance du diplôme dans la recherche d’un emploi a été maintes fois répétée. Or, près de la moitié des demandeurs d’emploi wallons sont peu ou pas qualifiés. Ainsi, le risque d’enlisement dans le chômage pour les personnes les moins qualifiées est bien réel. Face à ces évolutions, la formation continue demeure un enjeu majeur pour la Wallonie.

    En ce qui concerne le taux de chômage des jeunes qui serait trois fois plus élevé que celui des adultes, soulignons toutefois que cette comparaison, entre taux de chômage des jeunes et taux de chômage global, est quelque peu hasardeuse. Il est effectivement utile de rappeler que le taux de chômage rapporte le nombre de personnes à la recherche d’un emploi à la population active. Parmi les tranches d’âges de plus de 25 ans, la majorité des personnes sont dites actives sur le marché de l’emploi. Parmi les moins de 25 ans, seules 3 personnes sur 10 sont actives sur le marché de l’emploi, la grande majorité étant encore aux études et donc reprise dans la population inactive. Ainsi, les taux de chômage qui se rapportent aux actifs parmi les 15-24 ans et les 25-49 ans recouvrent des réalités très différentes. Dans la catégorie des 15-24 ans, seule une personne sur trois est effectivement concernée par la problématique de l’emploi, alors que chez leurs aînés, les 25-49 ans, plus de 80 % des personnes sont effectivement sur le marché de l’emploi.

    Par ailleurs, les jeunes effectuent généralement un parcours « accidenté », entre la sortie des études et l’accès à un emploi stable, correspondant à leurs attentes. De plus, leur faible ancienneté sur le marché du travail en fait un public particulièrement fragile lors des fluctuations conjoncturelles puisqu’ils sont souvent les premiers dont les entreprises se séparent.

    Considérant ces éléments, il va de soi que les jeunes constituent un public qui demande une attention toute particulière, et ce d’autant plus à la sortie des études où le diplôme obtenu demeure leur principal atout pour débuter dans la vie active. Or, en Wallonie, quatre jeunes demandeurs d’emploi inoccupés (DEI) sur dix sont faiblement qualifiés.

    La Flandre se distingue des deux autres régions par un plus faible pourcentage de jeunes DEI peu qualifiés, mais aussi par un pourcentage moindre de jeunes inoccupés de très longue durée (plus de 2 ans). Ainsi, seuls 7 % des jeunes DEI flamands sont faiblement qualifiés et inoccupés depuis plus de 2 ans contre 11 % à Bruxelles et 10 % en Wallonie.

    Néanmoins, quelle que soit la source utilisée, un constat apparaît : le chômage en Wallonie diminue depuis plusieurs mois, voire plusieurs années. Le tableau en annexe indique qu’en ce qui concerne :
    1. les séries administratives (ONEM et Le FOREm), la décrue du chômage est amorcée depuis 2006. En 2015, la décrue s’est accélérée surtout en ce qui concerne les chiffres de l’ONEM (les fins de droits et la limitation aux allocations de certains jeunes expliquent en partie cette tendance).
    2. la série du chômage basée sur les EFT montre aussi une tendance baissière entre 2006 et 2008, mais suivie d’une hausse entre 2009 et 2013, une stabilisation en 2014 et un recul entre 2015-2016.

    Selon les séries statistiques du FOREm, il y avait 552.893 demandeurs d’emploi inoccupés (DEI) en Belgique en 2016, dont 41,7 % en Wallonie, 40,7 % en Flandre et 17,7 % à Bruxelles.
    En termes d’évolution, le nombre de DEI a diminué dans les trois régions du pays. L’ampleur de ce recul varie toutefois d’une région à l’autre. Par rapport à 2014, l’année 2016 a vu le nombre de DEI diminuer de 9,4 % en Wallonie contre 11,3 % à Bruxelles et 3,7 % en Flandre.

    Avec un peu plus de recul et comparativement à 2008 qui a marqué le début de la crise financière, le niveau de la demande d’emploi est, en 2016, de 6 % inférieur en Wallonie alors qu’il est de 6 % supérieur à Bruxelles et de 33 % supérieure en Flandre.

    Ainsi, parmi les 230.294 DEI wallons dénombrés en 2016 :
    * 52 % sont des hommes ;
    * 47 % sont faiblement qualifiés (au plus diplômés de l’enseignement secondaire du 2e degré) ;
    * 20 % sont âgés de moins de 25 ans, 25 % ont 50 ans et plus ;
    * 29 % sont inoccupés depuis moins de six mois et 38 % depuis deux ans et plus.

    Le taux de demande d’emploi, en 2016, s’établit ainsi en Wallonie à 14,6 %, ce taux rapporte le nombre de DEI à la population active. En 2014, ce taux était encore de 16,1 %.

    En Wallonie, la baisse du nombre de demandeurs d’emploi inoccupés recouvre toutefois des réalités différentes en fonction des caractéristiques des personnes :

    * Parmi les 230.294 DEI wallons, 16 % sont des personnes inscrites obligatoirement (à la demande d’un CPAS) ou librement (de leur propre initiative). Cette proportion de personnes qui n’ont pas/ou plus droit à des allocations de chômage de l’ONEM était de 14 % en 2014. Ainsi, la part des DEI percevant des allocations de chômage de l’ONEM (les DEDA) a diminué alors que la part des DEI n’ayant pas ou plus droit à des allocations a augmenté. Il s’agit bien évidemment d’une conséquence directe des mesures législatives des fins de droit ainsi que de la limitation à l’accès aux allocations d’insertion de certaines catégories de jeunes.

    * La part des femmes parmi les DEI n’a cessé de diminuer depuis 2008 (48 % des DEI sont des femmes en 2016 contre 53 % en 2008). Si depuis 36 mois, tant les nombres de DEI femmes que celui de DEI hommes diminuent, le recul reste plus marqué parmi les femmes. Divers facteurs peuvent expliquer cette tendance. D’une part, la crise débutée en 2008 a surtout touché des secteurs plutôt masculins (ex. industries manufacturières, construction, etc.) alors que d’autres, plus féminins, ont continué de créer de l’emploi (ex. santé, administration, éducation, etc.). Par ailleurs, les récentes mesures législatives relatives à la fin de droit aux allocations de chômage ont touché un public majoritairement féminin (60 %). Une partie de ces personnes ne se sont pas réinscrites au FOREm.

    * Entre 2014 et 2016, soit les trois dernières années, on observe pour toutes les classes d’âge un recul en termes de demande d’emploi, particulièrement au niveau des jeunes de moins de 25 ans (-13,3 %) et des personnes âgées de 40 à moins de 50 ans (- 13,5 %).

    * Entre 2014 et 2016, toutes les catégories de durées d’inoccupation montrent aussi une baisse du niveau d’emploi, particulièrement auprès des personnes inoccupées entre 6 mois et moins d’un an (-14,5 %) et celles inoccupées entre un an et moins de deux ans (-17,1 %).