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La limitation du débit de l'eau chez les consommateurs en défaut de paiement

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 514 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 20/02/2017
    • de STOFFELS Edmund
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire, de la Mobilité et des Transports et du Bien-être animal

    Le 31 août dernier, le Gouvernement wallon a décidé d'autoriser les distributeurs d'eau à limiter le débit chez les consommateurs en défaut de paiement. Les distributeurs peuvent limiter le débit de l’eau à 50 litres/heure au lieu de 500 litres/heure. A mon sens cette décision devrait être revue.

    En effet, les personnes en réelle difficulté sont tout autant touchées par cette décision que les mauvais payeurs.

    En effet, avec un simple filet d’eau, il n'est plus possible d'utiliser une machine à lessiver ou un chauffe-eau. Il n'est plus possible de prendre des douches, les repas ne peuvent être préparés qu'à certaines heures etc. Cela entraîne des soucis d’hygiène et des frais supplémentaires (lavoir, eau en bouteille, etc.) ce qui rend la situation financière de ces personnes en situation précaire encore plus difficile.

    Cela est en contradiction avec les mesures du Plan wallon de lutte contre la pauvreté !

    En 2015, 8,5 % des usagers wallons étaient confrontés à des difficultés de paiement (soit 140.000), les 4 grands distributeurs d’eau de Wallonie (90 % qui couvrent de la population) ont posé 2.262 limiteurs.

    L’eau est un droit fondamental pour chaque être humain. J’éprouve des difficultés d’appliquer la logique propre à un bien commercial. Même si je reconnais que chacun doit payer sa consommation d'eau, j’hésite à limiter d’une telle façon l’accès à l’eau dans la mesure où s’ajouteront à la difficulté d’honorer sa facture d’autres problèmes qui risquent d’aggraver la situation du ménage en difficulté.

    Ne faudrait-il pas, à l’instar du marché de l’énergie, fixer un tarif social qui s’applique d’office aux clients protégés aux sens fédéral et régional du terme ? Cela permettrait sans doute d’alléger le coût annuel et permettrait aux ménages en situation précaire de pouvoir effectivement payer leur consommation. En effet, pour ce qui est de l'énergie, les clients payant les factures le plus régulièrement sont les « clients protégés » ne souhaitant pas être pénalisés !
  • Réponse du 13/03/2017
    • de DI ANTONIO Carlo

    Le 31 août 2016, le Gouvernement a approuvé des modifications réglementaires du Code de l’eau avec notamment l’établissement d’une procédure d’encadrement de la pose de limiteurs de débit par les distributeurs.

    Avant cet arrêté, la pose des limiteurs de débit était déjà une pratique à laquelle certains distributeurs avaient recours et celle-ci n’était tout simplement pas encadrée. Chaque distributeur avait ses propres règles en la matière. Cet arrêté a établi un encadrement à cette pose avec le recours systématique à l’avis préalable du CPAS. J’ai par ailleurs supprimé toute référence au fait que ces limiteurs pouvaient être considérés comme une amélioration technique relevant du Fonds social de l’eau.

    Cependant, je rejoins l'honorable membre en partie dans son analyse : la pose des limiteurs de débit ne doit pas se tromper de cible. Elle doit servir à limiter les impayés de factures d’eau pour les mauvais payeurs, pas pour les personnes qui sont en réelle difficulté de paiement du fait de revenus insuffisants ou de circonstances particulières. À cette fin, j’ai demandé à AQUAWAL de réaliser une étude dont l’objectif est d’analyser la situation actuelle, afin d’avoir une meilleure connaissance des personnes qui actuellement sont visées/soumises à ces limiteurs de débit et ainsi d’encore mieux encadrer la pose des limiteurs de débit afin de ne plus poser des limiteurs dans les familles précarisées.

    C’est ce qui est repris dans le rapport semestriel du 23 février 2017 sur le plan wallon de lutte contre la pauvreté. Il n’y a donc pas de contradiction entre la politique de l’eau et la politique sociale du Gouvernement wallon, mais bien un dialogue permanent entre les acteurs concernés.

    Il ne faut pas aller vers une interdiction totale de la pose de tout limiteur de débit, comme en Angleterre par exemple, car l’effet sur le nombre d’impayés et les irrécouvrables serait immédiat. Ceux-ci devraient alors être compensés par une augmentation des tarifs de l’eau, répercutée sur l’ensemble des ménages wallons.

    Par ailleurs, la Wallonie a fait le choix pour aider les personnes en difficulté de paiement de leur facture d’eau, non pas d’aller vers un système de tarif social, mais bien d’un recours possible au fonds social de l’eau. Dans le principe du fonds social de l’eau, il y a celui de la notion de solidarité ; il permet de venir en aide aux personnes précarisées, mais tout en les responsabilisant sur leur consommation d’eau. En effet, les difficultés de paiement sont fréquemment liées à la combinaison de faibles revenus et de surconsommations. L’établissement d’un tarif social peut entraîner une déresponsabilisation de la part de ses bénéficiaires et avoir comme un effet pervers des surconsommations d’eau.

    Par ailleurs, le tarif social n'est efficace que si les catégories sont bien définies. Or, d'après AQUAWAL, les ménages d'ouvriers sont plus à risque de défaut de paiement que les personnes isolées et âgées. De plus, l’établissement d’un tarif social présente l’inconvénient de mettre des seuils qui, s'ils sont dépassés, supprime le droit du ménage aux réductions, alors que le gain en revenu est parfois insuffisant pour compenser la perte du droit.

    En conclusion, le fonds social de l’eau est plus efficace que l’établissement d’un tarif social pour l’eau, car il vise les personnes en difficulté, quel que soit leur statut.