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Les normes du Système européen de comptes économiques intégrés (SEC)

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 179 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 15/03/2017
    • de STOFFELS Edmund
    • à LACROIX Christophe, Ministre du Budget, de la Fonction publique, de la Simplification administrative et de l'Energie

    L’unanimité se fait jour autour d’une vieille idée : il faut  stimuler l’économie par la relance des investissements publics. Cette façon de voir les choses renoue avec la théorie keynésienne.

    Le Pacte national des investissements stratégiques et le Plan Juncker, semblent tous deux suivre cette voie, voie qui est aussi approuvée par les partenaires sociaux.

    En effet, avec des taux d’intérêt historiquement bas, une épargne surabondante, une économie européenne molle, des besoins énormes pour la création ou la modernisation de nos infrastructures (mobilité, santé, énergie, éducation, etc.), il faut réagir.
    La Belgique est malade et gangrénée par un sous-investissement structurel qui dure depuis plus de 25 ans.

    Les normes SEC, traitent avec une très grande sévérité la dette publique provenant de la réalisation des projets d’investissement public.

    Ces normes ne tiennent aucun compte de la différence entre une bonne dette publique (investissements dans les infrastructures stratégiques) et une mauvaise dette publique (financement des dépenses courantes).

    Un autre problème est le fait que les dépenses d’investissement doivent être imputées dans leur intégralité et en une seule fois sur l’exercice comptable, en alourdissant donc le résultat, et ce, indépendamment de la durée de vie économique de l’actif constitué à partir des excédents des exercices antérieurs.

    Je ne peux pas me débarrasser de l’impression que les normes SEC répondent à un agenda caché : ce que l’autorité publique ne peut plus réaliser comme investissement, alors que le besoin est réel, cette même autorité devra tôt ou tard le céder au secteur privé.

    C’est ainsi que les voies sont tracées pour que des secteurs intensifs en investissements tels que l’eau, la mobilité, la distribution d’énergie et d’autres passent dans les mains du secteur privé. Quelle est votre analyse concernant cette question ?

    Y a-t-il, à l’initiative de la Région wallonne ou des autres Régions de Belgique, des tentatives de négocier avec l’UE une modification des règles de façon à ce qu’elles soient moins asphyxiantes ?

    Imaginons que le Plan Juncker ne trouve pas de répondant au niveau des autorités publiques belges et régionales (parce que trop contraignant par les normes SEC), on serait dans l’absurdité la plus complète, sauf qu’on s’exposera à la critique de ne pas avoir pu tirer profit dudit Plan. Ce risque se pose-t-il oui ou non ?
  • Réponse du 29/03/2017
    • de LACROIX Christophe

    Je partage entièrement les différents constats que pose l'honorable membre. D’une part, la croissance reste faible en Belgique, mais pas seulement. C’est également le cas dans de nombreux autres pays européens. D’autre part, les investissements publics ont très régulièrement fait les frais des diverses vagues d’assainissement qui se sont succédé depuis 25 ans. L’investissement nouveau, dans notre pays, est à peine suffisant pour compenser la dépréciation du stock de capital existant.

    La seule action qui s’impose, c’est de relancer au plus vite l’investissement public stratégique. Or, comme le rappelle l'honorable membre, notre budget pour les investissements est contraint par une tenaille de deux règles européennes : d’un côté, la règle budgétaire, qui pousse au retour à l’équilibre et limite donc la possibilité de relancer l’investissement, à moins de saigner à blanc d’autres secteurs de nos dépenses. De l’autre, la règle comptable qui impose notamment la prise en compte des dépenses d’investissement sur une seule année.

    Y aurait-il un agenda caché ? Tout d’abord, comme Ministre du Budget, je dois rappeler que les ressources qui financent l’action publique sont, par définition, limitées. Il faut donc rester vigilant, à ce point vue, quelles que soient les règles budgétaires et comptables. La récente dégradation de notre rating par Moody’s est une illustration de cette réalité.

    Au-delà de ces considérations, sur une vision à plus long terme des tendances et des politiques économiques, je dirais que l’agenda est plutôt clair, au contraire. De fait, on nous pousse à limiter l’action des pouvoirs publics, à privatiser ce qu’il est, ou devient, difficile à financer. Cette tendance est en cours depuis un moment déjà, elle est inquiétante. À notre niveau, nous faisons cependant en sorte de maintenir une action publique forte, solidaire, juste et efficace.

    En ce qui concerne les initiatives de la Région, le Gouvernement s’était déjà positionné en décembre 2014 pour demander :
    - une modification des règles d’imputation SEC (Système européen des comptes) des investissements dans les budgets et comptes publics.
    - une neutralisation - selon des modalités et un champ d’application à déterminer - des investissements réalisés par les autorités publiques pour soutenir l’économie en cette période de basse conjoncture.

    En outre, depuis l’année dernière, nous travaillons avec les Gouvernements des Régions, Communautés et du Fédéral à trouver des solutions pour booster les investissements publics en Belgique. Nous avons émis plusieurs propositions, dans la ligne du position paper de 2014. À l’évidence, il n’est pas simple de progresser dans cette matière, mais nous attendons toujours du Fédéral une position claire, et une avancée significative du côté du Plan national d’investissement.

    Du point de vue des règles comptables, la Banque Nationale nous a indiqué que ce ne sont pas tellement les règles SEC elles-mêmes qui devraient être modifiées, mais le solde SEC repris dans les textes européens relatifs à la procédure de déficit excessif. En effet, le système SEC prévoit déjà, en réalité, le calcul de différents soldes, avec (entre autres) différentes méthodes d’imputation des investissements, notamment en tenant compte des amortissements plutôt que des dépenses d’investissement. Cette méthodologie permet l’étalement de l’impact des investissements dans le temps.

    Une telle modification des textes européens pourrait donc être une piste à suivre, une position commune à défendre par la Belgique.

    Nous plaidons toujours, parallèlement, pour plus de flexibilité, et pour une exonération des investissements stratégiques des trajectoires budgétaires. Dans ce cadre, nous avons avancé, avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région bruxelloise, l’idée d’une Entité III, hors trajectoire, qui reprendrait l’ensemble des investissements stratégiques des pouvoirs publics belges.

    L’immunisation de ces investissements leur permettrait de ne pas être touchés par les économies, même si par ailleurs des efforts sont réalisés pour redresser, progressivement, de manière responsable, les comptes publics.

    Enfin, il est certain que le Plan Juncker, sous sa forme actuelle, n’apporte qu’un soutien très limité à la Wallonie. Les règles budgétaires sont en cause, c’est un fait, mais la nature et les conditions des opérations le sont également.